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[discussions] A-TE-RRE !

Posté par BALSAN DUVERNEUIL le 10/6.

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Je suis atterré. Je viens de lire de rapport introductif du collectif
national de l'UNEF du 3 juin, signé de Cécile Cukierman.
Comment peut-on être aussi imprécis dans ses analyses, loin des réalités
concrètes des luttes sociales et flou dans ses perspectives ? Je n'avais
jamais lu de textes issus d'un syndicat national aussi médiocre.

Comme ça m'énerve, je me suis amusé à relever les erreurs et les handicaps
d'analyses.

"La France est aujourd'hui en période de croissance. (...) La semaine
dernière a été annoncé une baisse du chômage qui là encore s'il faut
regarder de plus près démontre une situation de croissance. Cette situation
économique peut laisser à penser que le mouvement social va rester en
attente or il n'en est rien".
Bien sûr qu'il n'en est rien. C'est justement la dialectique qui existe
entre 1/ L'accroissement de la richesse du pays, 2/L'accentuation des
réformes issus de Maastricht-Amsterdam, 3/Le développement de l'emploi
précarisé et 4/Les effets d'annonce officielle autour de "la croissance
revenue" qui provoque un phénomène d'accentuation des luttes sociales. Il
faut être bouché pour ne pas voir cette dynamique !

"Le MEDEF est à l'offensive avec un contrat d'aide au retour à l'emploi
marqué par la volonté de massifier les contrats à courte durée, avec
l'obligation pour les chômeurs d'accepter n'importe quel emploi. "
L'excellente Cécile Cukierman confond ici deux choses, qui certes, font
partie de la même démarche de la part des patrons, mais sont différentes du
point de vue de leur application et de la réaction que doivent avoir les
syndicats à ce sujet. D'un côté le "CARE" : Contrat d'aide au retour à
l'emploi, qui effectivement, est une espèce de STO pour chômeur et qu'il
faut rejeter vivement et de l'autre le CDD - BTP, un contrat du type de
celui qui existe dans les travaux public, d'une durée de 5 ans maximum, qui
se substituerait peu à peu à l'actuel CDI. Il faut bien évidemment le
rejetter vivement. Cependant, et c'est là l'intérêt pour un syndicat
étudiant : le CDD BTP est le calque dans le monde du travail du projet de
développement de la mobilité chez les étudiants, prônés par Allègre, Lang et
l'OCDE. J'ai écris pas mal de papiers sur cette question sur le site Luttes
étudiantes. Pourquoi ce lien entre ces deux éléments n'est-il pas présent
dans le texte de Cécile Cukierman ?

"La proposition faite par le parti communiste français aux organisations du
mouvement social d'organiser le tour de France des inégalités. A cette
occasion une rencontre avec les organisations étudiantes (comme l'Unef,
l'Unef-id, la Fage, la Joc, le Mjs, le Mjcf...) s'est tenue pour présenter
cette initiative. Il est donc proposé que l'UNEF s'engage dans cette
initiative dans un esprit de convergences sur cette question des
inégalités".
Peut-être serait-il judicieux que Cécile Cukierman relise la Charte d'Amiens
? Et qu'elle s'interroge aussi sur le fait que le PCF fait partie du
gouvernement qui met en place cette précarité et conserve ces inégalités. A
ce jour, la seule position que le gouvernement a eu surla question du CARE
est la suivante : "il est normal que les partenaires sociaux envisagent la
modernisation des aides sociales et des rapports salariés" (Laurent Fabius,
Le Monde, 5 juin 2000).

"Un nouveau ministre a été nommé suite à un fort mouvement de l'Education
nationale qui portait aussi bien sur la question du statut des enseignants,
des moyens, mais aussi de la pédagogie pour les élèves..."
Faux ! Si les enseignants du Gard et de l'Hérault lisaient ces mots leur
compréhension seraient claire : Cécile Cukierman dit la même chose que la
direction de la FEN. Les enseignants se sont mis en grève sur deux
revendications : Création de poste d'enseignant statutaire à la hauteur des
besoins et abrogation des réformes Allègre ! On peut ressortir les photos
des manifestations et les communiqués officiels des comités de grève du
mouvement de février-avril 2000 pour vérifier. La question de la "pédagogie
pour les élèves" était mise en avant par les directions syndicales
pro-Allègre, afin de justifier ses réformes. La direction de l'UNEF
aurait-elle la même ligne ?

"Ainsi de nombreux collectifs se sont mis en place associant les élèves, les
parents et les profs pour réfléchir à quelle école pour demain? (Cf. La
ligue de l'enseignement)".
Si Cécile Cukierman avait dû écrire ce texte en 1995, sûr qu'elle aurait
indiqué : "De nombreux collectifs se sont mis en place pour réfléchir à la
question #la loi Juppé est une bonne idée# (Cf. l'initiative intéressante du
RPR)". En effet, lorsque l'on sait ce qu'est la Ligue de l'enseignement, ses
rapports politiques avec le gouvernement (Philippe Campinchi, ancien
président de l'UNEF-ID est actuellement président de cet organisme très
indépendant), et le contenu de la question (ce qu'elle recouvre dans le
cadre actuel), ce paragraphe devient très suspect.

"Pour autant, ce ministre n'a fait que des effets d'annonce et peu de choses
se mettent en place concrètement".
C'est vrai : peu de choses se mettent en place. Jack Lang organise pour la
rentrée les TPE, développe U3M, prépare une loi sur la mobilité des
étudiants et des enseignants, a sorti une nouvelle réforme des LP qui est le
calque légèrement adouci de la réforme Allègre, les premières expériences
d'Université virtuelle et de téléenseignement (cf. Attali) ont été inauguré
par Lang à Sarrebrück en mai, l'agence Edufrance est allé à Vancouver vendre
"l'offre de formation française à l'étranger". Et tout ça en deux mois. J'ai
consacré d'ailleurs un dossier à Vancouver sur Luttes étudiantes. Si Cécile
Cukierman écrivait "beaucoup de choses se mettent en place concrètement",
sûr qu'une loi sur la privatisation du service public eût été votée.

"Concernant l'enseignement supérieur, là encore les gestes se font attendre.
En effet, J. Lang n'a pas annoncé de changement radical avec la politique
d'Allègre concernant la promotion du service public d'Enseignement supérieur
et sur les réformes en cours (U3M, licence professionnelle, harmonisation
européenne, loi sur l'innovation...)".
Jack Lang n'a pas annoncé de changement radical, c'est vrai. Mais moi
j'aurais écrit : "Jack Lang continue à mettre en place les réformes
Allègre". C'est une nuance.

"Ce rapport établi par l'OVE confirme l'existence d'une précarité étudiante
tout en renvoyant à la baisse le nombre annoncé par le rapport Dauriac,
puisque l'OVE établi à 20.000 le nombre d'étudiant vivant en dessous du
seuil de pauvreté".
23.000 ! Il faut lire les rapports. Tout ça est très bien mais quelle est la
conclusion qu'il faut en tirer ? Quel est le calcul de l'UNEF sur la
question ? Que signifient la publication de ces rapports alors que le
gouvernement s'apprête, en accord avec l'UNEF-ID, à réformer l'aide sociale
étudiante ?

Ça c'était l'analyse de Cécile Cukierman. Un peu courte non ? Quid de
l'intervention étudiante dans la lutte des autres composantes de l'éducation
nationale ? Quid des appels à la grève pour septembre lancé par de nombreux
comité de grève enseignant et IATOSS ? Quid des mouvements étudiants qui ont
lieu actuellement en Europe et dans le monde (Espagne, Italie, Grèce,
Mexique...) ? Quid de la lutte contre les réformes Allègre ? Quid des moyens
donnés aux AGE pour qu'elles puissent réinvestir le terrain, recruter et se
battre ?

Cécile Cukierman, et avec elle la direction Delpas, ont en revanche plein de
travail à leur actif mené dans des réunions et des fêtes : "festivals à
Bordeaux, Orléans et récemment à Paris 8 avec le festival art et création,
l'élaboration des listes au CROUS où de nombreux liens ont été tissés avec
des associations étudiantes culturelles, d'étudiants étrangers, d'étudiants
handicapés, de résidents en cité-u..., l'oragnisation d'une semaine des
étudiants salariés à Evry avec le SNES, la CGT, la JOC, le Réseau
anti-précarité du Mouvement jeune communiste., le travail effectué en début
d'année par le secteur insertion professionnelle dans le collectif jeune sur
les 35h, le travail fournit dans le collectif droits des femmes, la
participation à l'égalité parade puis dans quelques jours avec la marche
mondiale pour le droit des femmes, enfin ce qui a été perçu comme un
événement étudiant cette année avec la création d'une nouvelle mutuelle
étudiante".
Où sont les combats contre les réformes Allègre ? Dans cette énumération, je
ne vois que du vent. Enfin, du travail institutionnel et associatif.
Participer à des manifestations qui "ne mangent pas de pain", signer des
appels et des pétitions dont on sait qu'ils ne donneront rien, renvoyer
l'ascenseur aux PCF et à ses cache-sexe (RAP, CJ35h...), organiser des
festivals culturels (payés par le FAVE ?)... tout ça ressemble précisément à
ce que fait l'UNEF-ID... et dans son rôle, la FAGE.

Plus drôle encore : la création de la ME, chose pourtant majeure pour les
étudiants, occupe un paragraphe ! Pour y parler de quoi ? Sur les
discussions et les combats qui s'y sont déroulés avec l'UNEF-ID. Pas un mot
sur l'intérêt pour la santé étudiante.

"L'Unef est conforté dans sa démarche d'être à l'initiative d'une
recomposition du mouvement étudiant".
Je sais pas vous, mais moi ça sonne à mes oreilles comme si Hiro Hito, juste
après Hiroshima, avait dit "Nous sommes au bord de conquérir les
Etats-Unis".
Et l'inévitable : "en même temps, les derniers résultats au CROUS puis au
CNOUS (5 élus Unef-id, 2 fage/pde, 1 uni) doivent nous pousser à réfléchir
plus en profondeur le type de syndicalisme que nous voulons porter pour être
utiles au plus grand nombre". Cécile Cukierman peut effectivement prendre le
temps de la réflexion. Pourquoi, en sciant pendant des années la branche sur
laquelle j'étais assise, j'ai fini par tomber ?

(...)

"Au vu du Collectif national, une délégation de l'UNEF a rencontré une
délégation de l'Unef-id, le dimanche 4 juin. La liste déposée lundi comprend
: 11 élus associatifs et 11 élus syndicaux dont 3 pour l'UNEF répartis ainsi
: 1bis, 3 et 8 sur la liste".
On appelle aussi ça de la sodomie.
"Une réunion avec les candidats de la liste s'est tenu mardi 6 juin après
midi pour coélaborer la plate forme électorale, ci jointe dans le courier."
Et on signe le contrat avant même qu'il soit écrit.