[discussions] syndicalement incorrect
Posté par =?iso-8859-1?Q?SUD=2D=E9tudiant?= le 29/5.
A toutes les sections syndicales étudiantes qui pensent qu'il est encore
possible de lutter syndicalement et de contrer l'avancée libérale dans
l'éducation et qui veulent s'atteler à cette tâche.
Du syndicalisme "syndicalement incorrect"
Des syndicalistes radicaux/les, combatif/ve-s et bagarreur/se-s
À l'heure où se construit l'Europe des traités - une Europe libérale - et
où sous prétexte d'harmonisation européenne les gouvernements entendent
sacrifier les services publics en les privatisant par petite touche, la
construction d'un projet alternatif se joue d'emblée à l'échelle
européenne. Il est urgent de faire entendre la nécessité de construire une
Université démocratique dans une société démocratique, garantissant le
droit aux études supérieures pour toutes et tous sans distinction de
nationalité, de sexe, ou sociale. Une Université qui s'inscrirait dans un
système scolaire dont le rôle principal serait d'offrir à chacunE les
moyens de maîtriser son destin professionnel et social. Une Université dont
l'activité d'enseignement et de recherche serait indépendante des pouvoirs
politiques locaux tels qu'ils sont et des pouvoirs économiques. Une
Université ouverte au monde et sur le monde.
Cette transformation est possible.
Nous voulons la mener avec l'ensemble des mouvements qui se revendiquent de
la transformation de la société, ceux qui n'ont pas abdiqué, qui résistent
au fatalisme. Par ce que nous devons toutes et tous défendre nos conditions
d'existences face au même système libéral qui transforme la planète en un
vaste supermarché où tout, même les besoins les plus élémentaires, les
ressources naturelles et les individus, s'achète, se vend et se jette au
gré des aléas boursiers. Cette conviction solidaire est au c¦ur de notre
combat syndical.
Ce n'est donc pas par hasard que nous avons choisi l'outil syndical
"SUD-étudiant" pour mener ces problématiques et ces enjeux exprimés déjà
avec force dans le mouvement étudiant de 1995. Aujourd'hui encore celles-ci
s'articulent autour de trois grandes préoccupations :
1/ Au premier chef, des exigences de démocratie interne permettant à toutes
et à tous, quelque soit son niveau d'investissement, de participer à
l'élaboration et à la prise des décisions, ainsi que de voir pris en compte
l'expression de ses désaccords par l'effort conjoint de travailler au
maximum à la recherche d'un consensus sans passage en force d'une majorité
sur une minorité. En externe enfin, SUD-étudiant se veut être avant tout un
outil au service des étudiantEs, et veille à placer ceux/celles-ci au c¦ur
de la décision et de l'action. D'abord, en diffusant systématiquement les
informations et les explications les plus précises sur les projets portés
par le ministère ou par les administrations universitaires : les projets
sont systématiquement présentés dans leur intégralité, avec des renvois
explicatifs au texte et les commentaires du syndicat. Cette séparation
entre texte, éléments de compréhension et position argumentée de
l'organisation syndicale doit contribuer à donner une lisibilité aux
projets, chacunE pouvant alors ainsi se déterminer en pleine connaissance
de cause. Ensuite, en refusant de se substituer aux étudiantEs : pas de
négociation à l'insu des étudiantEs, ni d'accords contre leurs avis. Enfin
et surtout, au cours des actions, en soumettant nos propositions au débat
et au vote des assemblées générales. Dans les luttes, les étudiantEs
innovent, renouvellent les formes de démocratie. Une démocratie directe où
les éluEs sont mandatéEs, révocables, responsables devant leurs
mandataires. Dans les luttes, les étudiantEs débattent, se fixent ensemble
des objectifs, inventent des formes d'action et de mobilisation. Dans les
luttes, les étudiantEs se réapproprient les bases de ce qui est pour nous
le syndicalisme. Le syndicalisme que nous voulons construire s'appuie sur
ces bases et entend les faire fructifier à la lumière des expériences
récentes, les enrichir de nos débats et de nos actions. Nous parions sur
l'intelligence des étudiantEs, non sur du pré-mâché.
C'est cet ensemble d'exigences qui fait la conception syndicale portée par
SUD-étudiant : radicalement anti-bureaucratique, nous ne nous réfugions pas
derrière des mots d'ordre tout prêts et tout faits, mais nous cherchons à
saisir ce qui dans la situation analysée mérite d'être retenu et ce qui
mérite d'être combattu, et comment le combat doit se mener. Ce qui est
forcément dérangeant, mais aussi enthousiasmant, palpitant et festif.
Archétypes militantEs, s'abstenir !
2/ En regard de ces enjeux, et étant donné la crise dans laquelle est
plongé le syndicalisme étudiant, la construction d'un syndicalisme
renouvelé, d'un syndicalisme de lutte, radical, unitaire, démocratique,
ouvert sur le monde, est rendue chaque jour plus pressante. Sans prétendre
apporter seul toutes les réponses, SUD-étudiant entend contribuer à la
nécessaire recomposition du syndicalisme étudiant en proposant
systématiquement des cadres d'actions unitaires, sur des contenus communs.
Il entend permettre l'émergence d'un pôle qui soit le porteur intransigeant
d'un projet alliant la défense quotidienne des droits des étudiantEs et la
transformation radicale de l'enseignement supérieur. Et parce que cette
bataille ne peut se concevoir qu'en lien avec celle des salariéEs, cette
volonté unitaire doit se prolonger en dehors de l'université. Pour faire
apparaître la cohérence globale et avoir plus de force dans nos combats il
nous faut articuler les revendications étudiantes et celles des autres
catégories sociales. Rejoindre l'union syndicale G10 Solidaires a donc été
un choix important. Il ne suffit de décréter des liens pour qu'ils
existent. C'est un riche travail d'apprentissage mutuel, de confrontations
réciproques et de luttes communes. Cet engagement interpro n'est pas un
gadget. Il illustre notre souci d'être de pleins pieds dans la société et
dans ses luttes : pas juste à côté ou écartéEs du débat et des enjeux, mais
en résonance avec les préoccupations d'un milieu étudiant de plus en plus
salarié, précarisé, flexibilisé.
3/ Enfin, face à la complexité des attaques libérales que mènent les
gouvernements successifs, de nouveaux défis se posent à tout syndicaliste
qui cherche à défendre le Service public, tant en matière de solidarité que
d'égalité. Une réforme de l'Education nationale et de l'Enseignement
supérieur est certes nécessaire, mais elle ne peut se faire sous couvert
d'un discours qui s'annonce social mais qui ouvre grand la porte à la
sélection, la concurrence, la privatisation de la formation. Ainsi, c'est
sans compromission ni cogestion que nous voulons avancer et lutter pour une
école plus juste car réellement démocratique, ce qui signifie lutter sur
corrélativement sur deux axes : le service public d'éducation et le service
public social. Sur ce deuxième point, nous cherchons actuellement à
dépasser le dilemme bourse ou alloc en liant en un tout cohérent nos
revendications (logement, transport, bouffe, vie universitaire) autour de
la thématique du salaire social et donc de la mutualisation-socialisation
des ressources produites par les salariées, afin de rompre sur le fond avec
un système d'aide et d'allocations qui maintiennent tout le monde (y
compris les chômeursES et les jeunes en formation) dans un statut d'éternel
"mineurE qui vit des alloc". En tout état de cause, il n'est pas question
de choisir entre des projets plus ou moins libéraux et plus ou moins
destructeurs. A ce petit jeu là on sera touTEs perdantEs à chaque coup.
Lutter pour une école plus juste, c'est repenser les liens d'égalité et de
solidarité en son sein comme au sein de la société, bref, c'est aussi
lutter pour une réelle transformation de la société.
Ainsi, ce n'est qu'en étant constamment sur le terrain, celui de
l'information, de la défense intransigeante des intérêts des étudiantEs,
que le syndicalisme pourrait redevenir attractif. Attractif car
démocratique, tant dans son fonctionnement interne que dans son rapport
avec les étudiantEs. Attractif car combatif, cherchant à instaurer un
rapport de force qui soit enfin favorable à touTE les étudiantEs.
Attractif, car transparent, transmettant les informations, à touTEs les
étudiantEs. Attractif enfin, car ouvert sur le monde, échangeant, débattant
et luttant avec les autres acteurTRICEs des mouvements sociaux.
L'Université n'est en effet pas fermée sur elle même, elle est au contraire
traversée par les débats qui divisent la société. Un travail régulier,
continu, de débats et de soutien avec les mouvements sociaux, nous
permettent d'introduire dans notre syndicalisme les problématiques portées
par ceux-ci. Le renouveau des questions féministes, les mobilisations
antifascistes, le soutien aux sans-papiers, les luttes des chômeurs, les
mobilisations contre la mondialisation libérale, la recomposition syndicale
à l'¦uvre dans le monde du travail, sont porteurs d'espoir. Pluriels dans
leur forme, singuliers par leur vivacité : c'est l'esprit de ces mouvements
sociaux (qu'ils soient européens ou internationaux) que nous voulons faire
souffler sur les Universités.
C'est pourquoi nous voulons avancer concrètement dans la mise en place d'un
pôle qui au minimum résiste encore, au mieux serait capable de contrer
durablement le bulldozer libéral en pariant sur les solidarités. Nous
sommes radicaux/les, combatif/ve-s, bagarreur/se-s. De jeunes chienNEs dans
un jeu de quilles.
Sans transgression du jeu bien policé de nos gouvernants et décideurs
mondiaux, il n'y a pas d'autre issue que de "rentrer dans le moule" et donc
de s'auto-limiter dans ses potentialités d'action. La réunification
UNEF-ID/UNEF en est une parfaite illustration. Annoncée comme une réponse à
la crise du milieu syndical (ou du mouvement) étudiant, mais signant dans
les faits la suppression par absorption d'une structure inadéquate pour
mobiliser les étudiantEs sans remise à plat du projet, des enjeux et des
méthodes, s'avère - sans étonnement de notre part - incapable d'ouvrir
réellement de nouvelles pistes pour avancer et contrer le désinvestissement
de ceux/celles-ci.
Parce que la crise du syndicalisme est certes une question de structures
inadéquates, mais surtout inadéquates au regard de l'urgence à mobiliser et
à combattre contre l'avancée du libéralisme jusque dans les universités. Le
syndicalisme proposé par l'UNEF-ID depuis quelques années se veut être,
selon leurs propres mots, un syndicalisme de " co-direction " axé sur une
discussion/négociation permanente avec le ministère - sans rapport de force
- et ainsi, prêt à accepter de profondes remises en cause du service public
d'éducation, pour quelques broutilles médiatiques et de peu d'intérêt pour
les étudiantEs au regard de leur situation. Or les gouvernements, depuis 20
ans n'ont appréhendé l'éducation et l'enseignement supérieur en particulier
que sous un angle précis : ils n'ont eu de cesse d'essayer de limiter le
coût, pour le budget de l'Etat, de cette Université de masse, tout en
cédant petit à petit aux pressions néo-libérales visant à la fois à limiter
le nombre d'étudiantEs, à mettre les Universités en concurrence les unes
avec les autres, à institutionnaliser une Université à plusieurs vitesses,
à mettre certaines formations sous le contrôle plus ou moins total des
chefs d'entreprises, ou à faire en sorte que l'Université inculque à celles
et ceux qu'elle accueille "la culture d'entreprise". Car aujourd'hui,
celles et ceux qui portent un projet pour l'Université, ou au moins pour
une partie de ses filières, ce sont les entreprises relayées par les
différents gouvernements. Du côté de la "communauté universitaire", aucun
projet alternatif ne semble émerger, alors que les enjeux sont plus que
jamais cruciaux. La tâche peut donc paraître immense, mais l'heure est à la
construction d'un projet de transformation de l'Université, qui s'inscrit
dans une volonté de transformation de la société, contre le rouleau
compresseur néo-libéral et le consensus mou de la pensée unique.
D'ores et déjà, les batailles sont engagées dans chaque pays, contre le
mouvement de privatisation qui se traduit notamment par une hausse
drastique des frais d'inscription, et/ou, plus insidieusement comme en
France, par l'introduction récurrente de formations "professionnalisantes"
financées et élaborées essentiellement par les entreprises, au détriment
des formations dites généralistes. Au niveau européen, s'organise une
concurrence entre les différentes universités d'élite, ou pôle
universitaires européens, pour la grande bataille du nouveau marché : celui
de l'éducation. C'est pourquoi, alors que le syndicalisme institutionnel
prétend organiser une "résistance" verbale, "conceptuelle", alors qu'il ne
fait qu'accentuer la démotivation par avalisation des reculs importants
jusque dans l'éducation (cf les dernières déclarations de J. Lang, appuyées
par l'UNEF-ID et l'ESIB, se félicitant d'un "Maastricht de l'éducation"),
il est de toute première importance de lutter pied à pied là nous nous
sommes, dans chaque université et de manière interpro, mais aussi de
participer activement à la construction de tous les réseaux de luttes
transversaux.
Aujourd'hui, le milieu syndical étudiant se recompose en deux pôles, l'un
co-gestionnaire et co-dirigeant, l'autre de lutte, bataillant pieds à pied
pour maintenir et développer un service public de qualité et l'exigence
d'égalité. Or la recomposition du premier s'achève par une absorption, mais
la recomposition de l'autre balbutie, bégaie encore et s'essaye à dépasser
ses frayeurs réciproques. Il faut que nous arrivions à passer ce cap pour
nous retrouver dans une structure qui soit plus forte car moins dispersée,
plus forte parce que capable de tirer le meilleur des expériences et des
histoires spécifiques à chacunE, plus forte parce que décidée à renoncer à
ses frayeurs de minoritaires pour affronter et proposer et gagner, même par
petites touches, une autre cohérence pour l'université.
Aujourd'hui plusieurs structures existent, se côtoient et se retrouvent
systématiquement à chacune des mobilisations étudiantes : ce n'est sans
doute pas un hasard.
Aujourd'hui, si ces structures peuvent exister en plusieurs points du
territoire, seule la fédération des syndicats SUD-étudiant à une réelle
implantation nationale et interprofessionnelle. Il faut arriver à combiner
cela ensemble, pour que chacunE s'y retrouve.
Aujourd'hui, ces structures cherchent à nouveau une solution transitoire
dans une structuration en intersyndicale. Des propositions d'organisation
matérielle pour aborder la rentrée sont mises en avant. Nous pensons que
tout cela est positif et c'est pourquoi nous soutenons ce processus. Pour
autant nous considérons que le contexte doit nous inciter à viser plus
haut. Peut-être faudra-t-il prendre néanmoins du temps, mais au moins
aurons nous posé ensemble des jalons sur ce que nous voulons faire, ou pas,
ensemble.
Aujourd'hui nous pensons que la structuration en intersyndicale est
insuffisante au regard du contexte et des enjeux. Nous pensons que ce dont
nous avons tous besoins c'est d'un cadre d'analyse et d'orientation
syndicale commun, partagé, collectif. Une fois déterminé ce que nous
voulons faire et ce que nous visons en commun, il sera ensuite plus facile
de savoir comment nous organiser matériellement pour la rentrée
universitaire. Prendre la question par le bout de l'organisation de la
rentrée sans nous être mis d'accord, au fond et sur le fond, est certes
louable mais inopérant pour construire une dynamique collective durable.
Enfin, autant ne pas nous voiler les yeux : aujourd'hui la structure
SUD-étudiant est un outil déjà bien construit, qui a prouvé maintes fois
son efficacité et qui est basé sur un fonctionnement démocratique qui
permet justement de participer activement à un cadre collectif tout en
gardant sa spécificité et une grande autonomie locale. Il y a certes, et
fort heureusement, des améliorations à penser, des points de fonctionnement
à discuter entre nous pour que ce cadre devienne un véritable outil
syndical. Mais nous pensons que c'est autour de cette structure que peut se
réaliser un véritable pôle de lutte, démocratique, radical, combatif et
bagarreur. On peut prendre le temps, donner du temps au temps, le tout est
de savoir au bout du compte il faudra décider quelque chose, où et jusqu'où
chacunE est prêt à aller.
Le débat est lancé, au plaisir de vos réactions !
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