(T-U 5, nov-déc 1998, p.1)

ÉDITORIAL
Trop, c'est trop !

Jamais une rentrée n'avait été marquée par tant d'agressions du gouvernement contre les étudiants.
Contre la qualité de nos études: Allègre s'apprête à appliquer le rapport Attali qui préconise l'autonomie des facs, leur livraison pieds et poings liés aux intérêts privés (ainsi les présidents d'Université ne seraient plus des profs mais des représentants du patronat !), la destruction de la cohérence des cursus au profit d'une professionalisation à courte vue, bref, la fin de l'université publique, déjà mise à mal par la réforme Bayrou. Ce n'est pas par hasard que c'est maintenant qu'il oblige Paris IV à appliquer cette réforme (voir p. 2).
Contre nos conditions d'études: pas un poste d'enseignant en plus au budget 1999 ! Les besoins sont criants, mais Allègre ne veut pas le savoir.
Contre leur financement. Tandis que les belles promesses du Plan social étudiant restent lettre morte, Allègre entreprend la destruction du statut de surveillant. On remplace les pions par des emplois-jeunes, qui travaillent plus, sont moins payés, et, surtout, sont ainsi obligés d'arrêter leurs études, alors que le pionicat est un moyen de les continuer.
Contre notre principal débouché. Qui aurait pu croire, en voyant 500 000 lycéens dans la rue pour protester contre les classes surchargées et les vacances de postes, qu'il y avait trop de profs dans ce pays ? Allègre avait fini par promettre 3000 enseignants de plus: il supprime encore des postes au CAPES et à l'Agrégation.

Jamais les étudiants n'avaient été traités avec un tel mépris. Le pouvoir se croit tout permis contre nous parce qu'il est désormais convaincu que nous ne pouvons rien contre lui.
Devant toutes ces attaques, nous entendons les étudiants de Paris IV dire "C'est bien triste, mais nous n'y pouvons rien", sans parler de ceux qui se donnent bonne conscience en accusant les syndicats de ne rien faire.
C'est de ce type de raisonnement qu'il faut sortir. C'est à chacun de vous de prouver à Allègre et Jospin qu'ils ont tort de compter sans vous.
L'UNEF peut vous informer, c'est à cela que sert ce Trait d'Union, elle peut appeler à des AG et à des manifestations, comme elle l'a fait le 5 novembre. Elle ne peut pas manifester à votre place (est-il utile de vous dire que ceux qui prétendent le faire après s'être fait "mandater" par vous vous prennent pour des idiots ?).
Par le passé, la mobilisation des étudiants a mis en échec les projets dirigés contre l'Université (Devaquet en 86, Jospin en 92, Balladur en 94). Leur passivité actuelle est le plus beau cadeau qu'ils puissent faire au pouvoir. Il lui est très facile d'agir sans eux: aucun gouvernement n'a jamais pu agir contre eux quand ils étaient mobilisés

Depuis plusieurs jours, un mouvement étudiant se développe dans de nombreuses facs (Amiens, Montpellier, Toulouse, Limoges, Lille, Rouen, Caen...). Vendredi, une AG de plus de 200 étudiants s'est tenue à Tolbiac.
C'est désormais à chacun de nous de réfléchir aux formes que ce mouvement peut prendre à Paris IV.