Analyse donnée par Emmanuel Lyasse, président de l'UNEF Paris IV, du guide l'AGEPS pour le forum de discssions de l'UNEF

J'ai acquis pour 8 F "Le Guide de l'étudiant de Paris IV 2001-2002" de l'AGEPS.

En le feuilletant d'abord, un grand éclat de rire: c'est pour l'essentiel, mot pour mot, le Guide de l'UNEF de l'an passé, en remplaçant partout UNEF par AGEPS. Ce que l'UNEF avait obtenu (y compris au niveau national) devient ce que l'AGEPS a obtenu. Le plus drôle: l"Aperçu sur l'histoire de l'UNEF" devient, presque sans bouger (j'y reviendrai) "Aperçu sur l'histoire de l'AGEPS". C'est beau le changement, et est encore plus belle l'honnêteté intellectuelle de ceux qui le prônent. Rédacteur d'une bonne partie des articles, je tiens à faire savoir que je les avais écrits pour l'UNEF, pas pour une corpo boxeuse. J'ajoute que plusieurs sont totalement périmés, et auraient eu besoin d'une sérieuse mise à jour.

Même l'en-tête ne change pas: sitôt la couverture passée, l'opuscule redevient"Le Guide de l'étudiant de Paris IV 2000". Pour le pied de page, ils ont réussi à supprimer "UNEF", en supprimant le pied de page paire: l'impair est généralisé. Problème technique, sans doute. Les brillants AGEPSiens ont su récupérer le fichier du guide de l'an passé, mais pas le maîtriser. Le confirme l'illustration: le fichier qu'ils avaient ne contenait pas les dessins. Résultat: un désastre. Des dessins sans rapport avec le texte, sans mise en page.

S'attarder sur de tels détails peut sembler mesquin, mais ces problèmes techniques ont une conséquence qui ne l'est pas: pour faire tenir les textes sur les pages malgré ces quelques soucis, on a coupé des phrases ou supprimé des alineaŠ souvent au hasard, apparemment. Ça ne contribue pas à leur lisibilité. Le plus flagrant: j'avais, il y a trois ans, sur titré le texte sur "La préparation aux concours" "Enseignant, un métier qui se mérite" (une petite provocation). Le titre a disparu: ne reste que le sur titre. En contractant l'encadré de revendications sur les conditions de la préparation à Paris IV, on obtient un non-sens particulièrement amusant quand on sait que Philippe Lieutaud prétend avoir préparé le CAPES cette année.

Certaines omissions semblent moins relever du hasard. Ainsi, sur les concours justement, disparaît toute allusion à la baisse des postes, et aux projets de réformes. Il est vrai que quand j'avais en février publié un texte pour dénoncer les mensonges de Lang concernant le nombre de postes, Philippe me l'avait violemment reproché en m'expliquant qu'il ne fallait pas toujours être contre le gouvernement.

Une surprise: les textes sur la licence pro (celui de l'intersyndicale de Caen) et sur la semestrialisation s'en sortent presque intacts, à quelques coupure et l'ajout de flagorneries pour les profs dans le second près. Malheureusement, ce dernier est totalement périmé. En revanche, le texte général sur les réformes a disparu, sans bien sûr être remplacé. Quant aux ECTS... pas d'analyse. Que voulez-vous ? Il n'y en avait pas l'an passé. Le texte final, sur lequel je reviendrai, parle de "la prochaine réforme qui va toucher l'université française, et dont les points essentiels sont à la fois très mal définis et potentiellement porteurs des germes d'une véritable "révolution" des fondements de notre système éducatif", uniquement pourŠ reprocher à l'UNEFexID de ne pas prendre parti clairement sur ce point (!). Vous avez dit "pitres" ?

Ceci nous amène aux quelques ajouts:

Une perle: Barthélémy Brossel nous avait donné l'an passé un guide pratique des formalités, de rentrée en particulier, très réaliste, donc pas toujours tendre pour le personnel administratif. Manifestement, les priorités de l'AGEPS sont plus de flatter ceux-ci que d'informer les étudiants, mais elle n'a trouvé personne pour le réécrire. Donc on atténue certaines formulations, ce qui donne un résultat assez contradictoire et, surtout, on met un gros sous-titre "Nos amis de l'administration". Chapeau !

Evidemment, le Manifeste de l'AGEPS, déjà publié (par mes soins) sur ce forum. Evidemment, il est contradictoire avec ce qui a été recopié de l'an passé sur de nombreux points, et d'abord sur les réformes, où il est redoutablement clair: "L¹A.G.E.P.S se donne comme tâche de répondre à toutes les questions posées par l¹application des réformes universitaires , notamment celles qui concernent le contrôle des connaissances, le calendrier universitaire, le maintien d¹une session de rattrapage en septembre, une plus grande homogénéisation des U.F.R, etc".

Le chapitre de présentation change peu, mais significativement. Son titre, qui était "Faire vivre un syndicat combatif, pour une Université publique de qualité ouverte à tous" devient "L'AGEPS, un syndicat ouvert à tous". Sans commentaires. La phrase sur le traitement des dossiers individuels "[quand nous n'avons pas la loi pour nous] tout faire pour obtenir une dérogation" devient "nous essayons d'obtenir une dérogation pour que personne ne soit lésé". Syndicat arbitre ? Le passage sur "notre appartenance à une organisation nationale" devient "Nous somme partie prenante d'un réseau syndical présent sur une quinzaine de villes universitaires". On aimerait bien avoir leur liste.

Comme déjà signalé, l'historique est particulièrement gratiné. Il reprend le texte, plus que périmé, que j'avais écrit, en rajoutant juste quelques âneries sur l'UNEF de la Libération et de la charte de Grenoble (j'étais juste, donc sévère), mais en recopiant telle quelle la fin sur le renouveau de 1971 "Minée par les divisions, l¹UNEF s¹essouffle. En mai 68, contrairement à sa légende, ce n¹est plus qu¹une coquille vide. Finalement, certains de ses militants décident de la transformer en " organisation politique de masse ".
C¹est du refus de ce choix suicidaire qu¹est venu le renouveau de l¹UNEF. Des étudiants venus d¹horizons différents (communistes, socialistes, chrétiens de gauche, principalement) décident de rénover une UNEF fidèle à la ligne syndicale: c¹est chose faite, en deux étapes, en 1971 et 1975. Depuis cette date, l¹UNEF est restée fidèle à ce qu¹il y a eu de meilleur dans celles des années soixante: le travail pour la construction d¹un véritable syndicalisme étudiant.", puis enchaîne, en totale contradiction "Cependant, à partir de 1995, sclérosée, la direction (proche du P.C.F) de I'U.N.E.F est incapable de renouveler son orientation et de s'adapter aux évolutions universitaires. C'est pour cela que les militants de I'U.N.E.F Paris-IV décident en avril 2001 de s'engager dans la rénovation du syndicalisme étudiant et rompent avec la direction de I'U.N.E.F en fondant I'A.G.E.P.S, première étape de la construction d'une nouvelle organisation étudiante réellement indépendante et démocratique. Nous avons l'ambition de rompre avec "la pensée unique syndicale", et souhaitons faire des propositions sur l'ensemble des réformes qui touchent l'enseignement supérieur, que cela soit sur l'aide sociale ou sur l'harmonisation des cursus européens".

C'est la page des grands aveux. On renie allègrement le passé de l'UNEF Paris IV, sombre dans le couplet anticommuniste digne de l'UNEF-ID et des journalistes aux ordres, et reproche à la direction Vieu puis Delpas d'avoir été "incapable de renouveler son orientation et de s'adapter aux évolutions universitaires". Naguère, nous lui reprochions plutôt l'inverse: d'avoir retourné sa veste à vitesse supersonique sur la question des réformes puis celle de l'aide sociale. La dernière phrase vient confirmer cette impression. L'AGEPS est pour l'harmonisation européenne.

Rompre avec la direction de l'UNEF ? L'UNEF Paris IV l'avait fait dès juin 2000. Ce n'était pas son immobilisme que nous dénoncions alors. C'est avec l'UNEF et le syndicalisme étudiant qu'ils ont rompu en avril 2001. On ne fait que souligner le trait en reprenant le flambeau de l'indépendance et de la démocratie que d'autres viennent de jeter aux orties. C'est bien une UNEF-ID miniature qu'on prétend construire.

Cette question de l'indépendance est présente d'ailleurs d'une façon obsessionnelle qui évoque les meilleurs jours de FO. En dernière page "Nous pensons qu'il est possible de faire un syndicalisme indépendant des partis politiques de gauche". En page 4 de couverture, un tableau synthétique ridicule donne à l'entrée "Signe distinctif" "Indépendant de tout parti politique" et à "Sponsors politiques", "Néant". Quand on sait par quels arguments Philippe Lieutaud a convaincus certains élus hésitants de signer la lettre au président sur l'abandon du nom UNEF, c'est à pleurer de rire. Au passage, dans ce tableau, "nationalité: Citoyens du monde", "fonction: Emmerdeur constructif". Sans commentaires.

Au même endroit, et ailleurs, l'AGEPS se réclame de 45 élus. On aimerait avoir leur liste, sachant que beaucoup de nos élus d'UFR de l'an passé sont disparus, que certains se sont prononcés pour l'UNEF et d'autres n'ont pas encore choisi. J'aimerais surtout bien savoir quel est l'élu AGEPS au Conseil Scientifique qui est cité. Si aucun de mes trois collègues de l'U-ID et de l'UNI ne s'est rallié, il s'agit là d'un faux manifeste qui ne restera pas sans suite. Du même tonneau, le texte sur la filière Histoire signé Mariam Bagayoko et Emmanuel Lyasse des deux années précédentes a été supprimé et remplacé par un texte signé Dan GutmanŠ EXACTEMENT IDENTIQUE. Faut-il en conclure que les grands esprits se rencontrent, ou que c'est au contraire la marque d'un tout petit esprit ?

Enfin, ça se termine par un texte, déjà cité, appelé "Et maintenant", ridiculement pathétique, expliquant au lecteur que l'UNEF réunifiée veut détruire l'AGEPS et qu'il faut absolument la sauver, avec une argumentation de genre "Ils sont gros et méchants, nous sommes petits et gentils, empêchez les de nous étouffer". Rien de plus.

Finalement, il n'y a pas de quoi rire. Pour l'essentiel, un plagiat mal maîtrisé. Pour le reste, l'aveu manifeste de ce que nous sommes quelques-uns à dénoncer depuis plusieurs mois.