Une nouvelle refondation du mouvement syndical Žtudiant ˆ Lyon (1968-1975)

Sommaire

ORGANISATION, STRUCTURE ET GESTION QUOTIDIENNE DE l’A.G.E.L-U.N.E.F.

I . L’implantation de l’A.G.E.L-U.N.E.F : 1971-1994.

II. Une prŽsence au quotidien.

UNE POLITIQUE CONSTANTE VISANT A PLACER L’A.G.E.L-U.N.E.F. AU CŒUR DE LA VIE ETUDIANTE

Chapitre 1. La reconstruction d’une Žconomie sociale Žtudiante.

I. Une t‰che secondaire ˆ l’activitŽ revendicative. 1971-1979.

II. La crŽation du CERCOOPE, vŽritable centrale de services.

RŽsumŽ

Chapitre 2. Un syndicat peu ouvert au tissu syndical, politique et associatif.

I. Les relations U.N.E.F. / C.G.T. / S.N.E.Sup..

II. Un syndicat de gauche sans affiliation partisane.

III. La dŽnonciation des autres associations et syndicats Žtudiants comme rŽponse ˆ l’Žclatement de la reprŽsentation Žtudiante.

RŽsumŽ

CONCLUSION

 

 

 


ORGANISATION, STRUCTURE ET GESTION QUOTIDIENNE DE l’A.G.E.L-U.N.E.F.

Rassemblant les Žtudiants, l’A.G.E.L-U.N.E.F. est Žvidemment trs sensible aux mutations du monde Žtudiant et universitaire, ˆ ses crises souvent violentes et ŽphŽmres. L’implantation, l’organisation interne, la structure et la gestion quotidienne du syndicat lyonnais Žvoluent en consŽquence et s’adaptent en permanence.

L’implantation de l’A.G.E.L-U.N.E.F. est la premire concernŽe par les changements ˆ court ou long terme du milieu Žtudiant. CaractŽrisŽe par un taux de syndicalisation ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. faible, mme dans les pŽriodes de relative puissance, elle ne permet pas au syndicat lyonnais de s’estimer reprŽsentative du monde Žtudiant. Soumise ˆ diffŽrentes variables, elle Žvolue de manire chaotique de 1971 ˆ 1994.

Organisation trs structurŽe, l’A.G.E.L-U.N.E.F. se dŽveloppe sur un modle confŽdŽral : groupement d’associations Žtablies sur une base gŽographique ou disciplinaire, elle dispose de deux instances confŽdŽrales, c’est ˆ dire le bureau et le collectif d’A.G.E. Cependant, il convient de se pencher avec attention sur les associations de filire. En effet, elles prennent des formes successives dŽfinies lors des congrs nationaux et indiquent ainsi des changements d’orientation… .

L’activitŽ syndicale de l’A.G.E.L-U.N.E.F. ne se rŽsume pas seulement ˆ son implication dans les divers mouvements Žtudiants qui jalonnent toute cette pŽriode. En effet, une activitŽ quotidienne d’entretien des structures se maintient tout au long de l’annŽe et permet au syndicat d’avoir une prŽsence au quotidien sur les divers campus. Le r™le des responsables de l’A.G.E., c’est ˆ dire du prŽsident, du trŽsorier, et du secrŽtaire ˆ l’organisation, est alors essentiel, vital.

Enfin, l’A.G.E.L-U.N.E.F. fait preuve d’une gestion financire prŽcaire, alŽatoire. La gestion financire appara”t rarement dans les Žtudes, qui prŽfrent souvent aborder les structures ou les politiques des syndicats. Pourtant, elle peut tre rŽvŽlatrice d’un Žtat d’esprit ou de politiques financires adaptŽes et volontaires.

 

 


I . L’implantation de l’A.G.E.L-U.N.E.F : 1971-1994.

  1. Un faible taux de syndicalisation.
  2. L’A.G.E.L-U.N.E.F se dŽfinit, dŽs le renouveau, comme un syndicat de masse, c’est ˆ dire ayant vocation ˆ rassembler en son sein la majeure partie des Žtudiants. Pourtant, en dŽpit parfois d’une certaine force numŽrique, elle ne syndique, durant cette pŽriode, qu’une trs faible minoritŽ des Žtudiants de Lyon.

    Retracer l’Žvolution du nombre d’adhŽrents de l’A.G.E.L-U.N.E.F avec certitude se heurte ˆ des difficultŽs nombreuses : sources incompltes (en particulier pour toutes les annŽes 80), fichiers d’adhŽrents rares (quelques exemplaires complets et surtout incomplets : 1971-1972, 1973-1974, 1989-1990, 1991-1994… .), trs nette diffŽrence entre le nombre d’adhŽrents revendiquŽ, en particulier auprs des mŽdias, et la rŽalitŽ, distinction entre le nombre d’adhŽrents et le nombre de cotisants.

    En dŽpit de ces limites, on peut distinguer diffŽrentes pŽriodes :

    Evolution des effectifs de l’A.G.E.L-U.N.E.F

    1971-1972

    454

    1973

    env 350

    1974

    env 650

    1975-1976

    dŽclin

    1976-1977

    700 ˆ 800

    1979-1980

    env 250

    1980-1981

    550

    1983-1984

    env 1500

    1987-1988

    80 ˆ 90

    1990-1991

    250

    1991-1992

    185

    1992-1993

    168

    1993-1994

    275

    Source : Archives de l’A.G.E.L-U.N.E.F.

    (r) 1971 – 1974 : L’A.G.E.L-U.N.E.F conna”t un accroissement du nombre de ses adhŽrents, puisqu’il passe de 300 environ en 1971 ˆ prŽs de 650 en 1974. Les multiples mouvements Žtudiants qui Žmaillent cette pŽriode (DEUG, CFPM, rŽforme Fontanet…) contribuent probablement ˆ cette progression. De plus, la concurrence exercŽe par les autres organisations syndicales Žtudiantes reste faible. Ainsi, l’U.G.E.L-U.N.E.F. s’enferme dans son refus des Žlections universitaires et ne s’implante rŽellement que sur Lyon I.

    (r) 1974 – 1976 : Un lŽger dŽclin se manifeste, mme si l’Žtat des sources ne permet pas d’en apprŽcier les proportions. Il semble surtout la consŽquence de l’absence de mouvements revendicatifs d’ampleur durant cette pŽriode. L’adhŽsion, fortement basŽe sur le caractre revendicatif et peu sur les services, n’appara”t plus, en l’absence de rŽalisations concrtes, comme une nŽcessitŽ pour les Žtudiants.

    (r) 1976 – 1977 : Le mouvement de grve contre la rŽforme du second cycle, durant lequel l’A.G.E.L-U.N.E.F a pris une part prŽpondŽrante, engendre une nouvelle progression des effectifs. L’A.G.E.L-U.N.E.F, qui compte moins de 600 adhŽrents avant le conflit, atteint 700 ˆ 800 adhŽrents ˆ la fin de l’annŽe universitaire 1976-1977.

    (r) 1977 – 1979 : Une trs forte baisse du nombre d’adhŽrents se produit entre ces deux dates. De 700 ˆ 800 adhŽrents, les effectifs chutent et atteignent environ 250 adhŽrents en 1978-1979. Elle est imputable ˆ l’absence de mouvements revendicatifs importants, ˆ l’Žloignement, ˆ la distanciation progressive des Žtudiants vis ˆ vis des organisations syndicales et politiques, mais aussi ˆ des difficultŽs de fonctionnement internes. Un collectif d’A.G.E. est convoquŽ en dŽcembre 1978–janvier 1979, afin de rŽsoudre un certain nombre de problmes : "absence de rŽelle direction dans ton comitŽ, dans l’A.G.E.", forces insuffisantes, difficultŽs financires. De plus, des tensions internes naissent et engendrent des crises, comme la dŽmission d’adhŽrents. Ainsi, en fŽvrier 1979, B.Blochet, dans sa lettre de dŽmission, critique violemment l’organisation, l’activitŽ et les responsables de l’A.G.E.L-U.N.E.F : " constitution bureaucratique du syndicat ", " Žlitisme ", " statisme des dirigeants ", " recherche dans toute action d’une rentabilitŽ ", " concurrence entre organisations syndicales identique ˆ celle des entreprises du grand capital ", " attitude abjecte ", manque de dŽmocratie interne en particulier lors de la dŽsignation de la tte de liste au C.R.O.U.S…. Par contre, l’impact de la rupture du programme commun de la gauche en mars 1978 semble faible, mme s’il s’avre impossible d’Žvaluer la portŽe rŽelle de cet ŽvŽnement sur l’A.G.E.L-U.N.E.F. Hormis sans doute le dŽception de nombreux militants… .

    (r) 1979 – 1985 : Une nouvelle pŽriode s’ouvre pour l’A.G.E.L-U.N.E.F ˆ partir de la rentrŽe 1979-1980. En effet, l’A.G.E.L-U.N.E.F conna”t en moins de cinq ans une croissance considŽrable de ses effectifs : de 250 ˆ 1500 adhŽrents environ. Cette progression est entamŽe dŽs la rentrŽe 1979-1980, puisque l’A.G.E.L-U.N.E.F dŽclare, lors d’un collectif national en mars 1980, 550 adhŽrents, soit une multiplication par 2,5. En l’absence de mouvements Žtudiants importants ou soutenus par l’A.G.E.L-U.N.E.F, les moteurs d’une telle croissance sont ˆ chercher ailleurs. L’attrait des services fournis par le syndicat est sans doute le principal ressort. En effet, de trs nombreux Žtudiants adhŽrent ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F sur la base des services, peut-tre pour bŽnŽficier de tarifs privilŽgiŽs. Le lien entre progression des effectifs et services est d’ailleurs explicitement mis en lumire au collectif national du 10 novembre 1979. Une corrŽlation est Žtablie entre la crŽation de nouveaux comitŽs et le fort dŽveloppement des services en mŽdecine, pionnire dans ce domaine. L’A.G.E.L-U.N.E.F appara”t sous un nouveau jour, car les Žtudiants frŽquentent davantage les locaux et les adhŽrents. Toutefois, la nature de ces adhŽsions implique des limites et, en particulier, une trs faible implication des adhŽrents dans l’organisation et le fonctionnement du syndicat. De plus, le nombre d’adhŽrents stagne en mai 1981, en dŽpit d’un contexte politique trs favorable, et des Žtudiants viennent au syndicat pour bŽnŽficier des services, mais sans aucune dŽmarche syndicale.

    (r) 1984 – 1987 : L’Žvolution des effectifs de l’A.G.E.L-U.N.E.F, ˆ partir de la rentrŽe 1985-1986, demeure trs incertaine. Une seule certitude : l’A.G.E.L-U.N.E.F compte de 70 ˆ 80 adhŽrents en 1987-1988. Le nombre d’adhŽrents se stabilise seulement en 1987-1988, sous la prŽsidence de Malika Blanc, seule rescapŽe du bureau d’A.G.E. 1986-1987 !. Dans le mme temps, le syndicat U.N.E.F –ID, encore faible et fragile au dŽbut des annŽes 80, bŽnŽficie ˆ plein de son positionnement lors du mouvement Žtudiant de novembre-dŽcembre 1986. L’Žvolution ne date cependant pas de la fin de l’annŽe 1986. DŽjˆ, aux Žlections aux conseils centraux de janvier 1986 ˆ Lyon II, l’U.N.E.F-ID obtient 10 siges et fait jeu Žgal avec l’A.G.E.L-U.N.E.F. Le retard de l’A.G.E.L-U.N.E.F. ˆ s’investir pleinement dans le mouvement de 1986 a sans doute amplifiŽ le dŽclin, mais il ne suffit pas ˆ l’expliquer. Les sources Žcrites, inexistantes pour les annŽes 1985-1987, ne permettent pas de comprendre cette " cassure " dans l’Žvolution de l’A.G.E.L-U.N.E.F..

    (r) 1987 – 1994 : A une premire phase de stabilisation (1987-1988), succde une reprise du nombre des adhŽrents, puisque les effectifs grimpent de 70 ˆ environ 250 adhŽrents en 1994. L’A.G.E.L-U.N.E.F. se renforce surtout gr‰ce aux diffŽrents mouvements revendicatifs auxquels elle participe pleinement et ˆ un intense travail de terrain : mise en place de cahiers de revendication dans les citŽs universitaires, porte ˆ porte, tenue des cha”nes d’inscription, pŽtition en faveur du demi-tarif sur les TCL… . Le travail de terrain se concrŽtise par des adhŽsions : 29 en 1991-1992 (porte ˆ porte…), 23 en 1992-1993, 22 en 1993-1994. Les mouvements revendicatifs, et en particulier le mouvement contre la rŽforme Jospin en 1992, mettent l’A.G.E.L-U.N.E.F. sur le devant de la scne et incitent des groupuscules d’extrme-gauche ˆ investir des militants. De nombreux militants de la L.C.R. et de Socialisme International adhŽrent alors ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. et forment une minoritŽ. Cependant, en dŽpit d’une nouvelle croissance, la situation de l’A.G.E.L-U.N.E.F. demeure prŽcaire.

    Les effectifs de l’A.G.E.L-U.N.E.F. fluctuent fortement en quelques annŽes. La pŽriode 1984-1987 est une excellente illustration de ce phŽnomne. Les variations sont amplifiŽes par la nature du monde Žtudiant : brivetŽ des Žtudes et instabilitŽ de la condition Žtudiante, c’est ˆ dire la nŽcessitŽ pour de nombreux Žtudiants de se salarier pour continuer leurs Žtudes… . Le syndicalisme Žtudiant Žvolue en osmose avec le monde Žtudiant. Par consŽquent, il est soumis ˆ un renouvellement rapide de ses adhŽrents. La durŽe d’adhŽsion ˆ un syndicat Žtudiant est courte : de 2 ˆ 4 ou 5 ans maximum, sauf les cas particuliers des Žtudiants en mŽdecine. Ainsi, le collectif d’A.G.E. des 22 et 23 mars 1980 comprend 13 Žtudiants en D.E.U.G., soit 50 % du total. En 1988, le bureau d’A.G.E. compte cinq Žtudiants adhŽrents ˆ l’U.N.E.F. depuis un an sur neuf. Par consŽquent, le syndicalisme Žtudiant est soumis ˆ la nŽcessitŽ de renouveler rapidement ses effectifs et ses responsables. L’instabilitŽ fragilise les organisations et peut parfois remettre en question leur survie. Ainsi, le cas extrme de 1987 o, ˆ l’exception de Malika Blanc, le bureau d’A.G.E. est entirement renouvelŽ. Stabiliser les effectifs nŽcessite des efforts constants, sinon le dŽclin est rapide. La croissance numŽrique repose sur deux ŽlŽments : une remise de carte importante et un effort pour recruter de nouveaux adhŽrents. Ainsi, l’association de filire Histoire-GŽographie de Lyon II passe de 17 adhŽrents en 1992-1993 ˆ 23 adhŽrents en 1993-1994. Elle conjugue ˆ la fois une remise de carte correcte (11 adhŽrents sur 17 de 1992-1993 reprennent leur carte) et un effort pour recruter : 12 nouveaux adhŽrents en 1993-1994. A l’inverse, un dŽclin se fonde surtout sur l’absence de recrutement. C’est le cas de l’association de filire Histoire- GŽographie de Lyon III, qui passe de 12 adhŽrents en 1992-1993 ˆ 10 en 1993-1994.

    AdhŽrents de l'association de filire Histoire-GŽographie de Lyon II

    AnnŽe universitaire

    Total

    Nouveaux

    Cartes remises

       

    adhŽrents

     

    1991-1992

    20

    11

    9

    1992-1993

    17

    6

    11

    1993-1994

    23

    12

    11

    Source : Fichier des adhŽrents de L' A.G.E.L.-U.N.E.F. 1991-1994.
           
           

    AdhŽrents de l'association de filire Histoire-GŽographie de Lyon III

           

    AnnŽe universitaire

    Total

    Nouveaux

    Cartes remises

       

    AdhŽrents

     

    1991-1992

    10

    6

    4

    1992-1993

    12

    4

    8

    1993-1994

    10

    1

    9

    Source : Fichier des adhŽrents de l' A.G.E.L.-U.N.E.F. 1991-1994.

    Or, la remise de carte s’effectue trs bien, puisque le taux de remise de carte est de 80 % d’une annŽe sur l’autre . Par contre, le nombre de nouvelles adhŽsions ne cesse de diminuer et ne peut combler les dŽparts : 6 en 1991-1992, 4 en 1992-1993, 1 en 1993-1994.

    L’U.N.E.F. ˆ Lyon conna”t donc une Žvolution numŽrique chaotique, souvent soumise aux mouvements revendicatifs. En effet, les conflits permettent aux diffŽrents syndicats de se mettre en valeur auprs des Žtudiants et d'intŽgrer les acteurs Žtudiants encore non-syndiquŽs. Cependant, en dŽpit de sa puissance ˆ certaines pŽriodes (en particulier au dŽbut des annŽes 80), l’A.G.E.L-U.N.E.F. ne rassemble qu’une trs faible fraction des Žtudiants lyonnais.

    Taux de syndicalisation des Žtudiants ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. (en %)

    1976-1977

    1,3

    1979-1980

    0,55

    1980-1981

    0,83

    1983-1984

    env 2,0

    1987-1988

    0,11

    1988-1989

    0,21

    1990-1991

    0,21

    1991-1992

    0,13

    1993-1994

    0,25

    Source : Archives de l' A.G.E.L.-U.N.E.F.  
       

    En effet, le taux de syndicalisation des Žtudiants ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. reste trs faible. Les taux, systŽmatiquement infŽrieurs ˆ 2 %, se rŽvlent extrmement faibles. De toute Žvidence, l’Žpoque o l’U.N.E.F. regroupait un Žtudiant sur deux appara”t dŽfinitivement rŽvolue. L’A.G.E.L-U.N.E.F. n’a donc jamais rŽussie ˆ s’implanter vŽritablement et ˆ devenir reprŽsentative du monde Žtudiant.

    Cette Žvolution s’inscrit dans le cadre plus large d’une dŽsyndicalisation du monde Žtudiant (rejet du politique, nouvelles formes d’organisation…), mais aussi de la crise du syndicalisme en gŽnŽral dans la sociŽtŽ franaise.

    De plus, une distinction est ˆ faire, et cela est valable pour toutes les organisations syndicales, entre adhŽrents et militants. Elle ne s’est imposŽe que progressivement, puisque, au dŽbut du sicle, elle n’existe pas : le droit ˆ l’indiffŽrence est refusŽ, l’implication du syndiquŽ dans l’organisation doit tre sans faille. G.Sorel, sociologue ayant profondŽment influencŽ le syndicalisme rŽvolutionnaire, dŽclarait : " on s’affaiblit en absorbant des ŽlŽments faibles ". En 1931, pour Blavet, responsable de la FŽdŽration de l’Enseignement C.G.T.U. du Rhone, " il vaut mieux tre moins nombreux mais unis et dŽcidŽs, que d’avoir ˆ tra”ner une masse qui vous alourdit, vous encha”ne et vous trahit ". Une confusion rgne donc alors entre adhŽrents et militants.

    Cependant, une hiŽrarchie se met progressivement en place suivant les diffŽrents degrŽs d’implication : non-adhŽrent, Žlecteur sympathisant, cotisant, militant. L’A.G.E.L-U.N.E.F. se compose de cotisants, de non-cotisants (le paiement de la cotisation ne conditionne pas l’appartenance au syndicat) et de militants. Le militant cumule souvent de multiples charges : Žlu Žtudiant, responsable ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F.… . Il arrive frŽquemment que des responsables d’A.G.E. mettent leurs Žtudes en sommeil au profit exclusif du syndicalisme. La taille du noyau militant demeure trs restreinte et ne dŽpasse jamais la centaine. Il conna”t une Žvolution selon les pŽriodes, mais ne fluctue jamais dans des proportions importantes. De 50 ˆ 100 Žtudiants jusqu’au dŽbut des annŽes 80, il diminue fortement pour atteindre une petite vingtaine en 1987. Ensuite, une petite reprise se fait sentir et l’A.G.E.L-U.N.E.F. compte en 1988-1989 une soixantaine de militants. Une augmentation significative du nombre d’adhŽrents n’engendre pas d’effets similaires sur le noyau militant. En 1983-1984, l’A.G.E.L-U.N.E.F. compte 800 adhŽrents de plus par rapport ˆ 1976, mais, dans le mme laps de temps, la taille du noyau militant demeure stable. Ce dŽcalage met en lumire le phŽnomne des adhŽsions utilitaires, c’est ˆ dire fondŽes sur les services.

    L’A.G.E.L-U.N.E.F. ne peut donc pas fonder sa reprŽsentativitŽ sur ses effectifs, puisqu’elle ne rassemble qu’une faible fraction des Žtudiants. De plus, le syndicalisme Žtudiant est confrontŽ ˆ un facteur nettement dŽfavorable : le renouvellement rapide de ses adhŽrents. Sans base stable, l’essentiel de l’activitŽ syndicale est assumŽe par un noyau de militants dŽvouŽs, n’hŽsitant pas ˆ sacrifier une partie de leurs Žtudes. Ces quelques traits de caractre du syndicalisme Žtudiant se retrouvent depuis quelques annŽes dans le syndicalisme ouvrier, lui aussi touchŽ depuis le milieu des annŽes 70 par la dŽsyndicalisation. Le milieu Žtudiant semble donc avoir ŽtŽ touchŽ trs t™t par la dŽsyndicalisation.

  3. Un syndicat ancrŽ aux universitŽs Lyon I et Lyon II.
  4. Sur le plan de l’implantation gŽographique, l’A.G.E.L-U.N.E.F. est un syndicat Žtudiant ancrŽ aux universitŽs Lyon I et Lyon II. Les comptes-rendus des collectifs d’AGE, les fichiers des adhŽrents et les entretiens sont les seules sources disponibles pour dŽterminer l’Žvolution de l’implantation gŽographique de l’A.G.E.L-U.N.E.F..

    Lyon I appara”t, durant les premires annŽes de l’A.G.E.L-U.N.E.F., comme la principale implantation , notamment gr‰ce ˆ l’I.N.S.A., qui fournit les premiers prŽsidents d’A.G.E.. La prŽsence de l’A.G.E.L-U.N.E.F. est ancienne, puisque c’est en partie dans l’amicale des sciences U.N.E.F. que se dŽveloppe l’U.N.E.F- Renouveau ˆ Lyon en dŽcembre 1968. Elle perdure sans problmes notables jusqu’en 1994. Durant cette pŽriode, les effectifs fluctuent fortement, mais demeurent toujours assez consŽquents. Une forte implantation permet ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. de multiplier ses structures de faon viable afin de rester au plus prs des Žtudiants. En 1977, elle possde des comitŽs dans huit filires (D.E.U.G. A1, A2, B1, B2, licence de MathŽmatiques, MŽdecine, EPS, I.N.S.A.), dans 14 en 1979-1980 (MathŽmatiques, Physique-Chimie, EPS, Sciences Naturelles, IUT 1, IUT 2, KinŽsithŽrapie, Odontologie, Lyon–Nord, Pharmacie, Grange-Blanche, Sud-Ouest, Alexis-Carrel, INSA), 5 en 1988-1989 (Filires 1,2,4,5, INSA), et 9 en 1993-1994 (Filires 1,2,3,4,5,15,T1,UFRAPS,IUT). Des associations de filire atteignent des tailles importantes. En 1981, le groupe d’Žtude MŽdecine compte 250 adhŽrents et le groupe d’Žtude Sciences 210. De 1971 ˆ 1994, la prŽsence de l’A.G.E.L-U.N.E.F. ˆ Lyon I demeure forte, mme si l’implantation en mŽdecine est perdue au milieu des annŽes 80. Elle permet ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. de multiplier ses structures et ainsi de renforcer son intervention gr‰ce ˆ une plus grande proximitŽ avec les Žtudiants.

    A l’universitŽ Lyon II, l’A.G.E.L-U.N.E.F. conna”t une implantation assez difficile, mme si elle devient rapidement une place majeure. De 1972 ˆ 1975, l’A.G.E.L-U.N.E.F. n’a que quatre ComitŽs d’Action, variables dans le temps : Lettres, Histoire-GŽographie, Droit et Sciences Economiques en 1972, Lettres, Droit, Sciences Economiques et Bron en 1973, et Pasteur, Bron, Histoire, Psychologie en 1975. Cette implantation restreinte s’explique par la place tenue par le campus de Bron au sein de l’UniversitŽ Lyon II. En effet, l’A.G.E.L-U.N.E.F. doit s’implanter sur un nouveau campus ŽloignŽ et isolŽ des autres sites universitaires. DŽjˆ confrontŽe ˆ l’absence de tradition militante dans ce nouveau campus, elle doit aussi composer avec l’influence des groupes gauchistes, en particulier dans les sciences sociales. Par consŽquent, si des associations de filires existent, l’implantation prend le plus souvent une forme gŽographique. Ainsi, en 1973, le C.A. Bron regroupe l’ensemble des adhŽrents du campus. La fin des annŽes 70 est marquŽe par un trs net renforcement de l’implantation de l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Elle est alors prŽsente dans la plupart des filires. En 1979-1980, huit comitŽs existent : Sciences Economiques, Sciences du Langage, IEP, Sciences de l’Homme et de son Environnement, IPSE, Lettres, Psychologie, Sciences Juridiques. Aprs un dŽclin trs net au milieu des annŽes 80, sa prŽsence se rŽduit au campus de Bron o elle gre une coopŽrative, elle se rŽimplante dans la plupart des filires de 1988 ˆ 1994. En 1993-1994, l’A.G.E.L-U.N.E.F. est prŽsente en Histoire-GŽographie, Psychologie-Sociologie, Sciences du Langage, AES-Droit, Lettres-Langues et Quais. Ce renouveau a ŽtŽ possible gr‰ce ˆ un intense travail de terrain : pŽtitions, sos-examen, sos-inscription, mouvement Žtudiant contre la rŽforme Jospin… . Cependant, un certain dŽsŽquilibre appara”t : forte ˆ Bron o les Žtudiants de premier cycle sont trs rŽceptifs et prŽsents, l’implantation demeure fragile sur les Quais, o sont concentrŽs les deuxime et troisime cycles, peu prŽsents. Les adhŽrents sont alors regroupŽs sur une base gŽographique et non par filires.

    L’A.G.E.L-U.N.E.F. est donc un syndicat Žtudiant particulirement prŽsent sur Lyon I et Lyon II : prŽsence continue dans la durŽe, multiplication des structures gr‰ce ˆ un nombre d’adhŽrents suffisant, vŽritable reprŽsentativitŽ des diffŽrentes filires… . Toutefois, son implantation gŽographique se rŽduit au milieu des annŽes 80 : disparition de mŽdecine, passage de l’association IEP ˆ l’U.N.E.F-ID ˆ la fin des annŽes 80, affaiblissement numŽrique de certaines associations rŽduites ˆ quelques adhŽrents. Cette prŽsence accrue sur quelques campus spŽcifiques peut s’expliquer par un milieu globalement plus favorable. Le milieu politique est plus porteur, puisque, jusqu’ˆ rŽcemment encore, Lyon II possŽdait l’image d’une universitŽ de gauche. De plus, avec l’affaiblissement des groupes gauchistes, l’Union des Etudiants Communistes a sans doute rŽussi ˆ s’implanter davantage, procurant ainsi adhŽrents et militants ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F.. L’attitude de l’administration, trs tolŽrante, est aussi essentielle. En autorisant la prŽsence des syndicats Žtudiants sur les cha”nes d’inscription, en octroyant des locaux…, elle facilite grandement le travail des syndicats Žtudiants. Enfin, la prŽsence de services et de coopŽratives sur ces deux universitŽs a sans doute facilitŽ le contact avec les Žtudiants.

    Dans les autres Žtablissements d’Enseignement SupŽrieur de Lyon, l’implantation devient alŽatoire dans le temps et dans l’espace. Il faut cependant distinguer l’universitŽ Lyon III des autres Žtablissements, c’est ˆ dire les Žcoles : grandes Žcoles, Žcole d’architecture… .

    L’universitŽ Lyon III, issue de la scission de l’universitŽ Lyon II en dŽcembre 1973, devient rapidement un terrain difficile pour l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Contrairement au campus de Bron, vŽritable " terre vierge ", l’A.G.E.L-U.N.E.F. possde une implantation, certes considŽrablement affaiblie mais toujours prŽsente, ˆ Lyon III. En effet, la scission entra”ne dans le giron de Lyon III les facultŽs de droit et de philosophie principalement. Or, les adhŽrents de l’A.G.E.L-U.N.E.F. en droit s’inscrivent pour l’essentiel en sciences juridiques ˆ Lyon II. Quelques adhŽrents demeurent, mais trs peu de militants hormis en facultŽ de philosophie. A partir de 1975, quelques comitŽs d’action existent en droit principalement. L’A.G.E.L-U.N.E.F. stagne par la suite et se heurte ˆ l’U.N.I.. En dŽcembre 1988, sa prŽsence se rŽduit ˆ nouveau ˆ quelques adhŽrents sur le campus de la Doua, o Lyon III loue des locaux. Les premires Žlections aux conseils centraux depuis 1982 offrent ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. l’occasion de se rŽimplanter sur Lyon III. Les rŽsultats, modestes, permettent un nouveau dŽpart. Trois associations de filires existent en 1991-1992, quatre en 1993-1994. Par contre, l’ouverture du campus de la Manufacture ne permet pas un nouvel Žlan, puisqu’il ne compte que huit adhŽrents en 1993-1994. De plus, des associations s’essoufflent et connaissent des difficultŽs ˆ renouveler leurs adhŽrents. Le renouveau de l’A.G.E.L-U.N.E.F. ˆ Lyon III se concrŽtise dans l’Žmergence de nouveaux responsables, d’abord au niveau des associations de filires, puis au niveau de l’A.G.E. . Ainsi, Lyon III fournit deux prŽsidents d’A.G.E. : F. Toulat (1991-1992) et E. Marguinaud (1993-1994). Pourtant, les difficultŽs ne manquent pas ˆ Lyon III : hostilitŽ de l’administration, milieu associatif et politique trs dŽfavorable. DŽs la scission de 1973, l’A.G.E.L-U.N.E.F. se heurte ˆ l’administration trs conservatrice de la nouvelle universitŽ. Le dŽcret Rolland, du nom du prŽsident de l’universitŽ, inaugure une pŽriode d’affrontements en interdisant la tenue de stands dans l’enceinte de l’universitŽ, sauf autorisation du prŽsident sur demande Žcrite une semaine ˆ l’avance. En 1991, contrairement aux attitudes des administrations de Lyon I et Lyon II, le prŽsident de l’universitŽ refuse la prŽsence de l’A.G.E.L-U.N.E.F. sur les cha”nes d’inscription en invoquant des prŽtextes de sŽcuritŽ et de neutralitŽ. Toujours en 1991, face ˆ l’absence de rŽponse de la part de l’administration, le congrs national de l’U.N.E.F., qui devait se tenir initialement ˆ l’universitŽ Lyon III se tient finalement ˆ l’universitŽ Lyon I. Outre l’hostilitŽ de l’administration, l’A.G.E.L-U.N.E.F. se trouve en butte ˆ un milieu associatif et politique difficile. Le milieu Žtudiant de Lyon III, d’une sensibilitŽ politique plus " conservatrice " ou indiffŽrente, est moins rŽceptif aux thses de l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Les adhŽrents sont soumis ˆ l’hostilitŽ des associations Žtudiantes comme la corpo de Lyon III et parfois aux violences d’une minoritŽ activiste d’extrme-droite.

    Dans les autres Žtablissements d’enseignement supŽrieur, les implantations ont un caractre ŽphŽmre marquŽ et ne survivent jamais plus de quelques annŽes. Une chronologie sommaire de ces implantations peut tre Žtablie :

    1972 : Architecture, Sup. de commerce.

    1973 : Classes prŽparatoires (Augustin, Herriot, Le Parc, La MartiniŽre), Ecole Centrale.

    1975 : Ecole Centrale, classes prŽparatoires, Ecole d’Architecture.

    1977 : Classes prŽparatoires.

    1979-1980 : Classes prŽparatoires, Ecole de tourisme Tournon.

    1989-1990 : aucune.

    1991-1992 : Classes prŽparatoires- ENS- IUFM, IUT- BTS- Ecoles.

    1992-1993 : BTS- IUT, IUFM- ENS.

    1993-1994 : BTS-IUT, Classes prŽparatoires, FacultŽ catholique, Ecole d’infirmire, ENSI, Architecture, CitŽ Universitaire Puvis de Chavannes.

    Les implantations sont donc trs ŽphŽmres et possdent pour la plupart des effectifs marginaux. Le C.A. Architecture est composŽ, en 1972, d’une dizaine d’adhŽrents et se rŽduit ˆ quelques personnes en 1978, date ˆ laquelle il dispara”t. L’association de filire " Classes prŽparatoires, ENS, IUFM " rassemble cinq adhŽrents en 1991-1992 et l’association " IUT, BTS, Ecoles " six adhŽrents. La faible implantation de l’A.G.E.L-U.N.E.F. dans ces Žcoles tient avant tout ˆ leur nature. En effet, elles laissent en gŽnŽral peu de temps libre aux Žlves et sont peu intŽgrŽes ˆ la vie Žtudiante et universitaire. Les milieux d’origine, les conditions de vie et d’Žtudes sont trs diffŽrentes de l’UniversitŽ. Par consŽquent, le syndicalisme Žtudiant style A.G.E.L-U.N.E.F. est peu adaptŽ ˆ ce milieu et prend difficilement racine. Les adhŽsions sont rares et souvent mžrement rŽflŽchies. L’A.G.E.L-U.N.E.F. possŽde aussi une part de responsabilitŽ : elle ne fait sans doute pas les efforts nŽcessaires pour s’implanter dans les autres Žtablissements. D’ailleurs, l’attitude de la seule implantation de l’U.G.E. ˆ Lyon, c’est ˆ dire l’I.N.S.A., presque essentiellement tournŽe vers l’A.G.E.L-U.N.E.F., contribue ˆ cette situation.

  5. Une lŽgitimitŽ et une reprŽsentativitŽ tirŽes des urnes.

L’A.G.E.L-U.N.E.F. se veut et se dŽfinit comme un syndicat de masse, c’est ˆ dire un syndicat regroupant tous les Žtudiants, quelle que soit leur appartenance politique, religieuse…, afin de crŽer un rapport de force ˆ l’UniversitŽ. Toutefois, elle demeure un syndicat numŽriquement non-reprŽsentatif du milieu Žtudiant lyonnais, puisqu’elle syndique entre 0,1 et 2,0 % des Žtudiants selon les pŽriodes. Une prise de conscience de cette situation se fait trs rapidement au sein de l’A.G.E.L-U.N.E.F..

Le congrs d’AGE de 1972 aborde cette question et redŽfinit la notion de syndicat de masse. L’U.N.E.F. est un syndicat de masse, non par le nombre de ses adhŽrents, mais par son audience mesurŽe partiellement par les Žlections universitaires. Elle tire donc sa lŽgitimitŽ et sa reprŽsentativitŽ des listes qu’elle prŽsente aux Žlections universitaires. Les Žlections universitaires sont d’autant plus importantes pour l’A.G.E.L-U.N.E.F. qu’elle considre celles-ci comme un rŽfŽrendum sur ses solutions pour l’UniversitŽ : " Nous ne demandons pas aux Žtudiants de voter seulement pour l’A.G.E.L-U.N.E.F., mais de se prononcer aussi sur son programme de revendications ".

L’A.G.E.L-U.N.E.F. tente donc, en gŽnŽral, de prŽsenter partout des listes. Cependant, le nombre trop restreint de ses adhŽrents ne lui permet pas de constituer des listes dans toutes les U.E.R.… . Pour pallier ˆ cette situation, elle propose et prŽsente sur ses listes des Žtudiants non-syndiquŽs. Ainsi, aux Žlections d’U.E.R. de dŽcembre 1974, elle propose aux Žtudiants de se prŽsenter sur ses listes avec pour seule condition l’engagement de faire aboutir la plate-forme revendicative. L’A.G.E.L-U.N.E.F. peut ainsi constituer des listes lˆ o elle ne compte pas suffisamment de forces et s’attirer la lŽgitimitŽ des " non- syndiquŽs ".

Les rŽsultats obtenus par l’A.G.E.L-U.N.E.F. aux diffŽrentes Žlections universitaires permettent de se faire une idŽe de l’audience de ce syndicat. Cependant, cette audience doit tre relativisŽe par la faible participation des Žtudiants, par le boycott des Žlections par l’U.N.E.F- UnitŽ Syndicale, et par la diffŽrence entre le geste de voter pour une liste syndicale et l’adhŽsion aux idŽes et aux actions d’un syndicat Žtudiant. L’audience Žlectorale de l’A.G.E.L-U.N.E.F. varie dans le temps et selon les universitŽs et les filires.

En effet, on peut, dans le temps, distinguer quatre pŽriodes distinctes et possŽdant des caractŽristiques propres.

De 1969 ˆ 1977 environ, l’A.G.E.L-U.N.E.F. fait son apparition dans le jeu Žlectoral et progresse fortement. Ainsi, ˆ Lyon II, elle passe de 9,6 % des siges en 1969, ˆ 29,5 % en 1970, 36,4 % en 1971, 30,3 % en 1973, 38,5 % en 1975 et 33,3 % en 1977. La phase de progression est suivie d’une stabilisation des rŽsultats Žlectoraux. Ce schŽma se retrouve avec un certain dŽcalage dans le temps ˆ l’universitŽ Lyon I. La forte progression en nombre de siges de l’A.G.E.L-U.N.E.F. est essentiellement due ˆ une implantation toujours plus poussŽe sur le terrain. La crŽation de nouvelles associations de filire permet progressivement la crŽation de listes dans l’ensemble des U.E.R.. A Lyon I, le processus est plus lent qu’ˆ Lyon II, mais la corrŽlation entre les deux est Žvidente : l’A.G.E.L-U.N.E.F. prŽsente en 1969 5 listes, en 1972 5 listes dans les 18 U.E.R, en 1973 5 listes, en 1974 9 listes sur 18, en 1975 9 listes sur 18 et en 1976 11 listes sur 18. Cependant, les Žlections dans une U.E.R. ayant lieu par collge (l’Žquivalent le plus souvent d’une annŽe d’Žtude ou d’un cycle), l’A.G.E.L-U.N.E.F. ne dispose pas encore des capacitŽs, des ressources humaines nŽcessaires pour prŽsenter des listes dans tous les collges d’une U.E.R.. L’impact des multiples mouvements Žtudiants qui jalonnent cette pŽriode semble variable, alŽatoire. La progression de l’audience de l’A.G.E.L-U.N.E.F. lors des Žlections d’U.E.R. de Lyon I en dŽcembre 1976 est davantage la consŽquence de la multiplication des listes, que de l’impact du mouvement Žtudiant contre la rŽforme du second cycle en mars-avril 1976. A l’inverse, ˆ Lyon II, le mouvement Žtudiant de 1976 permet ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. de capitaliser le soutien des Žtudiants, puisqu’aux Žlections d’U.E.R. de dŽcembre 1976, elle obtient 55,5 % des siges contre 38,5 % l’annŽe prŽcŽdente. Or, le nombre des ses listes passe seulement de 5 ˆ 7 sur les 10 U.E.R. que compte l’universitŽ. Le mouvement, particulirement fort ˆ Lyon II, a permis ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. de recueillir un capital de sympathie qui, au moment des Žlections d’U.E.R., s’est transformŽ en suffrages favorables.

De 1978 ˆ 1984, les divers rŽsultats des Žlections d’U.E.R. permettent ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. de revendiquer une vŽritable reprŽsentativitŽ des Žtudiants. Elle dŽtient parfois la majoritŽ des siges dans les universitŽs Lyon I et Lyon II. A Lyon II, elle obtient 60,0 % des 25 siges pourvus en dŽcembre 1979 et ˆ Lyon I 55,4 % des 121 siges pourvus en dŽcembre 1982. Elle rŽussit aussi ˆ obtenir de bons rŽsultats ˆ Lyon III, universitŽ pourtant longtemps rŽputŽe pour son conservatisme. Ainsi, elle remporte 25,4 % des siges aux Žlections d’U.E.R. de fŽvrier 1982 et devient ainsi la premire association Žtudiante de Lyon III. En fŽvrier 1984, l’A.G.E.L-U.N.E.F. dispose, sur les seuls campus universitaires de Lyon I et de Lyon II de 93 Žlus dans les conseils d’U.E.R… . Divers facteurs expliquent la prŽpondŽrance de l’A.G.E.L-U.N.E.F. dans le paysage Žtudiant lyonnais. Tout d’abord, la forte progression de ses effectifs ˆ partir de 1979 lui permet de prŽsenter des listes dans la plupart des U.E.R.. A Lyon II, l’A.G.E.L-U.N.E.F. peut prŽsenter 9 listes dans les 10 U.E.R en 1979 et 1982. A Lyon I, elle prŽsente 11 listes en janvier 1984 contre 7 en dŽcembre 1978. Ensuite, la crŽation du CERCOOPE durant l’ŽtŽ 1979 est un atout indŽniable pour l’A.G.E.L-U.N.E.F.. En effet, les Žtudiants vont plus facilement voter pour l’association dont ils frŽquentent le local et profitent des divers services, crŽant ainsi une " sorte de clientŽlisme ". Par contre, l’absence de mouvement Žtudiant d’ampleur ne semble pas pŽnaliser l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Au contraire, le mouvement Žtudiant de 1983 auquel elle s’oppose lui est sans doute dŽfavorable, en particulier ˆ Lyon III. Elle subit, ˆ partir des Žlections d’U.E.R. de janvier 1982, la concurrence de l’U.G.E.L-U.N.E.F-ID. En effet, prenant prŽtexte d’une promesse du ministre de l’Education Nationale d’abroger la loi Faure, l’U.N.E.F-ID rompt avec la politique de boycott inaugurŽe en 1971 et prŽsente des listes pour " l’abrogation de la loi Faure  ". DŽs janvier 1982, l’U.N.E.F-ID devient une rivale sŽrieuse : elle obtient 25 siges ˆ Lyon II, contre 37 ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Jusqu’en 1982, l’A.G.E.L-U.N.E.F. n’a pas de vŽritable concurrence dans les Žlections universitaires de la part des organisations Žtudiantes de gauche. A partir de cette date, elle est confrontŽe ˆ un syndicat Žtudiant de gauche dont l’audience n’est pas nŽgligeable.

De 1986 ˆ 1994, une nouvelle pŽriode dŽbute pour l’A.G.E.L-U.N.E.F.. En effet, ˆ la disparition des ses adhŽrents s’ajoute l’Žrosion lente de son audience auprs des Žtudiants. Les Žlections d’U.E.R. de Lyon II en dŽcembre 1990 marquent le creux de la vague : avec 8 Žlus et 11, 80 % des suffrages exprimŽs, l’A.G.E.L-U.N.E.F. obtient moins d’Žlus que l’U.N.E.F-ID. Le dŽclin est plus long ˆ Lyon I, en partie gr‰ce ˆ une prŽsence accrue sur le terrain. L’annŽe 1992 appara”t comme l’annŽe noire pour le syndicat lyonnais, puisqu’il n’obtient aucun Žlu ˆ Lyon III, 2 ˆ Lyon I et 10 ˆ Lyon II. Toutefois, un lŽger sursaut se fait dŽjˆ sentir ˆ Lyon II et se confirme en 1993, puisque l’A.G.E.L-U.N.E.F. retrouve des Žlus dans les trois universitŽs de Lyon. Cette Žrosion s’explique certes par l’effondrement du nombre des adhŽrents de l’A.G.E.L-U.N.E.F. : elle ne dispose dŽsormais plus des capacitŽs nŽcessaires pour dŽposer dans la plupart des filires des listes. Ainsi, lors des Žlections d’U.F.R. de Lyon II en dŽcembre 1992, elle ne peut prŽsenter des listes que dans trois U.E.R : Lettres, Sciences du Langage et Arts ; Langues ;et Histoire-GŽographie. Pourtant, cette explication ne suffit pas. En dŽcembre 1990, lors des Žlections d’U.F.R. de Lyon II, elle n’obtient que 16,6 % des siges, alors qu’elle prŽsentait des listes dans 8 U.F.R sur 10. DŽsormais, l’A.G.E.L-U.N.E.F. se heurte, non seulement ˆ l’U.N.E.F-ID, mais aussi ˆ des associations Žtudiantes corporatives solidement implantŽes dans les U.F.R. et souhaitant jouer pleinement leur r™le dans les conseils. Elles sont nombreuses, bien structurŽes et trs dynamiques : SOCIOFIL, Petits DAL’osent, ELYPSY ˆ Lyon II, l’AEBL, Turbulences… ˆ Lyon I. A cela s’ajoute naturellement de multiples facteurs trs difficiles ˆ cerner : rejet du politique, place prŽpondŽrante de l’U.N.E.F-ID dans la lutte contre le projet Devaquet, dŽclin du CERCOOPE… .

Les rŽsultats des Žlections universitaires offrent ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. une vŽritable reprŽsentativitŽ, qu’elle n’est pas capable d’obtenir par le nombre de ses adhŽrents. Son audience est vŽritablement forte entre 1979 et 1984, puisqu’elle obtient rŽgulirement plus de 30 % des siŽges aux Žlections universitaires. Cependant, les Žlections confirment en gŽnŽral l’implantation du syndicat et ne lui permettent pas d’Žlargir vŽritablement son audience lˆ o elle Žprouve des difficultŽs. Les urnes permettent donc ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. de se prŽvaloir d’une certaine lŽgitimitŽ et reprŽsentativitŽ du monde Žtudiant.

 


II. Une prŽsence au quotidien.

1. Informer les Žtudiants..

Le syndicalisme Žtudiant se traduit concrtement par une activitŽ, une prŽsence au quotidien, et ce contrairement au syndicalisme ouvrier. Cette prŽsence au quotidien a pour trame de multiples t‰ches informelles.

La prŽsence au quotidien de l’A.G.E.L-U.N.E.F. consiste tout d’abord dans l’information des Žtudiants. VŽritable organe d’information pour les Žtudiants, l’A.G.E.L-U.N.E.F. dispose pour cela de diffŽrents moyens.

L’information Žcrite tient une place essentielle. En effet, l’A.G.E.L-U.N.E.F. publie tout au long de l’annŽe universitaire une abondante littŽrature ˆ destination des Žtudiants. Les tracts occupent une place privilŽgiŽe au sein de cette production. PubliŽs en toutes occasions, ils sont peu cožteux (surtout avec le dŽveloppement des services) et diffusables en grande quantitŽ. Ils abordent des thmes trs divers : organisation de boums, rŽformes universitaires, situation universitaire, informations pratiques… . Ainsi, pour les cha”nes d’inscription de 1991, trois tracts destinŽs aux trois universitŽs sont publiŽs et abordent les problmes financiers et matŽriels des universitŽs, la prŽsence de l’A.G.E.L-U.N.E.F. au sein des conseils universitaires, le problme des inscriptions et le dispositif SOS- Inscriptions. Ils juxtaposent ˆ la fois une analyse de la situation universitaire locale et nationale. C’est en particulier le cas lors des mouvements Žtudiants de forte amplitude.

Hormis les tracts, l’A.G.E.L-U.N.E.F. Ždite chaque annŽe un guide destinŽ aux Žtudiants. Il para”t dŽs 1972-1973 gr‰ce ˆ un ancien adhŽrent de l’A.G.E.L-U.N.E.F. travaillant dans une entreprise spŽcialisŽe dans la publicitŽ. L’A.G.E.L-U.N.E.F. s’inscrit ainsi dans la continuitŽ de l’A.G.E.L., qui Žditait en commun avec la M.N.E.F. un guide. (Guide paraissant toujours en 1972-1973). DistribuŽ gratuitement ˆ 15 000 exemplaires, il est entirement couvert par les recettes tirŽes de la publicitŽ. Il est publiŽ rŽgulirement jusqu’ˆ la fin des annŽes 70, la formule du guide gratuit Žtant alors abandonnŽe au profit d’un guide- agenda payant. Au dŽbut des annŽes 90, un guide, d’un volume plus rŽduit, est ˆ nouveau ŽditŽ ˆ 40 000 exemplaires. Globalement, le contenu du guide Žvolue peu, en dŽpit d’une rŽactualisation des informations. Il contient diverses informations pratiques pour l’Žtudiant (adresses des universitŽs et Žcoles, Žtudes, plan de Lyon et adresses pratiques, les œuvres universitaires, les bourses, les transports, le service militaire, les loisirs) et des renseignements et informations strictement syndicales. Le guide est un support intŽressant pour l’A.G.E.L-U.N.E.F. : permettant de mler informations pratiques et syndicales, il possde une durŽe de vie plus longue, puisque les Žtudiants sont susceptibles de le conserver toute l’annŽe.

Enfin, l’A.G.E.L-U.N.E.F. publie une littŽrature assez abondante en direction des Žtudiants. De multiples bulletins d’information sont ŽditŽs par les associations de filire. Une vingtaine de revues environ est rŽpertoriŽe pour une pŽriode couvrant de 1970-1971 ˆ 1986. Cependant, elles sont trs irrŽgulires dans le temps. Une concentration appara”t sur une brve pŽriode : 15 revues sur 19 paraissent dans les annŽes 70, dont 9 entre 1975 et 1980. Sans doute faut- il alors inscrire ce foisonnement de publications sur une si brve pŽriode dans un cadre plus large que le monde universitaire ?. En tout cas ce phŽnomne dŽcro”t rapidement d’intensitŽ, puisque seuls trois bulletins voient le jour entre 1980 et 1985, un en 1986, et aucun par la suite. Les bulletins sont marquŽs par une pŽriodicitŽ brve et alŽatoire. Il n’existe pas de dates de sortie rŽgulires et les revues ne perdurent en gŽnŽral que quelques numŽros. Hormis l’Insalien (1973-1977), la SantŽ en bataille (1974-1975) et l’Eveil (1978-1980), les divers autres bulletins ne soufflent pas leur premire bougie… . Ainsi, UNEF- SantŽ mensuel, bulletin du comitŽ U.N.E.F- MŽdecine fondŽ ˆ l’occasion des Žlections universitaires ne para”t qu’une seule fois, en dŽpit d’une parution rŽgulire envisagŽe. Le renouvellement rapide des adhŽrents, les pŽriodes d’intense activitŽ syndicale rendent la parution difficile et trs alŽatoire. Hormis cette irrŽgularitŽ dans le temps, une seconde constatation s’impose : les publications sont presque essentiellement l’œuvre des associations de filire de Lyon I et de l’Žcole d’architecture. En effet, sur 19 bulletins, cinq ont ŽtŽ publiŽs par les Sciences, un par l’I.N.S.A., trois par l’Architecture, deux par MŽdecine, deux par MŽdecine Sud- Ouest, un par les classes prŽparatoires, un par le Droit et quatre par l’A.G.E.. Aucune revue prŽsente dans les archives n’a ŽtŽ publiŽe par des associations de filire de Lyon II. Le cas de l’Žcole d’Architecture est un peu particulier. En effet, un bulletin d’information est rapidement crŽe lorsque le C.A. U.N.E.F- Architecture prend position en faveur du renouveau en 1970. A ce prŽalable s’ajoute un esprit de corps particulier aux Žcoles, mais aussi un Žloignement vis ˆ vis des principaux centres universitaires, puisque l’Žcole se situe ˆ Vaux en Velin. Ce contexte favorise la crŽation et l’existence d’un bulletin d’information. En mŽdecine, la concurrence avec des corpos solidement implantŽes peut expliquer l’existence de publications. Outre ces raisons particulires, la crŽation d’un bulletin par des adhŽrents dŽnote avant tout de l’envie d’informer, de dŽbattre et d’expliquer. Ainsi, le comitŽ de rŽdaction du journal des comitŽs U.N.E.F. D.E.U.G. A1- A2 Histoire d’A, AGEL- UNEF, qui para”t en 1976, assigne quatre objectifs ˆ son journal : permettre l’expression des Žtudiants, informer les Žtudiants de premire annŽe sur la deuxime annŽe, informer les Žtudiants de D.E.U.G. A et intŽgrer les Žtudiants de premire annŽe ˆ la vie de la facultŽ. Le tirage et la diffusion de ces bulletins demeurent souvent modestes. Hormis trois publications de l’A.G.E. destinŽes exclusivement aux adhŽrents et ˆ quelques exceptions, les revues ont pour objectif une diffusion large au sein des Žtudiants de la filire. En s’adressant ˆ un public restreint, les tirages sont forcŽment rŽduits : Bachons Ensemble tire ˆ 250 exemplaires, Histoire d’A ˆ 1000 exemplaires, l’Eveil ˆ 1000 exemplaires et le Diplo ˆ 500 exemplaires. Les faibles tirages sont aussi limitŽs par la charge financire qu’ils reprŽsentent. Ainsi, Bachons Ensemble, tirŽ ˆ 250 exemplaires, cožte 450 francs au dŽbut des annŽes 80. La diffusion gratuite Žtant trop lourde financirement, le numŽro est vendu 2 francs, ce qui limite encore la diffusion et le tirage… . Une exception est ˆ noter : Impact Etudiant. En effet, l’A.G.E.L-U.N.E.F. tente de lancer au dŽbut de l’annŽe 1986 un mensuel gratuit en collaboration avec le CERCOOPE. TirŽ ˆ 15 000 exemplaires, ce mensuel rappelle l’Žpoque de la " grande U.N.E.F. " o l’A.G.E.L. disposait de son propre journal, Lyon- UniversitŽ. De rŽels efforts sont rŽalisŽs : la prŽsentation type RonŽos ou Gestetner laisse la place ˆ la couleur, au papier glacŽ, aux photos… . Epais d’une trentaine de pages, il se veut avant tout ludique et instructif. Les articles d’information syndicale sont abandonnŽs au profit, surtout, d’articles culturels. Hormis l’Žditorial du prŽsident de l’A.G.E.L-U.N.E.F., les articles portent sur le cinŽma, la poŽsie, la politique, des enqutes, des interviews, des ouvrages, des problmes de sociŽtŽ comme la drogue, des adresses utiles, des adresses pour sortir, des petites annonces, des jeux… . Cependant, cette tentative s’achve assez rapidement, puisque la parution cesse dŽs le deuxime numŽro.

Outre l’Žcrit, l’oral occupe une place essentielle dans l’information des Žtudiants. Elle se fait principalement par les interventions des adhŽrents de l’A.G.E.L-U.N.E.F. pendant les cours. Cette pratique est plus ou moins tolŽrŽe par les professeurs et les administrations des universitŽs lyonnaises. Les prises de parole ont lieu durant toute l’annŽe universitaire pour faire le compte- rendu de rŽunions, faire signer des pŽtitions… . Elles ont pour but d’informer les Žtudiants, mais aussi d’entra”ner une rŽaction, une Žmotion immŽdiate. De la qualitŽ de l’intervention va dŽpendre la signature d’une pŽtition par tout un amphithŽ‰tre. Cependant, elle n’est pas accessible ˆ tous les adhŽrents ou militants, car elle laisse l’orateur seul face ˆ des dizaines d’Žtudiants. De taille plus rŽduite , la discussion en petits groupes concoure Žgalement ˆ la circulation de l’information. Les locaux syndicaux, surtout quand ils bŽnŽficient de l’attraction exercŽe par les services, sont le lieu idŽal : " On faisait passer beaucoup d’informations par les locaux du CERCOOPE. C’Žtait vŽritablement un lieu o on avait la chance de toucher les Žtudiants .

2. Conna”tre les revendications des Žtudiants.

Une autre activitŽ quotidienne de l’A.G.E.L-U.N.E.F. consiste ˆ conna”tre les revendications des Žtudiants. En effet, elle n’est pas, en dŽpit de ses prŽtentions, un syndicat de masse, reprŽsentatif des Žtudiants. Au contraire, son implantation est souvent incomplte ou trs faible dans certaines filires. De plus, elle dŽmontre ainsi sa proximitŽ, son Žcoute des Žtudiants et de leurs problmes.

Les cahiers de revendication sont alors abondamment mis ˆ contribution. ConstituŽs de feuilles blanches, ils permettent aux Žtudiants de s’exprimer librement sans poser au prŽalable les propositions de l’U.N.E.F. ou son analyse de la situation universitaire. On peut distinguer des pŽriodes d’utilisation diffŽrentes, rŽpondant ˆ des prŽoccupations et ˆ des objectifs particuliers.

De 1973 environ au milieu des annŽes 80, l’emploi des cahiers de revendication n’est pas au centre des prŽoccupations de l’U.N.E.F.. Les premiers cahiers de revendication apparaissent vers 1973. Ils sont alors dans une stratŽgie, une orientation plus large de dŽvelopper l’A.G.E.L-U.N.E.F. dans les T.D. et les amphithŽ‰tres. Le but est de dŽcentraliser les structures de l’U.N.E.F. au maximum, afin d’tre au plus prŽs des Žtudiants. Les Žtudiants doivent prendre en charge la rŽdaction de leurs revendications et les moyens de les satisfaire : " On avait commencŽ ˆ poser la question des cahiers de revendication et ˆ travailler T.D. par T.D. C’Žtait notre grosse obsession : il faut travailler T.D. par T.D., aller au plus prŽs des Žtudiants pour qu’ils prennent en charge eux- mmes la rŽdaction de leurs revendications et les moyens de les satisfaire. C’Žtait le dŽbut et c’Žtait dur, car il fallait du monde partout ". Les cahiers de revendication ont donc pour objectif, plus que de conna”tre les problmes des Žtudiants, de responsabiliser les Žtudiants. Il faut Žveiller, faire prendre conscience aux Žtudiants de leur condition. L’aspect connaissance des revendications est d’autant moins important que l’A.G.E.L-U.N.E.F. dŽveloppe paralllement son propre projet pour l’UniversitŽ : projet d’allocation d’Žtude, œuvres universitaires et sociales… .

Du milieu des annŽes 80 ˆ environ 1990, l’A.G.E.L-U.N.E.F. dŽveloppe un discours plus gŽnŽral, plus politique : " Quand j’ai pris la prŽsidence, on avait un discours beaucoup plus gŽnŽral, beaucoup plus thŽorique, national. […] Avec la prŽparation du congrs de Toulouse, une modification stratŽgique s’opre […]. C’Žtait l’idŽe qu’il fallait un syndicat beaucoup plus utile aux Žtudiants et qu’il fallait partir non pas de problmes globaux, nationaux, gŽnŽraux, mais que s’il on voulait intŽresser les Žtudiants, faire en sorte qu’ils se syndiquent, au moins qu’ils se mobilisent, il fallait partir de problmes trs concrets ". Dans ce contexte, la connaissance des revendications des Žtudiants importe peu : il faut convaincre de la justesse des propositions et du projet de l’A.G.E.L-U.N.E.F.. L’A.G.E.L-U.N.E.F. porte alors un projet pour l’Enseignement SupŽrieur et ne laisse aux Žtudiants que la capacitŽ de la soutenir. Un changement se produit avec le congrs de Toulouse en 1990. L’U.N.E.F. est alors redŽfinit comme un " outil pour rassembler les Žtudiants sans autre prŽalable que la dŽfense de leurs droits. Elle abandonne son projet pour l’Enseignement SupŽrieur, se rapproche des Žtudiants et tente de conna”tre prŽcisŽment leurs revendications.

De 1990 ˆ 1994, l’orientation dŽcidŽe au congrs de Toulouse est mise en application. Si des tiraillements, des rŽticences se font sentir au niveau national et dans certaines A.G.E., l’A.G.E.L-U.N.E.F. ne semble pas conna”tre ces difficultŽs, en particulier gr‰ce ˆ des discussions approfondies entre les adhŽrents. Dans le cadre de l’orientation dŽfinie au congrs de Toulouse, les cahiers de revendication sont abondamment utilisŽs, en particulier par le Bureau National. Ils deviennent pratiquement la base, le pilier de l’activitŽ de l’A.G.E.L-U.N.E.F.. La lutte contre l’augmentation des droits d’inscription dans les DCEF ˆ Lyon III est ˆ ce sujet Žloquente. A la rentrŽe 1990-1991, l’A.G.E.L-U.N.E.F. fait circuler des cahiers de revendication dans les amphithŽ‰tres de DCEF. De nombreux problmes sont alors pointŽs du doigt : l’augmentation des droits d’inscription aux cours et aux examens, l’organisation des inscriptions, l’insuffisance en personnel administratif… . Une synthse des cahiers de revendication est alors effectuŽe et un mouvement s’engage sur la base de la plate- forme revendicative ainsi crŽŽe. Les luttes, gr‰ce aux cahiers de revendications, partent dŽsormais de la situation concrte dans laquelle sont les Žtudiants. Mais une opposition interne commence en 1992 ˆ critiquer l’orientation du congrs de Toulouse. Elle s’Žlve avant tout contre l’absence de projet global pour l’UniversitŽ et de ligne directrice claire.

L’A.G.E.L-U.N.E.F. Žvolue donc dans son attitude vis ˆ vis du monde Žtudiant. Dans un premier temps, elle est dŽpositaire d’un projet pour l’Enseignement SupŽrieur et tente de convaincre les Žtudiants de la justesse de ses propositions. Avec le congrs de Toulouse en 1990, elle abandonne toute rŽfŽrence ˆ un projet et essaie de coller au mouvement Žtudiant gr‰ce ˆ sa connaissance des revendications du monde Žtudiant.

3. Aider les Žtudiants.

Aider les Žtudiants au quotidien fait partie de l’essence mme de l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Les statuts prŽcisent d’ailleurs : " Pour atteindre ce but, elle met en œuvre des moyens d’action susceptibles de faire parvenir les Žtudiants ˆ la satisfaction de leurs revendications. Elle prend toutes les initiatives pour rŽpondre aux besoins matŽriels et culturels immŽdiats des Žtudiants ".

Concrtement, l’action de l’A.G.E.L-U.N.E.F. se traduit le plus souvent par l’intervention d’Žlus ou d’adhŽrents. Elle se fait surtout auprs de l’administration des universitŽs lyonnaises avec lesquelles, exceptŽ Lyon III, elle Žtablit des liens. Ainsi, au dŽbut des annŽes 70, l’ouverture du campus de Bron s’accompagne de nombreux problmes matŽriels. Afin de les rŽgler , l’A.G.E.L-U.N.E.F. organise avec les Žtudiants des dŽlŽgations auprs de l’administration. Plus frŽquentes, les interventions des Žlus auprs de l’administration pour des problmes d’examens ou d’inscriptions nŽcessitent un certain sens de la diplomatie. En mai 1976, un courrier de l’A.G.E.L-U.N.E.F. adressŽ aux Žlus dŽtaille prŽcisŽment la marche ˆ suivre pour les litiges liŽs aux examens. La solution demeure toujours la mme : rŽdaction d’une pŽtition ou d’une motion et organisation d’une dŽlŽgation au prŽsident du jury ou au directeur de l’U.E.R..

L’A.G.E.L-U.N.E.F. peut aussi mettre son poids, son influence au service d’un Žtudiant. En avril 1979, elle soutient pleinement la plainte d’un Žtudiant tunisien contre les mesures prises par le prŽfet dans le cadre de la circulaire Bonnet. En septembre 1972, ˆ la suite de l’exclusion d’un Žtudiant de l’Žcole vŽtŽrinaire, le comitŽ U.N.E.F-U.G.E. de l’Žcole et l’A.G.E.L-U.N.E.F. lancent une pŽtition pour sa rŽintŽgration, tandis que le ministre de l’Agriculture est interpellŽ ˆ l’AssemblŽe Nationale par Mr G. Gosnat (DŽputŽ du groupe communiste) ˆ la demande de l’A.G.E.L-U.N.E.F..

Enfin, l’A.G.E.L-U.N.E.F. renseigne de nombreux Žtudiants dans ses locaux (bourses…) ou lors des cha”nes d’inscription. En 1991, elle distribue ˆ cet effet des tracts d’information sur les inscriptions… .

L’aide apportŽe par l’A.G.E.L-U.N.E.F. aux Žtudiants dŽcoule principalement de sa place, situation intermŽdiaire entre les Žtudiants et l’administration ou les professeurs. En effet, les Žlus et les militants sont souvent connus de l’administration, surtout ˆ Lyon I et ˆ Lyon II, ce qui facilite les contacts. L’aide au quotidien est donc souvent une aide au cas par cas et prend trs rarement de l’ampleur. Le recours au rapport de force n’a lieu qu’en ultime recours, au cas o la nŽgociation Žchoue. L’aide au quotidien privilŽgie donc la nŽgociation et les rŽseaux de connaissance. Toutefois, il ne s’agit en aucun cas de clientŽlisme : l’adhŽsion, au grand dam des responsables, n’est qu’exceptionnellement proposŽe : " C’Žtait plus en terme d’influence que de cartes. Des problmes de stratŽgie existaient ˆ l’Žpoque, puisque les cartes Žtaient faites sur les cha”nes et non avec les gens que l’on avait aidŽ ".

4. Animer le campus.

Un constat, un bilan souvent sŽvre est portŽ par l’A.G.E.L-U.N.E.F. sur la situation culturelle dans les campus universitaires et, en particulier, sur ceux de Lyon II Bron et de Lyon III. A ce constat s’ajoute la revendication de l’A.G.E.L-U.N.E.F. du droit des Žtudiants ˆ accŽder ˆ la culture. Lors des Žlections d’U.E.R. de mŽdecine Lyon- Nord, collge PCEM 2 en 1975, l’A.G.E.L-U.N.E.F. intgre dans ses propositions la crŽation d’une " animation culturelle et sportive ". Dans le guide de 1972- 1973, elle affirme le droit des Žtudiants ˆ accŽder ˆ " toute " la culture gr‰ce surtout ˆ la mise en place de l’Allocation d’Etudes.

En fait, les revendications culturelles sont rarement mises en lumire et ne semblent pas une prioritŽ. Toutefois, l’A.G.E.L-U.N.E.F. ne dŽlaisse pas l’activitŽ culturelle : " Par exemple, c’Žtait la grande Žpoque du dŽveloppement du TNP ˆ Lyon, et sur l’I.N.S.A. […], on a organisŽ maintes reprŽsentations thŽ‰trales spontanŽes […]. On faisait parti de la fŽdŽration des clubs, on passait pas mal de films ". Outre les activitŽs thŽ‰trales de l’I.N.S.A., l’A.G.E.L-U.N.E.F. organise aussi des boums, gre un cinŽ-club ˆ la Doua, organise des confŽrences sur le contenu des cours… . Ainsi, le C.A. U.N.E.F. Droit-Sciences Economiques organise, peut- tre en novembre 1972, les Assises nationales de Droit/Sciences Economiques et en mars 1978 une confŽrence avec le professeur Miaille de l’universitŽ Montpellier I sur " le droit tel qu’on nous l’enseigne ". Mais surtout, la grande animation culturelle est la prŽparation du gala de l’A.G.E.L-U.N.E.F.. OrganisŽ par l’A.G.E.L-U.N.E.F. ˆ la Bourse de Travail, il a lieu de une ˆ trois fois par an et produit des artistes renommŽs : " On avait une activitŽ culturelle phare de l’annŽe : le gala de l’A.G.E.L. ˆ la Bourse du Travail. On a fait venir des vedettes : Nougaro, les Frres Jacques, Paco Ibanez, Guy Bedos […], ThŽodorakis ". D’autres artistes se sont aussi produits : Cuarteto Cedron, Bread and Pupet… . Trs lourds ˆ organiser , ils ne sont pas ouverts aux seuls Žtudiants et rassemblent plusieurs milliers de spectateurs. Cependant, ils dŽclinent au milieu des annŽes 70 et disparaissent peut- tre en 1977.

L’A.G.E.L-U.N.E.F. possde donc, avant le congrs national de 1980, une activitŽ culturelle importante. Elle s’inscrit certes dans une volontŽ de prise en compte de tous les aspects de la vie Žtudiante, mais elle est surtout , et peut- tre avant tout, considŽrŽe comme une source de revenus financiers. De nombreux anciens responsables incluent les activitŽs culturelles dans les ressources financires du syndicat. Certaines activitŽs se rŽvlent d’ailleurs trs rentables. Ainsi, la projection d’un film des Pink Floyd ˆ l’I.N.S.A. rapporte plusieurs centaines de francs… en 1974 ou 1975.

Le congrs national d’avril 1980 adopte une orientation claire en matire culturelle. Elle s’intgre plus largement dans la nouvelle orientation de SolidaritŽ Etudiante. Cette nouvelle orientation veut rompre avec l’isolement et l’individualisme ˆ l’UniversitŽ. Elle souhaite donc mettre en place une animation culturelle et associative et ainsi se charger pleinement de tous les aspects de la vie Žtudiante. Outre la tenue rŽgulire de boums et de soirŽes diverses, l’A.G.E.L-U.N.E.F. prŽpare des sorties entre Žtudiants comme en Histoire- GŽographie ˆ Lyon II et organise une " rencontre Rh™ne- Poulenc " avec la C.G.T. sur les dŽbouchŽs offerts par les formations de Sciences ˆ Lyon I. Mais surtout, trois animations lancŽes par l’A.G.E.L-U.N.E.F. mŽritent une attention particulire :

á Lors de la rentrŽe universitaire 1984-1985, une animation a lieu ˆ l’UniversitŽ Lyon II avec le podium de Radio- France et la distribution du guide de l’A.G.E.L-U.N.E.F..

á En mars 1985, une semaine internationale se tient ˆ Lyon I et ˆ Lyon II. Une riche programmation s’Žtale sur une semaine. Lyon II accueille l’AmŽrique Latine et la Turquie et les Žtudiants peuvent assister ˆ des dŽbats, des concerts, des films, des expositions, des colloques. Ils ont aussi la possibilitŽ de visiter des stands d’O.N.G. et d’ambassades, et de gožter ˆ des spŽcialitŽs culinaires. Un gala cl™ture la semaine internationale avec les Quilapayun. A Lyon I, des animations identiques ont lieu sur l’apartheid et la Palestine. Cette rŽalisation obtient d’ailleurs le label " AnnŽe Internationale de la Jeunesse " parrainŽ par le Ministre des Sports et de la Jeunesse.

á Enfin, sans doute influencŽe par le boum des radios libres, l’A.G.E.L-U.N.E.F. monte en 1981-1982 un projet de radio : " Radio- Campus Lyon ". Des boums sont organisŽes afin de collecter les fonds nŽcessaires, tandis que des devis pour le matŽriel et des grilles de programmation sont Žtablis. L’objectif est de crŽer une radio des usagers des universitŽs lyonnaises. Les thmes des diverses Žmissions refltent cette ambition : les buts de l’UniversitŽ, le C.R.O.U.S., la culture, les voyages, les Žtudiants salariŽs, le sport ˆ l’UniversitŽ, les grandes Žcoles, les spectacles, les Žtudiants en rŽsidence universitaire, les Žtudiants Žtrangers. Cependant , peut- tre pour des raisons d’ordre financier, le projet Žchoue ˆ la fin de l’annŽe 1982.

Hormis au dŽbut des annŽes 80, l’A.G.E.L-U.N.E.F. ne fait pas de l’animation culturelle des campus une prioritŽ. Elle est alors secondaire, la prioritŽ Žtant accordŽe ˆ l’activitŽ purement syndicale. Une nette Žvolution a lieu au dŽbut des annŽes 80 et l’A.G.E.L-U.N.E.F. intervient avec davantage de force et d’originalitŽ dans le domaine culturel. Elle dispose alors des moyens humains et financiers nŽcessaires et ne se trouve pas confrontŽe ˆ des mouvements Žtudiants. Le dynamisme de l’A.G.E.L-U.N.E.F. dans le domaine culturel, dŽjˆ important dans les annŽes 70, peut s’inscrire vŽritablement et sans entraves dans la nouvelle orientation nationale.

Toutefois, les annŽes 1986-1987 marquent un tournant. Son affaiblissement numŽrique ne lui permet plus d’occuper tous les domaines de la vie Žtudiante et son champ d’intervention se rŽduit faute de militants, de moyens financiers et sans doute aussi de conviction.

5. Renforcer le syndicat.

La rotation rapide des adhŽrents contraint l’A.G.E.L-U.N.E.F. a un effort quotidien de renouvellement. Renforcer le syndicat est, dans ces conditions, une nŽcessitŽ, une prŽoccupation constante.

Contrairement ˆ certaines professions, il n’existe pas dans le monde Žtudiant de rŽflexe naturel ˆ la syndicalisation. Par consŽquent, les adhŽsions ne se font pas dans n’importe quelles circonstances et lieux.

Elles se font principalement sur les cha”nes d’inscription o l’A.G.E.L-U.N.E.F. est prŽsente. La prŽsence de l’A.G.E.L-U.N.E.F. sur les cha”nes d’inscription est tardive, puisqu’elle semble dŽbuter au milieu des annŽes 70. Les sources, les archives, particulirement faibles et incompltes en ce qui concerne les fichiers des adhŽrents, permettent difficilement d’Žvaluer la proportion des adhŽsions rŽalisŽes sur les cha”nes d’inscription. Pour les dernires annŽes de l’A.G.E.L-U.N.E.F., les chiffres sont disponibles et rŽvŽlateurs. En 1991-1992, 54,4 % des adhŽsions se font sur les cha”nes d’inscription, 38,5 % en 1992-1993 et 31,5 % en 1993-1994. Pour les annŽes antŽrieures, l’importance des adhŽsions rŽalisŽes sur les cha”nes d’inscription est corroborŽe par les anciens responsables : " L’adhŽsion se fait ˆ la rentrŽe. Il ne faut pas oublier le r™le de la tenue des cha”nes d’inscriptions, essentiel. L’adhŽsion se fait sur la tenue de la cha”ne ". La cha”ne d’inscription offre un espace de discussion pour les militants syndicaux et les nouveaux Žtudiants. Les adhŽrents de l’A.G.E.L-U.N.E.F. tentent alors de convaincre les nouveaux Žtudiants de la nŽcessitŽ d’un syndicat Žtudiant, des conceptions et propositions de l’U.N.E.F. et proposent ensuite l’adhŽsion.

Outre les cha”nes d’inscription , les initiatives tiennent une place importante, permettent de rŽaliser des adhŽsions. Les initiatives sont toutes les actions lancŽes par l’A.G.E.L-U.N.E.F. hors des grands mouvements Žtudiants nationaux : pŽtitions sur divers thmes comme le demi-tarif sur les transports en commun…, campagne pour les Žlections universitaires, cahiers de revendication, mouvements Žtudiants ˆ enjeux locaux et restreints… . Les adhŽsions se font alors par la discussion, mais aussi par une mise en pratique : lors d’une initiative, quelques Žtudiants vont s’impliquer en prenant des responsabilitŽs, en participant activement, puis ils vont graviter autour de l’A.G.E.L-U.N.E.F. et vont finir par adhŽrer. En 1991-1992, 29,4 % des adhŽsions se font lors des initiatives, 36,5 % en 1992-1993 et 55,4 % en 1993-1994. En 1993-1994, 28 adhŽsions sont rŽalisŽes ˆ l’occasion de la campagne des Žlections au C.A du C.R.O.U.S., soit quasiment autant que sur les cha”nes d’inscription.

Toutefois, les cha”nes d’inscription et les initiatives ne sont pas tenues dans la perspective premire de renforcer le syndicat. D’autres aspects priment alors nettement. Des " campagnes de renforcement " sont par contre organisŽes par le bureau d’A.G.E. ou le bureau national. LimitŽes dans le temps, des moyens et des objectifs particuliers lui sont assignŽs. Le bureau d’A.G.E. peut impulser une campagne de renforcement . C’est alors le responsable ˆ l’organisation qui se charge de sa prŽparation et de sa mise en œuvre. Ainsi, le collectif d’A.G.E. du 14.03.1979 dŽcide d’une campagne d’adhŽsion avec pour moyen un questionnaire. Le bureau national peut aussi exercer une pression sur l’A.G.E.. En mai 1992, l’A.G.E.L-U.N.E.F. reoit pour objectif de rŽaliser 100 nouvelles adhŽsions du 15 mai 1992 ˆ la fin du mois de juin. L’U.N.E.F. espre alors toucher les dividendes de sa forte prŽsence contre la rŽforme Jospin et atteindre les 10 000 adhŽrents. Le rŽel impact d’une campagne d’adhŽsion appara”t faible. Certes, quelques adhŽsions sont rŽalisŽes, mais les objectifs, souvent fantaisistes (doublement du nombre des adhŽrents…) ne sont jamais remplis. En janvier 1992, l’AGEL- UNEF compte environ 130 adhŽrents, quand le congrs national de 1992 fixait un objectif de 400 adhŽrents !.

Enfin, les rŽunions de l’UEC, les ftes du PCF, de la JOC et de l’UD- CGT sont l’occasion pour l’AGEL- UNEF de prendre contact avec des Žtudiants engagŽs ou sympathisants, et de les faire adhŽrer. Elle participe, pas forcŽment toutes les annŽes, mais assez rŽgulirement, ˆ la fte de la Voix du Lyonnais, de la JOC… . Elle tient ˆ cette occasion un stand o elle prŽsente son action, ses idŽes, prŽpare des expositions… .L’adhŽsion est alors facilitŽe par la proximitŽ idŽologique des visiteurs. En 1991-1992, 3 % des adhŽsions seulement se font dans ces circonstances, mais 17,3 % des nouvelles adhŽsions en 1992-1993 et 10,9 % en 1993-1994.

L’activitŽ de renforcement du syndicat se fait donc quotidiennement, tant elle est vitale pour le syndicalisme Žtudiant. Quantitativement, les adhŽsions ont surtout lieu sur les cha”nes d’inscription et lors des initiatives. Ce sont des moments privilŽgiŽs permettant la discussion entre les adhŽrents et les Žtudiants. Cependant, outre une certaine rŽticence des adhŽrents ˆ proposer systŽmatiquement l’adhŽsion, l’aspect qualitatif des adhŽsions apporte un autre point de vue : les militants ont principalement adhŽrŽs sur un vŽcu (expŽrience d’un mouvement Žtudiant) ou par l’intermŽdiaire d’un fonds militant et politique (proximitŽ des idŽes politiques…).

 


UNE POLITIQUE CONSTANTE VISANT A PLACER L’A.G.E.L-U.N.E.F. AU CŒUR DE LA VIE ETUDIANTE

 

Chapitre 1 :La reconstruction d’une Žconomie sociale Žtudiante.

L’Žconomie sociale constitue un secteur particulier, souvent mŽconnu, mais qui est un complŽment essentiel de l’activitŽ revendicative de nombreuses organisations syndicales. Le syndicat le plus impliquŽ dans l’Žconomie sociale Žtait la F.E.N. (avant la scission de la F.S.U.) avec la CAMIF, la MAIF… . Les acteurs de l’Žconomie sociale sont des associations, des mutuelles, qui ont la particularitŽ de ne pas avoir de buts lucratifs. Elle ne font pas des bŽnŽfices, mais des excŽdents de gestion. Ainsi, dans le domaine des mutuelles, les excŽdents appartiennent aux sociŽtaires, c’est ˆ dire aux adhŽrents. Les adhŽrents dŽsignent, directement ou indirectement, des dŽlŽguŽs au conseil d’administration, selon un principe sacrŽ de l’Žconomie sociale : un adhŽrent, une voix.

L’U.N.E.F., bien avant son lent dŽclin au cours des annŽes 60, fait de l’Žconomie sociale Žtudiante son principal champ d’intervention. Face aux difficultŽs croissantes rencontrŽes par les Žtudiants dans l’entre-deux-guerres, elle crŽe de multiples associations qui Žvoluent rapidement en sociŽtŽs d’entraide : centres de mŽdecine prŽventive et O.T.U. (Office du Tourisme universitaire) en 1934, Centre National des œuvres en 1936, O.S.S.U. (Office du Sport Scolaire et Universitaire) en 1938, M.N.E.F. (Mutuelle Nationale des Etudiants de France) en 1948… . Les A.G.E. multiplient les initiatives au niveau local et envahissent le champ de l’Žconomie sociale Žtudiante : ˆ Grenoble, l’A.G.E.G. gre, ˆ la fin des annŽes 50, un restaurant universitaire, une coopŽrative, une bibliothque, un bar, un service de polycopies. Elle conserve la gestion du restaurant universitaire jusqu’en 1970. De plus, elle crŽe et anime des associations culturelles et sportives ˆ travers le CIF (Club Inter-FacultŽs), un radio-club, son journal Grenoble-UniversitŽ, le GUC 5Grenoble UniversitŽ Club)… .

A Lyon, les services rescapŽs de l’A.G.E.L. en 1968-1970 sont rares : les locaux de l’A.G.E, situŽs au 20, rue F. Garin, abritent encore un bar et une imprimerie, mais le restaurant de l’A.G.E.L., situŽ dans le mme b‰timent, est dŽsormais gŽrŽ par le C.R.O.U.S..

 


I. Une t‰che secondaire ˆ l’activitŽ revendicative. 1971-1979.

  1. Des services aux Žtudiants limitŽs et disparates. 1971-1976.
  2. La situation, au sortir du renouveau, n’est pas favorable ˆ l’A.G.E.L.-U.N.E.F.. En effet, constituŽe en organisation indŽpendante de l’A.G.E.L.. dŽs le dŽbut de l’annŽe 1969, elle fait l’impasse sur le passŽ et sur les quelques services encore en activitŽ. Quelques rares amicales encore en activitŽ disposent de services. Ainsi, l’Amicale des Sciences, gr‰ce ˆ l’impulsion de quelques adhŽrents, organise la vente de trousses de dissection pour les Žtudiants de Biologie, la publication de polycopies, le dŽpart d’une classe de neige financŽe par une boum, et gre un distributeur de boissons. Cependant, l’Amicale passe ˆ la rentrŽe 1968-1969 aux mains d’une coalition de circonstance rassemblant les trotskistes de l’A.J.S. et les prochinois : " La grosse question de l’A.G. de rentrŽe de l’Amicale a ŽtŽ la participation aux Žlections. Et lˆ, on a ŽtŽ mis en minoritŽ par une curieuse alliance entre les trotskistes et les prochinois ". Au final, l’A.G.E.L.-U.N.E.F.. rŽcupre seulement les services de l’I.N.S.A., composŽs essentiellement de ronŽos. L’A.G.E.L.-U.N.E.F., au moment de son premier congrs en fŽvrier 1971, ne dispose d’aucun service aux Žtudiants.

    Or, le renouveau accorde une place extrmement rŽduite ˆ cet aspect de l’activitŽ syndicale. La motion proposŽe ˆ l’A.G. des syndiquŽs de Sciences par l’U.N.E.F-Renouveau Žlude totalement la question des services. Sur le problme des polycopies par exemple, l’U.N.E.F-Renouveau, au lieu de prendre en charge l’Ždition et la vente des polycopies, se borne ˆ l’aspect revendicatif en exigeant de l’administration l’Ždition gratuite des polycopies

    Sa position sur les services va mme parfois plus loin et appara”t fortement rŽticente, sinon hostile. En effet, les services, assimilŽs au corporatisme, sont rejetŽs. L’activitŽ syndicale de l’U.N.E.F-Renouveau est entirement tournŽe vers l’action revendicative.

    Une premire Žvolution appara”t en 1973 dans l’attitude de l’U.N.E.F. face aux services et ˆ l’Žconomie sociale Žtudiante. Elle a essentiellement lieu au niveau national, puisque le congrs d’A.G.E.L.-U.N.E.F. de mai 1973 n’aborde toujours pas la question des services. A l’inverse, une rŽflexion est amorcŽe au niveau de l’Union Nationale. La principale publication nationale de l’U.N.E.F., UNEF-INFORM, se fait par deux fois l’Žcho de ces dŽbats ˆ la fin de l’annŽe universitaire 1972-1973. Pour la premire fois, en novembre 1973, le congrs national de l’U.N.E.F. se penche sur cette question au cours de ses travaux. Cependant, il ne s’agit pas d’une nouvelle orientation pour le syndicat, principalement tournŽ vers l’action revendicative. L’objectif est de faire le point sur les services encore en activitŽ et de les pŽrenniser ou de les utiliser au maximum. Le r™le de l’U.N.E.F. est alors d’organiser avec les Žtudiants des services utiles immŽdiatement, rŽpondant ˆ des besoins spŽcifiques : " de voir les prioritŽs auxquelles nous devons faire face. La question primordiale que nous devons nous poser quant aux services est : quel est le besoin le plus urgent et ressenti par la plus grande masse des Žtudiants. Il ne s’agit pas, en ce domaine de faire preuve d’imagination, mais de satisfaire les premires exigences des Žtudiants ". Une Žvolution se fait donc jour : dŽsormais, l’U.N.E.F. conoit les services comme partie prenante de son activitŽ syndicale, mme si de multiples rŽticences s’expriment : " Cet aspect de notre activitŽ syndicale est bien trop nŽgligŽe ou ignorŽe, voir combattue par nos C.A. et nos A.G.E. […]. Or, bien souvent, nous les considŽrons comme des activitŽs secondaires, voire " infŽrieures ". Ils ne font que trop rarement l’objet des prŽoccupations des directions et de l’ensemble des syndiquŽs ". Au contraire, ces deux aspects de l’activitŽ syndicale ne se concurrencent pas, car ils ne rŽpondent pas aux mmes objectifs. Les services permettent de s’attaquer aux consŽquences de la crise universitaire, tandis que la lutte revendicative s’attache ˆ dŽnoncer les responsables de cette crise, c’est ˆ dire en premier chef le gouvernement. Les services ne sont donc pas considŽrŽs comme une solution, mais comme un pis-aller, un remde provisoire, destinŽ ˆ Žviter la sortie d’Žtudiants du systme universitaire : " ils ne rŽsolvent aucun des problmes fondamentaux des Žtudiants ". L’U.N.E.F. doit initier les services, mais la gestion doit tre le fait de l’ensemble des Žtudiants. Elle est donc le lieu de regroupement des Žtudiants. Cependant, outre ces considŽrations philanthropiques, les services sont aussi considŽrŽs comme des sources possibles de financement de l’activitŽ syndicale : " L’adhŽsion ˆ l’U.N.E.F., le paiement de la cotisation syndicale est le seul moyen pour les Žtudiants d’avoir un syndicat ˆ leur service. Les services de l’U.N.E.F. ne peuvent donc tre dŽficitaires ; ils doivent y compris contribuer au renforcement de l’organisation ". Mais dans la pratique, la conception des services demeure trs limitŽe. Contrairement aux annŽes 50, il ne s’agit pas de lancer l’U.N.E.F. dans la gestion de restaurants universitaires… . Elle adapte, en fonction de sa faiblesse numŽrique et financire, ses services. Ils sont, la plupart du temps, des structures lŽgres qui ne nŽcessitent pas d’investissements lourds. L’UNEF-INFORM de mars 1973 livre quelques exemples : services sociaux (en fait logement et emploi), animations et loisirs, coopŽratives, Žventuellement brasseries. Le cas des centres de polycopies de l’U.N.E.F., s’ils existent, doivent tre utilisŽs au maximum, mais il n’est pas question pour le syndicat de crŽer de nouveaux centres. Au contraire, l’action du syndicat se veut ici purement revendicative et l’objectif est d’obtenir dans chaque universitŽ " un centre d’Ždition autonome gŽrŽ paritairement par les Žtudiants et dotŽ d’un budget autonome ". Le cas particulier des centres de polycopies montre bien les limites de l’engagement de l’U.N.E.F. dans les services et plus largement dans l’Žconomie sociale Žtudiante. Elle consent ˆ organiser des services, mais dans une perspective ˆ court terme : l’aide immŽdiate aux Žtudiants. Sur le long terme, elle considre que la prise en charge des services relve de l’administration universitaire. L’inflexion de la position de l’U.N.E.F. trouve un faible Žcho au niveau de l’A.G.E. de Lyon. Quelques services existent ds 1973 et sont regroupŽs dans le local de l’A.G.E.L-U.N.E.F. sur le campus des Quais : renseignements universitaires, services emploi, service logement, correction des mŽmoires… des Žtudiants Žtrangers. Des cours polycopiŽs sont ŽditŽs ˆ partir de la rentrŽe universitaire 1974-1975, mais ils demeurent trs limitŽs.

    Jusqu’en 1976, les services Žtudiants offerts par l’A.G.E.L.-U.N.E.F. restent limitŽs et disparates. En effet, ayant tirŽ un trait sur l’A.G.E.L. et donc sur ses services, l’a.G.E.L.-U.N.E.F. se prŽoccupe peu de cet aspect de l’activitŽ syndicale et les rares services crŽes ˆ partir de 1973 ne nŽcessitent pas d’investissements financiers et humains importants. Au niveau national, une rŽflexion s’amorce, mme si elle demeure timide dans ses objectifs et ses formes.

  3. L’Žmergence d’une rŽflexion sur les services. 1976-1979.

A partir de 1976, un changement dans la conception des services s’opre et dote progressivement l’U.N.E.F. d’une orientation sur les services. Dans la continuitŽ des annŽes prŽcŽdentes , les services sont toujours considŽrŽs comme des solutions immŽdiates ˆ des problmes urgents : " Dans une situation o pour chaque Žtudiant, la rentrŽe est jour aprs jour pleine d’incertitudes, d’inquiŽtudes, rien ne rŽpond mieux ˆ ce besoin de trouver des solutions immŽdiates ˆ des problmes urgents que les SERVICES DU SYNDICAT ". Les services sont donc toujours perus comme une rŽponse aux consŽquences de la crise universitaire. Ils s’intgrent donc ˆ l’activitŽ syndicale, car ils participent ˆ la dŽfense immŽdiate des intŽrts Žtudiants.

Cependant, un changement important intervient en 1976 : les services mis en place par l’U.N.E.F. n’ont plus une vocation temporaire, ŽphŽmre. Ils ne sont plus destinŽs ˆ tre remplacŽs par l’administration :  " Si la crise actuelle qui frappe durement l’UniversitŽ et les Žtudiants ne fait qu’accentuer les besoins des services, ceux-ci ne sauraient trouver leur justification dans la conjoncture Žconomique, et cela, quel que soit le gouvernement en place et la politique de ce dernier ". L’engagement de l’U.N.E.F. dans les services s’inscrit dŽsormais dans le long terme et quitte le provisoire. Les services sont considŽrŽs comme une partie ˆ part entire de l’activitŽ syndicale, au mme titre que l’activitŽ revendicative. Ils ont deux objectifs : crŽer un systme d’entraide ˆ l’universitŽ et servir de base ˆ un rassemblement des Žtudiants autour du syndicat Žtudiant, en mettant en pratique ses solutions et en proposant l’adhŽsion sur la base des services. DŽsormais, l’activitŽ syndicale de l’U.N.E.F. repose sur deux bases : l’activitŽ revendicative et les services.

En s’inscrivant dans le long terme, l’U.N.E.F. change ses prioritŽs dans le dŽveloppement de ses services. Ainsi, un Collectif National fixe en 1976 quatre prioritŽs : les cours polycopiŽs, les services sociaux, les cinŽ-club et les A.S.S.U. (associations sportives).

Au niveau de l’A.G.E. de Lyon, les services connaissent un fort dŽveloppement , mme si des diffŽrences naissent en fonction du dynamisme des comitŽs. Une coopŽrative est crŽe par le comitŽ IUT 1 ˆ la rentrŽe universitaire 1976-1977 et le local du campus de Lyon II Bron accueille une coopŽrative, un centre de polycopies et un service culturel. Cependant , les deux comitŽs les plus dynamiques sont Lyon I Sciences et Lyon I SantŽ. Le comitŽ Lyon I Sciences, solide en nombre d’adhŽrents, multiplie trs rapidement ses services : une coopŽrative fonctionne, des polycopies sont ŽditŽs, des abonnements pour des thŽ‰tres sont disponibles…. Le comitŽ Lyon I SantŽ fait preuve d’un dynamisme intense, en dŽpit de sa faiblesse numŽrique, puisqu’il ne rassemble que 10 ˆ 15 adhŽrents en 1972-1973. Les services sont surtout centrŽs sur l’Ždition de polycopies. En effet, certains cours , particulirement pŽnibles, ne sont gure frŽquentŽs par les Žtudiants, qui peuvent se procurer les cours polycopiŽs publiŽs par l’Association Corporative des Etudiants en MŽdecine de Lyon. Cependant, devant cette dŽsaffection, des enseignants dŽcident de contraindre les Žtudiants ˆ assister aux cours en refusant de fournir leurs cours ˆ l’ACEML. Face ˆ cette situation, les adhŽrents de l’A.G.E.L.-U.N.E.F. dŽcident d’organiser les Žtudiants pour recrŽer correctement les cours et les Žditer. Au dŽbut, cette initiative est lancŽe en collaboration avec la corpo de mŽdecine, surtout dans le domaine logistique. Cependant, les relations se distendent avec l’ACEML et une association autonome de l’A.G.E.L.-U.N.E.F. est crŽŽe. Les Žtudiants paient une cotisation et reoivent chaque semaine les cours ŽditŽs par un imprimeur. L’Ždition des cours oblige les enseignants ˆ revoir leurs mŽthodes pŽdagogiques, tandis que l’Ždition de polycopies est pŽrennisŽe et s’Žtend ˆ l’ensemble de la facultŽ de MŽdecine de Rockeffeler et ˆ la facultŽ A. Carrel. Des services sont gŽrŽs par l’A.G.E. ou confiŽs ˆ des comitŽs. C’est en particulier le cas de la cafŽtŽria Longefer, confiŽe au comitŽ SantŽ : "La premire de ces cafŽtŽrias est la rŽcupŽration d’une cafŽtŽria dŽsaffectŽe qui se trouvait dans une citŽ universitaire de la M.N.E.F.. La M.N.E.F., ˆ l’Žpoque, gŽrait encore quelques citŽs universitaires, et il y’en avait une ˆ Lyon qui se trouvait juste ˆ cotŽ de la fac de MŽdecine. […]. A partir de l’expŽrience de crŽation de cette cafŽtŽria, ˆ la fac de MŽdecine ou ˆ cotŽ, nous avons crŽe un certain nombre d’autres cafŽtŽrias ". Des photomatons sont installŽs par l’A.G.E. dans les facultŽs de MŽdecine et de Sciences, des services logement et emploi sont mis ˆ la disposition des Žtudiants, et une antenne V.T.U. s’installe ˆ Lyon en avril 1978. De 1976 ˆ 1979, les services aux Žtudiants de l’A.G.E.L.-U.N.E.F. sont fortement dŽveloppŽs et investissent progressivement tous les champs de l’Žconomie sociale Žtudiante. Ils sont aussi plus ambitieux, puisque des investissements financiers plus importants sont engagŽs.

La croissance de l’activitŽ des services fait na”tre au sein de l’A.G.E.L.-U.N.E.F. une rŽflexion, un dŽbat sur les services : " C’est l’Žpoque o on dŽveloppe les services, on commence ˆ y rŽflŽchir […]. Le besoin de recrŽer des choses se faisait sentir. […]. Puis, il y’avait un vrai dŽbat… . Des adhŽrents disaient : " non, on n’est pas lˆ pour faire des services ", " des Žtudiants vont adhŽrer pour avoir accs ˆ la coop, ˆ la polycopie, et ce ne sont pas de vrais adhŽrents ". C’Žtaient des dŽbats un peu byzantins, et qui n’intŽressaient pas les Žtudiants d’ailleurs, mais qui nous ont agitŽ pendant de longues heures ". Un vŽritable dŽbat a donc lieu sur l’utilitŽ et sur les consŽquences des services. En effet, des adhŽrents, souvent d’ailleurs proches de l’U.E.C., s’opposent aux services, considŽrŽs comme un retour de l’U.N.E.F. au corporatisme et au rŽformisme. Ils rejettent en particulier la validitŽ de l’adhŽsion par les services, jugŽe fausse et intŽressŽe. Cependant, une rŽflexion s’Žlabore progressivement, et en particulier sur le lien entre les services et l’accroissement du nombre des adhŽrents. Devant les rŽussites, en particulier celle du secteur SantŽ, les services sont progressivement Žtendus ˆ l’ensemble des facultŽs. En effet, les effectifs du comitŽ SantŽ croissent de faon spectaculaire, puisqu’ils atteignent 200 adhŽrents vers 1976-1977 sur les quatre facultŽs de MŽdecine.

 


II. La crŽation du CERCOOPE, vŽritable centrale de services.

La gestion des services, peu structurŽe et dispersŽe entre les diffŽrents comitŽs avant 1979, est centralisŽe au niveau de l’A.G.E. (et mme au delˆ) gr‰ce ˆ la crŽation du CERCOOPE, c’est ˆ dire du CEntre RŽgional des COOPŽratives Etudiantes. Il est l’aboutissement d’une rŽflexion entamŽe depuis plusieurs annŽes, et ouvre de nouvelles perspectives, tant locales que nationales.

  1. La naissance du CERCOOPE, centrale de services rŽgionale.
  2. La crŽation du CERCOOPE trouve son origine dans les difficultŽs financires rencontrŽes par l’association gŽrant les services de l’A.G.E.L.-U.N.E.F. en MŽdecine : " L’association qui avait ŽtŽ crŽŽe pour gŽrer ces services, et qui Žtait une association qui n’avait strictement rien ˆ voir avec l’U.N.E.F., a connu une Žvolution Žconomique difficile. Nous avons hŽbergŽ cette structure dans nos locaux du 8, rue Volney, qui avaient ŽtŽ donnŽs par le prŽsident d’universitŽ de Lyon I. Nous avons participŽ ˆ la gestion de cette association en tant que structure syndicale […]. Lorsque cette association a finit par dŽposer le bilan, j’ai proposŽ de crŽer, et j’ai crŽŽe, immŽdiatement une association qui a pris instantanŽment le relais de la prŽcŽdente ". La crŽation de l’association CERCOOPE est avant tout l’œuvre de R. Lopez, dŽjˆ trs impliquŽ dans les services du comitŽ MŽdecine et initiateur de nombreuses rŽalisations dont la cafŽtŽria Longefer.

    L’association CERCOOPE est immŽdiatement conue comme autonome de l’U.N.E.F.. Cependant, elle n’est pas indŽpendante, puisqu’elle est rattachŽe structurellement ˆ l’A.G.E.L.-U.N.E.F. : le prŽsident du CERCOOPE est le prŽsident de l’A.G.E.L.-U.N.E.F.. Ainsi, en juillet 1983, le prŽsident de l’A.G.E.L.-U.N.E.F., RŽmy MŽnŽtrier, occupe la prŽsidence du CERCOOPE avec l’aide d’un administrateur gŽnŽral du CERCOOPE, qui assume de fait la responsabilitŽ de la bonne marche de l’association. Ce poste a d’ailleurs ŽtŽ souvent occupŽ par des anciens adhŽrents de l’U.N.E.F..

    Les objectifs du CERCOOPE sont d’emblŽe trs ambitieux. En effet, aprs une pŽriode de stabilisation durant laquelle la prŽsidence est assumŽe par R. Lopez, le CERCOOPE affirme trs vite une vocation ˆ la fois locale et rŽgionale. Son objectif est la mise en place et la coordination des diffŽrents services des universitŽs de Lyon, mais aussi de Saint-Etienne et de Grenoble. Elle dŽveloppe, multiplie et diversifie les services offerts par l’A.G.E.L.-U.N.E.F.. Tous les champs de la vie Žtudiante sont investis progressivement par le CERCOOPE : Žtudes, loisirs, culture, emploi, logement… . En 1980-1981, le panel des services est trs large :

    (r) Imprimerie : L’imprimerie est la premire pice ma”tresse des services du CERCOOPE. Elle se compose ˆ la fois de l’imprimerie du 8 rue Volney o sont imprimŽes les thses, les polycopiŽs…, et de multiples photocopieurs rŽpartis dans les divers locaux syndicaux, mis ˆ la disposition du CERCOOPE par l’A.G.E.L.-U.N.E.F.. Des photocopieuses sont installŽes dans les trois universitŽs de l’agglomŽration lyonnaise : Lyon I, Lyon II, Lyon III, avec parfois plusieurs points photocopie par universitŽ. Une rude concurrence entre les diverses associations et syndicats Žtudiants se dŽclare trs rapidement sur le " crŽneau " des photocopies. En Sciences, une concurrence acharnŽe oppose l’U.G.E.L.-U.N.E.F. ˆ l’A.G.E.L.-U.N.E.F. au dŽbut de l’annŽe 1980 et fait chuter le prix de la photocopie de 60 ˆ 35 centimes… .

    (r) Les coopŽratives : Elles sont aussi mises en place dans tous les locaux de l’A.G.E. de Lyon, mais aussi ˆ Saint-Etienne et ˆ Grenoble. Elles reposent principalement sur la vente de papeterie (stylos, gommes, feuilles…), d’ouvrages (une librairie est crŽŽe), de machines ˆ calculer… .

    (r) Les cafŽtŽrias : Plusieurs cafŽtŽrias sont gŽrŽes par le CERCOOPE sur les campus de Lyon. La premire cafŽtŽria est la rŽcupŽration d’une cafŽtŽria dŽsaffectŽe situŽe rue Longefer dans une citŽ universitaire de la M.N.E.F.. La cafŽtŽria la plus importante est acquise en juillet 1983. En effet, une convention entre le CERCOOPE et l’universitŽ Lyon II est signŽe au sujet de la gestion de la cafŽtŽria du campus de Bron, auparavant gŽrŽe par un privŽ. Un gŽrant est nommŽ par le CERCOOPE pour s’occuper de la gestion.

    (r) V.T.U : Une antenne de V.T.U existe en Sciences au dŽbut de l’annŽe 1980. Cependant, la gestion nationale de l’organisme de voyages crŽe en 1975 lors du congrs de Lyon se heurte rapidement ˆ des difficultŽs financires et ˆ la concurrence de l’O.T.U.. Elle dispara”t assez rapidement, peut-tre au dŽbut des annŽes 80.

    (r) Services divers : Les services emploi et logement, crŽes en 1973, perdurent, tandis que des comitŽs mettent en place des animations culturelles ou sportives. Au dŽbut de l’annŽe 1980, l’A.G.E.L.-U.N.E.F. Sciences met ˆ la disposition des Žtudiants un labo-photo moyennant une petite participation financire pour le matŽriel. Des bourses aux livres sont organisŽes ˆ Lyon III, des billets de train et de thŽ‰tre sont vendus… .

    (r) Enfin, une radio locale Žmet pendant une brve pŽriode avant la loi sur les radios libres de 1982. Elle a pu voir le jour gr‰ce aux compŽtences techniques des adhŽrents de Centrale et de l’I.N.S.A.. Aprs 1982, un projet de radio est ˆ nouveau ŽlaborŽ, mais ne voit pas le jour, peut-tre ˆ cause de problmes de financement.

    Le CERCOOPE prend une certaine ampleur et devient un acteur important de l’Žconomie sociale Žtudiante. Cependant, il conna”t au dŽbut de l’annŽe 1981 une crise de croissance. Le bureau d’A.G.E. du 19.03.1981 Žvoque la situation du CERCOOPE et pointe deux problmes majeurs : des difficultŽs de fonctionnement et des problmes financiers. Les dettes, qui se montent ˆ 154 000 francs, gnent l’activitŽ et le cožt des quelques salariŽs devient rapidement une charge trs lourde ˆ assumer. Par la suite, la situation se stabilise et, sans dŽgager d’excŽdents de gestion rŽguliers et importants, le CERCOOPE ne conna”t plus de difficultŽs financires.

    La dŽmarche de l’A.G.E.L.-U.N.E.F. vis ˆ vis des services est progressivement thŽorisŽe. Elle vise tout d’abord ˆ auto-organiser les Žtudiants face ˆ la " sŽlection sociale " et donc aux conditions de vie et d’Žtudes. Face ˆ la dŽmission de l’Etat, les Žtudiants doivent rŽpondre eux-mmes ˆ tous les aspects de la vie Žtudiante. La participation des Žtudiants ˆ la gestion des services est ŽrigŽe en nŽcessitŽ, afin de transformer l’assistance initiŽe par l’A.G.E.L.-U.N.E.F. en " entraide ". Dans cette vision, la gestion des services ne doit pas tre pris directement en charge par le syndicat, car elle ne permet pas d’associer tous les Žtudiants ˆ la gestion des services. Ensuite, la dŽmarche de l’A.G.E.L.-U.N.E.F. vise ˆ mettre les organismes compŽtents devant leurs responsabilitŽs. Face aux multiples dŽmissions de l’administration, l’A.G.E.L.-U.N.E.F., en crŽant des services essentiels aux Žtudiants (tels les polycopiŽs pour les Žtudiants salariŽs) crŽdibilise ses propositions et peut dŽnoncer les renoncements et la mauvaise volontŽ des organismes compŽtents.

    Cependant, diverses approches syndicales coexistent ˆ l’A.G.E.L.-U.N.E.F., en particulier sur le sujet sensible des services. Une opposition, une rŽticence vis ˆ vis des services, assimilŽs au corporatisme, s’exprime, en particulier de la part d’Žtudiants communistes.

  3. Une position phare au niveau national.

En 1980, les A.G.E. disposant de services au sein de l’U.N.E.F. sont rares. Seules quelques grandes A.G.E. ont conservŽ ou dŽveloppŽ des services, au rang desquelles se trouvent Lyon, Montpellier, Toulouse, Bordeaux, Nancy, Grenoble. L’A.G.E. de Toulouse rŽussit ˆ conserver la gestion d’un restaurant universitaire jusqu’au milieu des annŽes 80, tandis que l’A.G.E. de Bordeaux gre une brasserie et plusieurs cafŽtŽrias.

Au congrs de Reims d’avril 1980 (du 25 au 28 avril 1980), une nouvelle orientation nationale est dŽbattue et adoptŽe par les 1000 dŽlŽguŽs : le SolidaritŽ Etudiante. La nouvelle orientation part d’un bilan, d’une analyse de la situation universitaire : le monde Žtudiant est confrontŽ ˆ la sŽlection sociale, au vide des universitŽs et surtout ˆ un individualisme forcenŽ. Face ˆ cette situation, l’U.N.E.F. souhaite remplacer le systme D en vigueur dans le monde Žtudiant par une solidaritŽ Žtudiante. Les Žtudiants doivent prendre en main leur vie et crŽer un nouveau climat ˆ l’UniversitŽ. La place de l’U.N.E.F. change donc radicalement : lieu de rassemblement des Žtudiants, elle organise avec les Žtudiants la solidaritŽ Žtudiante ˆ travers trois structures : le groupe d’Žtude, qui s’occupe de l’activitŽ syndicale et revendicative, les services et les commissions d’activitŽ. L’U.N.E.F. dŽpasse dŽsormais le cadre de l’opposition simple ˆ la politique universitaire du gouvernement. L’entraide est dŽfinie comme une composante essentielle de l’orientation syndicale ˆ cotŽ de la lutte revendicative. La nouvelle orientation place l’U.N.E.F. au centre de la vie Žtudiante, puisqu’elle doit assumer la prise en charge de tous les aspects de la vie Žtudiante : les services crŽent l’entraide nŽcessaire ˆ de meilleures conditions de vie et d’Žtude, les commissions d’activitŽ permettent d’animer la vie de l’UniversitŽ, et les groupes d’Žtudes assument l’activitŽ revendicative. L’U.N.E.F. tente ainsi d’aller au-delˆ de son r™le traditionnel de syndicat contestataire.

La traduction concrte de cette nouvelle orientation est la crŽation ˆ la rentrŽe universitaire 1984-1985 de la C.A.E.L, c’est ˆ dire la CoopŽrative d’Achat des Etudiants et LycŽens. Le r™le de l’A.G.E.L.-U.N.E.F. est essentiel dans le montage de la C.A.E.L. : " C’est en partant de cette expŽrience lyonnaise, qu’a ŽtŽ montŽe une structure nationale, qui s’est appelŽe la C.A.E.L.. C’est toute une Žquipe de lyonnais qui a ŽtŽ chargŽe de mettre en place cette structure de services ". Structure nationale de services, la C.A.E.L. reprend les principes dŽjˆ utilisŽs par le CERCOOPE : les Žtudiants consomment beaucoup de services, de prestations fournies par des sociŽtŽs commerciales et privŽes et sur lesquels elles prŽlvent des bŽnŽfices. Or, une large fraction du milieu Žtudiant ne dispose pas des revenus financiers suffisants pour conduire ˆ bien des Žtudes. L’objectif est donc d’offrir tout ce que les Žtudiants ont besoin, mais ˆ des prix plus bas gr‰ce ˆ une gestion Žconomique et au bŽnŽvolat. Si certaines A.G.E. refusent d’intŽgrer la nouvelle structure nationale, le CERCOOPE s’associe immŽdiatement ˆ la C.A.E.L..

L’association avec la C.A.E.L. permet au CERCOOPE de se dŽvelopper encore davantage. Les services du CERCOOPE se multiplient : fournitures, papeterie, matŽriel spŽcialisŽ, commande de livres, photocopies, imprimerie, annales d’examens, polycopies, voyages, cassettes audio et vidŽo, billets BIGE, ouverture d’un restaurant (il dispara”t en 1985), cafŽtŽrias…. En 1984-1985, le CERCOOPE est implantŽ sur pratiquement tous les campus et emploie trois salariŽs ˆ temps complet. Il dŽborde alors au-delˆ des limites de la rŽgion Rh™ne-Alpes, puisqu’aprs Saint-Etienne et Grenoble, des coopŽratives sont ouvertes ˆ Dijon et Besanon. En fŽvrier 1985, le CERCOOPE emploie sept salariŽs, soit nettement plus que la C.A.E.L. (trois salariŽs). Le r™le national du CERCOOPE est alors manifeste : une rencontre entre la C.A.E.L. et Bull met sur pied un projet de centres informatiques. Le constructeur informatique propose d’installer 10 ˆ 15 ordinateurs avec imprimantes par centre, d’assurer la maintenance et de former des moniteurs. Une association, nommŽe APRODIE, est crŽŽe pour gŽrer les 20 centres, tandis que l’U.N.E.F. et la C.A.E.L. servent de caution. Or, le sige social d’APRODIE est fixŽ au CERCOOPE, tandis que deux des quatre membres du bureau de la nouvelle association loi 1901 sont lyonnais. L’A.G.E.L.-U.N.E.F. joue un r™le essentiel dans l’Žlaboration de la nouvelle orientation syndicale, dite de SolidaritŽ Etudiante. En effet, ses adhŽrents sont trs impliquŽs dans la crŽation de la C.A.E.L. et le CERCOOPE occupe une position phare au niveau national.

 


RŽsumŽ :

L’A.G.E.L.-U.N.E.F. adopte diffŽrentes attitudes vis ˆ vis de l’Žconomie sociale Žtudiante, et en particulier des services. PrŽoccupation vŽritablement secondaire au dŽbut des annŽes 70, elle ne cesse ˆ partir de 1976 d’intervenir dans ce domaine. Avec le dŽveloppement de ses premiers services, elle mne une rŽflexion sur la place des services dans l’U.N.E.F. et sur les liens entre les services et l’activitŽ syndicale. Sa participation au dŽbat national sur les services, faible avant 1979, se renforce avec l’expŽrience du CERCOOPE et le savoir-faire de militants tel R. Lopez. L’A.G.E.L.-U.N.E.F. occupe jusqu’au milieu des annŽes 80 une position phare et influence considŽrablement l’orientation nationale en mettant son expŽrience au service de l’Union Nationale. Cependant, dŽs le milieu des annŽes 80, sa situation devient plus instable, en particulier dans le domaine des services. En effet, le CERCOOPE conna”t un dŽclin progressif et affronte de multiples difficultŽs. Il se heurte ˆ la concurrence toujours accrue du secteur privŽ, ˆ l’hostilitŽ des corporations et de certains professeurs, aux nombreuses contraintes et tracasseries administratives… . De plus, les relations entre le CERCOOPE et l’A.G.E.L.-U.N.E.F. se distendent ˆ partir du milieu des annŽes 80. En effet, le syndicat Žtudiant lyonnais, confrontŽ ˆ une grave crise, se replie sur lui-mme et recentre ses activitŽs : " Les liens entre l’U.N.E.F. et le CERCOOPE, en termes de participation ˆ la gestion…[…], les liens s’Žtaient beaucoup distendus. Quand j’ai ŽtŽ prŽsident, je me suis d’abord occupŽ de l’U.N.E.F., c’est ce qui m’intŽressait avant tout, mme si j’ai trouvŽ utile que le CERCOOPE existe […]. On laissait au gestionnaire la gestion… ". L’A.G.E.L.-U.N.E.F., qui compte alors de 80 ˆ 90 adhŽrents, ne dispose plus des capacitŽs militantes nŽcessaires pour pouvoir mener ˆ la fois l’activitŽ syndicale et les services. De plus, beaucoup d’adhŽrents ne peroivent plus les services comme du syndicalisme et, par consŽquent, l’intŽrt d’assurer leur survie. Les difficultŽs apparaissent au dŽbut de l’annŽe 1989 et le CERCOOPE dŽpose le bilan en mars 1990. En dŽpit de l’Žchec du CERCOOPE, une nouvelle structure de services est fondŽe en 1990 : le CELYSE. (CEntre LYonnais des Services Etudiants). Beaucoup plus modeste dans ses ambitions, ses objectifs et ses moyens, elle offre des services plus traditionnels : imprimerie, coopŽratives, photocopieurs. Cependant, la situation financire du CELYSE se dŽgrade rapidement et les dettes atteignent, en mars 1992, 185 000 francs. Elle dispara”t probablement peu de temps aprs, sans doute en 1993.

A l’inverse des services, l’A.G.E.L.-U.N.E.F. intervient peu dans l’autre champ de l’Žconomie sociale Žtudiante : le mutualisme. Jusqu’en 1976, l’U.N.E.F. ne se prŽoccupe pas ou peu du symbole mme du mutualisme Žtudiant : la M.N.E.F.. Certes, la crŽation de la SMERRA entra”ne des inquiŽtudes, mais le mouvement mutualiste ne suscite gure de passion au sein du B.N. De plus, la M.N.E.F. est alors " accaparŽe " par une tendance des Žtudiants socialistes. Aux contr™les de la mutuelle depuis la scission de l’U.N.E.F. en 1971, elle modifie progressivement les statuts et verrouille la direction nationale et les sections locales. Les Žlections au C.A. de la M.N.E.F., qui se dŽroulent dŽsormais par correspondance, ne prŽsentent plus d’intŽrt : la participation est trs faible, les irrŽgularitŽs frŽquentes. A partir de 1976, les relations entre l’U.N.E.F. et la M.N.E.F. se dŽtendent et un membre du B.N. de l’U.N.E.F. (en l’occurrence R. Lopez) est chargŽ des relations avec la M.N.E.F.. Une timide ouverture est alors concŽdŽe par la direction de la M.N.E.F.. A Lyon, les socialistes accordent " gŽnŽreusement " 25 % des voix ˆ l’U.N.E.F. lors des Žlections pour lui permettre d’obtenir quelques Žlus. Cependant, au niveau national, la direction demeure verrouillŽe, puisque l’U.N.E.F. n’obtient aucun sige au Bureau National. D’ailleurs, le rapprochement ne dure pas : l’engagement des socialistes au sein de l’U.N.E.F-ID entra”ne des prises de participation rŽciproques entre l’U.N.E.F-ID et la M.N.E.F.. DŽs lors, l’U.N.E.F. n’intervient plus dans le mouvement mutualiste.

 


Chapitre 2. Un syndicat peu ouvert au tissu syndical, politique et associatif.

I. Les relations U.N.E.F. / C.G.T. / S.N.E.Sup..

L’A.G.E.L-U.N.E.F. entretient des relations fraternelles avec le S.N.E.Sup. et la C.G.T.. Les trois organisations syndicales vont constituer dans les conseils des universitŽs des " intersyndicales " et nourrir ainsi le mythe d’une stratŽgie communiste visant ˆ conquŽrir et ˆ prendre le contr™le de l’UniversitŽ. Or, contrairement aux apparences, l’A.G.E.L-U.N.E.F. ne met aucune exclusivitŽ dans ses relations avec le monde syndical. Elle tente de prendre des contacts avec toutes les organisations syndicales qui le souhaite… . Des demandes d’entrevue sont adressŽes ˆ la C.F.D.T., ˆ la C.G.T-F.O., ˆ la F.E.N.… :  " Nous Žtions demandeurs de relations suivies, intersyndicales, avec tout le monde, donc avec le S.G.E.N-C.F.D.T… . Le S.G.E.N-C.F.D.T., je n’ai jamais eu le plaisir de les rencontrer, parce qu’ils nous ont toujours envoyŽ " sur les roses " ". L’A.G.E.L-U.N.E.F. se heurte la plupart du temps ˆ des fins de non-recevoir. L’attitude de la F.E.N., de la C.F.D.T., et de la C.G.T-F.O. s’explique sans doute par un anticommunisme virulent… .

  1. Des relations " officielles " souvent irrŽgulires et ponctuelles.
  1. Des rencontres circonstancielles.
  2. Les relations entre l’A.G.E.L-U.N.E.F. d’une part, et le S.N.E.Sup. et la C.G.T. d’autre part dŽpendent souvent des circonstances. Elles ont lieu ˆ l’occasion de rŽformes sur l’Enseignement SupŽrieur ou sur le statut des personnels de l’Enseignement, lors de mouvements sociaux, de cŽrŽmonies commŽmoratives ou bien encore lors d’actions de solidaritŽ internationale.

    Ces rencontres, dictŽes par les circonstances, sont la plupart du temps plurielles, c’est ˆ dire ouvertes ˆ toutes les organisations syndicales ou politiques. Elles sont donc irrŽgulires et ne permettent pas un dialogue en tte ˆ tte.

    La collaboration entre l’A.G.E.L-U.N.E.F. et la C.G.T. ou le S.N.E.Sup. prend diffŽrentes formes au gr des circonstances. Elle peut se concrŽtiser sous la forme d’un soutien publique. Ainsi, en avril 1976, une dŽclaration commune UL- C.G.T. Bron- Chassieu- Satolas / C.A. U.N.E.F. Bron est publiŽe. Elle fait suite ˆ la rencontre de deux dŽlŽgations et ˆ une dŽclaration nationale. A cette occasion, l’UL- C.G.T. apporte son soutien ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. dans sa lutte contre la rŽforme du second cycle au nom des " convergences profondes " entre Žtudiants et travailleurs : lutte contre le ch™mage (la rŽforme du second cycle risque de l’aggraver), contre la dŽqualification des emplois, les bas salaires, la politique dŽmagogique du gouvernement et en faveur du programme commun. L’intervention de la C.G.T. dans le domaine universitaire se fait au nom de convergences entre Žtudiants et travailleurs. Il s’agit alors d’un soutien de poids auprs de l’opinion publique et des salariŽs. L’A.G.E.L-U.N.E.F. appara”t alors comme un partenaire privilŽgiŽ de la C.G.T., la C.G.T. refusant d’accorder son soutien ˆ la " coordination des Žtudiants " o l’extrme- gauche est active. Mais la plupart du temps, cette collaboration se fait dans le cadre d’une intersyndicale, comme ˆ l’occasion de la cŽlŽbration de l’anniversaire de la libŽration de Lyon, du 1er mai ou encore ˆ l’occasion d’une action de solidaritŽ des travailleurs du Rh™ne avec l’Espagne en octobre 1971.

  3. Une aide matŽrielle et financire irrŽgulire.

Les relations entre l’A.G.E.L-U.N.E.F., la C.G.T. et le S.N.E.Sup. se font, le plus souvent, dans le cadre de rencontres plurielles. Toutefois, en dehors de " l’unitŽ d’action syndicale ", la C.G.T. et le S.N.E.Sup. apportent ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. une aide matŽrielle et financire. Elle est variable selon les Žpoques, puisque, avec le dŽveloppement des services, l’A.G.E.L-U.N.E.F. a de moins en moins besoin d’une aide matŽrielle.

La fourniture d’une aide matŽrielle est surtout l’œuvre de l’Union DŽpartementale C.G.T. ou des Unions Locales C.G.T.:  " L’aide apportŽe ˆ l’A.G.E., c’Žtait par la C.G.T. […]. La C.G.T. nous procurait des affiches, des tracts, une sono… ". Lors des Žlections universitaires, au C.A. du C.R.O.U.S., ou lors des mouvements Žtudiants, la C.G.T. fournit une aide matŽrielle non nŽgligeable. Ainsi, en 1977, l’A.G.E.L-U.N.E.F. possde une dette de 6690,00 francs auprs de l’UL- C.G.T. de Bron-Chassieu-Satolas pour des travaux d’imprimerie. Par contre, le S.N.E.Sup. semble incapable d’offrir une aide matŽrielle : " Le S.N.E.Sup. […] Žtait de fait moins militant que la C.G.T. et ce n’est pas eux qui allaient nous rŽgler les problmes des tracts, des affiches. A la limite, parfois, c’est nous qui rŽglions le problme des tracts pour eux… ". Avec le dŽveloppement des services, puis du CERCOOPE, l’A.G.E.L-U.N.E.F. recourt de moins en moins ˆ l’aide de la C.G.T.. Elle devient exceptionnelle : " La C.G.T. nous a aidŽ, par exemple, pour imprimer des tracts. En effet, cela coinait, par moment, au CERCOOPE, lors de la pŽriode d’impression des thses… . Donc, ˆ ce moment lˆ, on passait par l’UD- C.G.T.. ".

L’aide financire est principalement apportŽe par le S.N.E.Sup.. Lorsque les besoins se font sentir (congrs…), les professeurs adhŽrents au S.N.E.Sup. sont rŽgulirement sollicitŽs pour verser leur Žcot.

Les relations " officielles " entre l’A.G.E.L-U.N.E.F., la C.G.T. et le S.N.E.Sup. apparaissent ˆ la fois irrŽgulires et ponctuelles. DictŽes par les circonstances, elles se bornent le plus souvent ˆ une aide matŽrielle ou financire.

  1. Des relations informelles frŽquentes.

En fait, les relations entre l’A.G.E.L-U.N.E.F. et les deux organisations syndicales sont surtout informelles, c’est ˆ dire sans caractre officiel, sans prŽparation.

  1. Les conseils d’universitŽ et d’U.E.R. : les creusets de la vie syndicale ˆ l’UniversitŽ.
  2. Les rencontres entre adhŽrents de l’U.N.E.F., de la C.G.T. et du S.N.E.Sup. se font au sein d’espaces dŽterminŽs : les conseils d’universitŽ et d’U.E.R.. Les conseils sont les creusets de la vie syndicale ˆ l’universitŽ, puisqu’ils regroupent l’ensemble des organisations syndicales Žtudiantes, enseignantes ou des IATOSS.

    La C.G.T. ou le S.N.E.Sup. ne possdent pas ou rarement sur les campus universitaires de locaux syndicaux. Ils n’ont pas de permanence et sont difficiles ˆ joindre. Leur activitŽ syndicale, et en particulier celle du S.N.E.Sup., s’exprime avant tout dans les conseils d’U.E.R. ou d’universitŽ. Ils utilisent peu les moyens d’action des syndicats ouvriers : grve, manifestation… .La structure repose la plupart du temps sur quelques rares militants, souvent peu disponibles. Par consŽquent, les conseils sont les lieux privilŽgiŽs de rencontre entre ces diffŽrentes organisations syndicales. Les Žlus apparaissent alors comme des intermŽdiaires essentiels.

    Un vŽritable travail en commun s’Žlabore au sein des conseils. En effet, de multiples actions voient le jour : les Žlus adoptent des positions communes lors de votes, des motions sont prŽsentŽes et prŽparŽes en commun, des concertations ont lieu avant les votes… . Les dŽbats offrent l’occasion d’Žchanger des idŽes, de confronter les analyses, les propositions, d’Žtablir des convergences, mais aussi des contacts.

    Mais surtout, les Žlus des professeurs et des personnels jouent un r™le essentiel dans la formation des Žlus Žtudiants : " On Žtait beaucoup aidŽ par le S.N.E.Sup. dans la comprŽhension des mŽcanismes universitaires et le dŽcryptage d’un certain nombre de problmes ˆ l’universitŽ […]. J’ai aussi eu des relations avec la C.G.T. dans le cadre du C.A., qui m’ont beaucoup aidŽ pour dŽcrypter et comprendre…, qui m’ont formŽ […]. Ils contribuaient, par les questions qu’on leur posait, ˆ la formation des Žlus de l’U.N.E.F. ". Les Žlus des professeurs et des personnels ont souvent une longue expŽrience et apportent une aide prŽcieuse aux Žlus Žtudiants pour comprendre la portŽe d’un document administratif, financier ou autre.

  3. L’importance des connaissances personnelles.

Les relations personnelles jouent un r™le fondamental dans les relations entre l’A.G.E.L-U.N.E.F. et le S.N.E.Sup. et la C.G.T.. Des connaissances personnelles permettent d’Žtablir des passerelles entre les diffŽrentes organisations : " Nos contacts avec la C.G.T. tenaient des bonnes relations qu’on avait avec le secrŽtaire de l’UJICT- C.G.T. et qui fait que, sur un certain nombre de dossiers, on a travaillŽ ensemble : les IUT… ". De toute Žvidence, des interactions existent entre les milieux syndicaux et politiques. Les anciens adhŽrents de l’A.G.E.L-U.N.E.F. deviennent au fil des ans des responsables syndicaux, politiques, des professeurs… . Ils constituent une trame de relations sur laquelle peut s’appuyer l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Des rŽseaux de relations se superposent ˆ cette trame : des adhŽrents de l’A.G.E.L-U.N.E.F. sont aussi ˆ l’U.E.C. ou au P.C.F., o ils peuvent rencontrer des adhŽrents de la C.G.T., de la section universitaire de la Doua du P.C.F.… . Ainsi, les connaissances personnelles jouent un r™le essentiel dans les relations de l’A.G.E.L-U.N.E.F. avec le S.N.E.Sup. et la C.G.T..

Les relations de l’A.G.E.L-U.N.E.F. avec le S.N.E.Sup. et la C.G.T. s’expriment surtout au sein de diffŽrents conseils. Certes, la C.G.T. fournit ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. une aide matŽrielle non- nŽgligeable, mais elle diminue progressivement avec le dŽveloppement des services. Contrairement ˆ d’autres organisations, et en particulier l’UD- U.N.C.A.L. du Rh™ne, l’A.G.E.L-U.N.E.F. ne tente ˆ aucun moment de " coller " au S.N.E.Sup. ou ˆ la C.G.T.. Au contraire, elle conserve une certaine indŽpendance et ne tisse pas vŽritablement de liens Žtroits.

 


II. Un syndicat de gauche sans affiliation partisane.

Les syndicats, qu’ils soient Žtudiants, ouvriers ou autres, sont systŽmatiquement classŽs en fonction de leur sensibilitŽ politique, de leur famille de pensŽe… . L’indŽpendance syndicale, bien que revendiquŽe, devient alors une simple mise en scne. L’A.G.E.L-U.N.E.F. n’Žchappe, par consŽquent, pas ˆ la rgle et tra”ne la " gamelle communiste ". Les plus pudiques ou modŽrŽs rŽsument en gŽnŽral cela en quelques mots : " proche du P.C.F. ". Pour les plus virulents, l’A.G.E.L-U.N.E.F. devient la courroie de transmission du P.C.F. dans le monde Žtudiant, recevant probablement ses ordres de Moscou… .La masse des Žtudiants, lorsqu’elle n’est pas indiffŽrente, rŽprouve les prises de position politiques en faveur du programme commun de la gauche et classe l’A.G.E.L-U.N.E.F. comme un syndicat de gauche, en opposition aux syndicats et associations de droite. Ces clichŽs, souvent caricaturaux, s’ancrent- ils dans une rŽalitŽ ?. Quelles sont les relations de l’A.G.E.L-U.N.E.F. avec les partis politiques et le parti communiste en particulier ?

  1. Une forte implication de l’U.E.C. dans l’U.N.E.F- Renouveau.
  1. Un soutien en termes d’analyse et de militantisme.
  2. L’implication de l’U.E.C. dans l’U.N.E.F- Renouveau se traduit par l’apport de militants, mais aussi par une influence dans les analyses sur l’UniversitŽ.

    L’U.N.E.F- Renouveau dŽveloppe des analyses trs proches de celles de l’Union des Etudiants Communistes. La proximitŽ est particulirement nette avec l’analyse de l’Žvolution de l’UniversitŽ lyonnaise. L’analyse de l’U.E.C., dŽveloppŽe au congrs de ville d’avril 1970, distingue d’un cotŽ les universitŽs de Paris-centre et les autres. Les universitŽs de Paris-centre sont destinŽes ˆ devenir des universitŽs d’Žlite, o un enseignement polytechnique de qualitŽ est dŽlivrŽ. Dans le mme temps, les universitŽs de la banlieue parisienne et de Province doivent accueillir la masse des Žtudiants, sans secteur de recherche, dans le but de fournir au pays les cadres techniques pour les cha”nes de production. Dans ce systme universitaire dual, l’universitŽ de Lyon est condamnŽe ˆ rester une universitŽ de pitre qualitŽ. Lors du mouvement Žtudiant de fŽvrier 1970, l’U.N.E.F- Renouveau publie son analyse de l’Žvolution de l’UniversitŽ. Pour elle, le souci de rentabiliser l’UniversitŽ conduit ˆ la crŽation de trois types d’universitŽs : une universitŽ de masse destinŽe ˆ former des cadres moyens, une universitŽ de pointe ayant pour objectif de crŽer une Žlite pour la recherche et enfin les grandes Žcoles o sont recrutŽs les hauts cadres de l’industrie et de l’administration. Dans cette Žvolution, les universitŽs lyonnaises doivent devenir des universitŽs de masse liŽes aux besoins du patronat local. Les secteurs non rentables comme les Lettres sont amenŽs ˆ dispara”tre. Ces analyses, fortement marxistes, sont extrmement proches et renvoient ˆ une mme conception de l’Žvolution de la situation universitaire. Une mme proximitŽ se retrouve ˆ propos de la dŽfense des libertŽs syndicales et politiques ˆ l’UniversitŽ, ou de l’anti- impŽrialisme. Outre ces analyses, la conception des bases d’une rŽnovation de l’U.N.E.F. est la mme pour l’U.E.C. et pour le courant Renouveau. A la base, le postulat est identique pour les deux : l’Žchec de mai 1968, simple flambŽe passagre, s’explique avant tout par l’absence d’un vŽritable syndicat Žtudiant : " On voit bien la correspondance avec les thses politiques de l’Žpoque : […] il a manquŽ un programme d’action pour les masses populaires, c’est ˆ dire le programme commun. En correspondance avec a, il y’avait l’idŽe qu’il a manquŽ un grand syndicat Žtudiant qui tienne la route et il faut le reconstruire. ". A ce postulat rŽpond une conception du syndicalisme Žtudiant. Organisation syndicale de masse, l’U.N.E.F. doit dŽfendre les revendications et les intŽrts des Žtudiants, en liaison avec les syndicats ouvriers et en utilisant tous les moyens possibles, y compris la cogestion.

    La proximitŽ des analyses, l’utilisation et le recours ˆ un mme vocabulaire dŽmontrent l’influence de l’U.E.C. sur l’U.N.E.F- renouveau. Cependant, il appara”t trs difficile d’Žtablir les vecteurs de cette influence. La plupart des analyses sont ŽlaborŽes au niveau national, puis ensuite rŽpercutŽes au niveau local, tant ˆ l’U.E.C. normalisŽe depuis quelques annŽes, qu’ˆ l’U.N.E.F.- Renouveau. Pour les analyses locales, il faut sans doute Žloigner l’idŽe d’une volontŽ dŽlibŽrŽe de l’U.E.C. d’imposer ses analyses, idŽe qui corrobore l’image d’une U.N.E.F. courroie de transmission du P.C.F.. La nŽcessitŽ d’un renouveau de l’U.N.E.F. et certaines analyses bŽnŽficient d’un consensus qui s’Žtend au-delˆ du cercle trs restreint des adhŽrents de l’U.E.C.. La mme analyse de la situation universitaire est dŽveloppŽe par UniversitŽ 70 (gauche non- communiste) : " On constituerait ainsi de nouvelles grandes Žcoles, ˆ cotŽ de facultŽs dŽpotoirs pour la plus grande masse ". Au consensus s’ajoute l’influence des adhŽrents de l’U.E.C. au sein de l’U.N.E.F- Renouveau. Peu nombreux, ils constituent pourtant une part importante des militants et possdent sans doute un poids, une influence auprs des adhŽrents. Or, ils reproduisent volontairement ou non les analyses de l’U.E.C..

    Cependant, au niveau local, l’U.E.C. contribue surtout par l’apport de militants. L’investissement de l’U.E.C. dans l’U.N.E.F. ne dŽbute pas avec le Renouveau. En effet, elle contr™le plusieurs A.G.E., dont Lille, Saint- Etienne et Toulouse. DŽs dŽcembre 1968 et la dŽclaration de l’A.G.E. de Lille, l’U.E.C. appelle publiquement ˆ renforcer l’U.N.E.F- Renouveau. Elle publie et diffuse ses propres tracts appelant au renouveau de l’U.N.E.F.. Ainsi, en fŽvrier 1969, des militants de l’U.E.C. distribuent des tracts intitulŽs " Pour un renouveau de l’U.N.E.F.  " en facultŽ de mŽdecine. Elle mne aussi ses propres actions sans en rŽfŽrer aux membres de l’U.N.E.F.- renouveau. En janvier 1971, l’U.E.C. dŽcide de rŽagir au refus prolongŽ de la direction de l’A.G.E.L. de dŽlivrer les cartes U.N.E.F. 1970/1971. Le jeudi 14 janvier 1971, B. Gazet, membre du bureau P.S.U. de l’A.G.E.L., est enlevŽ ˆ l’I.N.S.A. par plusieurs Žtudiants de l’U.E.C.. Il est ensuite rel‰chŽ vers le parc de Miribel- Jonage sans avoir donnŽ les cartes. Cette anecdote montre ˆ quel point l’U.E.C., ou une partie de l’U.E.C. , s’investit en faveur du renouveau de l’U.N.E.F.. Mais surtout, l’U.E.C. est mise ˆ contribution pour son rŽseau et ses connaissances. Elle permet, au dŽbut de l’annŽe 1969, de faire la liaison entre les diffŽrentes listes :  " Il faut tre honnte. Disons, la liaison entre ceux qui souhaitaient se prŽsenter […] s’est faite par les Žtudiants socialistes et par l’U.E.C.  ". La prŽsence de l’U.E.C. dans les diffŽrentes facultŽs permet de donner corps ˆ l’U.N.E.F.- Renouveau. Ses connaissances sont aussi mises ˆ contribution pour publier des articles dans la Voix du Lyonnais, hebdomadaire de la fŽdŽration P.C.F. du Rh™ne.

  3. Une prŽsence non- prŽpondŽrante dans l’U.N.E.F.- Renouveau.

Si l’U.E.C. dŽcide de s’investir fortement dans l’U.N.E.F.- Renouveau, sa prŽsence n’est pas prŽpondŽrante, hŽgŽmonique. La faiblesse de ses effectifs gne considŽrablement ses activitŽs.

Les annŽes 60 ont ŽtŽ difficiles pour l’organisation Žtudiante communiste. En effet, elle se trouve confrontŽe, au dŽbut des annŽes 60, ˆ une crise durable o s’affrontent les tenants du ComitŽ Central du P.C.F. et les futurs leaders gauchistes. Une normalisation de l’organisation est entreprise par le P.C.F. et l’U.E.C. est secouŽe par les scissions et les exclusions. Ses effectifs dŽclinent rapidement et elle perd alors toute influence sur le monde Žtudiant. Les dernires crises se produisent en 1965 avec l’exclusion/scission du secteur Lettres de l’U.E.C. aprs son refus de soutenir la candidature de F.Mitterrand lors des Žlections prŽsidentielles. En 1966, des anciens adhŽrents fondent la J.C.R. avec ˆ sa tte A. Krivine et des membres de la IV Žme internationale, tandis que des mao•stes crŽent l’U.J.C.M.L..

A la veille de mai 1968, l’U.E.C. est certes normalisŽe, mais elle est considŽrablement affaiblie et se trouve en butte ˆ l’hostilitŽ et ˆ la concurrence des groupes gauchistes ˆ l’UniversitŽ. Mai 1968 se dŽroule d’une faon un peu particulire pour l’U.E.C. En effet, son attitude, totalement calquŽe sur celle du P.C.F, place l’U.E.C. en retrait du mouvement de mai.

Fin 1968, dŽbut 1969, elle compte peu d’adhŽrents : 120 environ selon les R.G. Elle dispose cependant d’une organisation structurŽe, organisŽe dans les facultŽs en cercles. Elle retrouve un certain dynamisme, mne des campagnes d’adhŽsion et distribue ses tracts sous la protection des militants du P.C.F. ou de la C.G.T. dans les universitŽs et restaurants universitaires. Cependant, elle Žprouve des difficultŽs ˆ dŽvelopper son influence sur le milieu Žtudiant. Une note de la fŽdŽration U.E.C. de Lyon au Bureau National de l’UEC dŽplore son incapacitŽ ˆ influencer, ˆ avoir un poids sur l’Žvolution des grves en Lettres et en Sciences en janvier- fŽvrier 1970. L’U.E.C., ˆ peine remise de son double traumatisme, la crise du dŽbut des annŽes 60 et mai 1968, ne dŽtient pas les capacitŽs humaines pour imposer ˆ l’U.N.E.F-Renouveau une prŽsence hŽgŽmonique. Des adhŽrents de l’U.E.C. militent activement ˆ l’U.N.E.F- Renouveau et influencent le syndicat Žtudiant. Mais ˆ aucun moment, elle ne possde une prŽsence prŽpondŽrante, hŽgŽmonique.

D’ailleurs, l’U.N.E.F-Renouveau regroupe en rŽalitŽ des Žtudiants de sensibilitŽs politiques diffŽrentes. Sa crŽation se fait sur la participation aux Žlections universitaires. Elle est alors trs peu structurŽe et le nom U.N.E.F-Renouveau est celui donnŽ aux listes qui se prŽsentent dans les diffŽrentes U.E.R.. Or, les listes recrutent bien au-delˆ du cercle restreint de l’U.E.C., et des Žtudiants de sensibilitŽs politiques diverses s’impliquent activement. Cette diversitŽ se maintient au-delˆ des Žlections. Ainsi, parmi les premiers animateurs de l’U.N.E.F- Renouveau, on retrouve des Žtudiants de toute la gauche : P.Maneval, J. Miachon (proche de la CIR), M. Hernu (JDS), JJ. Queyranne, G.Collomb. Le cas de N. Chambon est significatif : Žtudiante en Lettres, Žlue sur une liste de l’U.N.E.F- Renouveau, prŽsidente du C.A. U.N.E.F. de l’U.E.R. Sciences de l’Homme et de Son Environnement, elle est membre du Bureau National de l’U.N.E.F. de mars 1971 ˆ 1975 o elle reprŽsente plus ou moins les Žtudiants radicaux de gauche. Cependant, loin de constituer un contre- poids ˆ l’U.E.C., les Žtudiants socialistes ou de la gauche non- communiste sont dispersŽs en de multiples chapelles et peu nombreux : une trentaine environ.

Contrairement aux lŽgendes et aux images vŽhiculŽes par ses dŽtracteurs, l’U.N.E.F-Renouveau ne se compose pas essentiellement de communistes, mais s’ouvre beaucoup plus largement ˆ toutes les composantes de la gauche. D’ailleurs, l’U.E.C., affaiblie, ne possde pas les ressources suffisantes pour faire de l’U.N.E.F-Renouveau sa " courroie de transmission ". Cependant, son influence est trs loin d’tre nŽgligeable : ses adhŽrents militent activement dans le syndicat, o ils possdent les capacitŽs nŽcessaires pour s’imposer .

  1. Le maintien d’une prŽsence U.E.C. dans l’A.G.E.L-U.N.E.F..
  2. Au dŽbut des annŽes 70, la composition politique de l’A.G.E.L-U.N.E.F. se simplifie, s’Žpure. L’U.E.C. se retrouve alors la seule organisation politique Žtudiante ˆ maintenir une prŽsence dans l’A.G.E.L-U.N.E.F..

    On assiste ˆ un effacement progressif des militants des partis de la gauche non- communiste. Hormis quelques cas individuels, aucune organisation socialiste, ˆ part le CERES brivement, ne s’investit dans le syndicat Žtudiant lyonnais.

    La CIR dŽcide dŽs le dŽbut de participer au renouveau de l’U.N.E.F., mme si, au niveau local, l’engagement est moins net. En effet, de " nombreux " Žtudiants de la CIR se regroupent au sein d’UniversitŽ 70, qui prŽsente une liste avec le M.A.R.C. (Mouvement d’Action et de Recherche Critique, gauche non- communiste, proche de la C.F.D.T.) aux Žlections d’U.E.R. de dŽcembre 1970 (U.E.R. de Sciences Juridiques). La CIR dispara”t avec la crŽation du Parti Socialiste en 1971. Le regroupement d’une partie notable de la gauche non- communiste au sein du nouveau parti n’entra”ne pas pour autant l’engagement des jeunes socialistes dans l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Au contraire, les Žtudiants socialistes demeurent ŽmiettŽs entre les diffŽrents courants du P.S., en particulier ˆ Lyon : Etudiants Socialistes avec J. Poperen, CERES de J.P ChevŽnement, Mitterrandiens…. Seul le CERES dispose de quelques militants dans l’A.G.E.L-U.N.E.F., mais de manire ponctuelle et sans responsabilitŽs….

    L’annŽe 1975 marque l’achvement de ce processus : N. Chambon, qui a reprŽsentŽe les Žtudiants radicaux de gauche au Bureau National de l’U.N.E.F., critique la prise en main de l’A.G.E.L-U.N.E.F. par l’U.E.C. et dŽmissionne. Dans le mme temps, le Parti Socialiste crŽe le C.O.S.E.F. (ComitŽ d’Organisation pour un Syndicat des Etudiants de France) et prŽsente une liste ˆ l’Žlection d’U.E.R. de l’IEP. Aprs une relative percŽe, il obtient deux Žlus sur dix, il dispara”t de la scne en 1977. En dŽpit de cet Žchec, la crŽation du C.O.S.E.F. incarne la rupture entre le P.S. et l’U.N.E.F. dans un contexte pourtant favorable ˆ l’union : le programme commun. Par la suite, le Parti Socialiste, hormis le CERES, dŽlaisse le syndicalisme Žtudiant. Son rŽengagement date seulement du dŽbut des annŽes 80. A partir d’une implantation dans l’U.N.E.F- US, les Žtudiants socialistes investissent l’U.N.E.F- ID, aprs la fusion entre le M.A.S. et l’U.N.E.F- US.

    DŽsormais, l’U.E.C. est la seule organisation politique ˆ conserver une prŽsence au sein de l’A.G.E.L-U.N.E.F.. La double appartenance devient frŽquente dans le milieu militant de l’A.G.E.L-U.N.E.F. et au niveau des responsables. Ainsi, tous les prŽsidents d’A.G.E. sans exception sont adhŽrents de l’U.E.C.. De nombreux responsables sont aussi ˆ l’U.E.C.. Elle devient de plus en plus importante avec la diminution des adhŽrents, et souvent des moins politisŽs. Cependant, il existe un refus de mŽlanger les deux. Mme s’il n’existe pas de rgle Žcrite, les double- responsabilitŽs sont ŽvitŽes autant que possible : " Nos rapports (entre l’A.G.E.L-U.N.E.F. et l’U.E.C.) Žtaient amicaux, on se conna”t bien, ils sont ˆ l’U.N.E.F…, mais bon, on sŽparait les deux ". Mais l’A.G.E.L-U.N.E.F. et l’U.E.C. ne sont pas deux mondes distincts, hermŽtiques. En effet, la double-appartenance, la proximitŽ des analyses et surtout le partage d’un mme noyau militant, engendrent entre les deux organisations des liens. Ainsi, jusqu’au milieu des annŽes 80, l’A.G.E.L-U.N.E.F., qui ne conna”t pas de difficultŽs majeures, sert de vivier ˆ l’U.E.C.. Pour Philippe Grand, prŽsident d’A.G.E. de 1984 ˆ 1985, " l’U.N.E.F. sert de vivier ˆ l’U.E.C.. Elle ne vient pas taper dedans, mais elle sert de vivier. En effet, on se c™toie […]. On a jamais voulu que l’U.E.C. se serve de notre local […], mais c’est vrai que l’on a aussi fournit des militants ˆ l’U.E.C.. Et c’est aussi vrai que l’U.E.C a pu, ˆ un moment, nous en fournir. ". L’A.G.E.L-U.N.E.F., qui compte alors prŽs de 1500 adhŽrents, constitue, pour une U.E.C. numŽriquement faible, un milieu o elle peut recruter. Mais ce processus fonctionne aussi dans le sens inverse. De 1986 ˆ 1988, la survie de l’A.G.E.L-U.N.E.F. est assurŽe par l’U.E.C.. Elle investit alors des militants dans une U.N.E.F. rŽduite ˆ l’Žtat de groupuscule : " Ne serait- ce que demander ˆ des copains de l‰cher leurs responsabilitŽs sur l’U.E.C. pour aller sur l’A.G.E.L.. […]. Aprs, il me semble que la balance a dž se renverser, ˆ un moment donnŽ. L’U.E.C. avait alors perdu pas mal de cadres […] et l’A.G.E.L. a fournit des responsables ˆ l’U.E.C. ". Une interdŽpendance se fait donc entre l’U.E.C. et l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Elle se renforce encore davantage avec la participation de droit du prŽsident d’A.G.E. au bureau de ville de l’U.E.C.. Cette pratique s’Žrige pratiquement en tradition, puisqu’elle est confirmŽe sur toute la pŽriode 1971-1994, mais en particulier pour toutes les annŽes 70. Cependant, tre membre ne signifie pas siŽger. Il semble que, dans un souci de sŽparation des activitŽs syndicales et politiques, de nombreux prŽsidents ne sigent pas ou peu : " C’Žtait le cas […]. Je suis arrivŽ, on m’a dit que c’Žtait comme cela, que ca se faisait. Alors j’ai fait comme cela, mais bon, je n’ai jamais ŽtŽ trs actif. J’Žtais prŽsent rŽgulirement, mais je n’Žtais pas trs actif, ni trs talentueux, parce que je ne mettais pas beaucoup de bonne volontŽ !. […] Ce n’est pas la conviction qui me manquait, mais je trouvais qu’il ne fallait pas mŽlanger les " crŽmeries " ".

    De 1971 ˆ 1994, l’U.E.C. demeure la seule organisation politique dans l’A.G.E.L-U.N.E.F., aprs l’effacement progressif des organisations de la gauche non- communiste. Sa prŽsence se traduit par des double- appartenances, par la prŽsence du prŽsident de l’A.G.E.L-U.N.E.F. au bureau de ville de l’U.E.C., par le partage d’un mme noyau militant. Toutefois, durant cette pŽriode, les relations entre les deux organisations sont difficiles ˆ dŽfinir. Une interaction existe, Žvidente, mais l’image traditionnelle d’une A.G.E.L-U.N.E.F. communiste est peu crŽdible et la plupart des adhŽrents ne sont inscrits ˆ aucun parti politique. De fait, l’U.E.C. possde sur l’A.G.E.L-U.N.E.F. une influence indŽniable. Cependant, elle varie selon l’Žtat de l’U.N.E.F. : plus l’U.N.E.F. est puissante, plus elle devient autonome. Plus l’U.N.E.F. est faible et plus son cercle militant se confond avec celui de l’U.E.C., d’o un surcro”t de l’influence communiste.

  3. L’A.G.E.L-U.N.E.F. et les partis de gauche : de l’engagement ˆ la distanciation.
  1. Le choix de l’alternance : l’engagement en faveur du programme commun de la gauche : 1972-1981.
  2. L’A.G.E.L-U.N.E.F., ds le congrs de 1971, s’oppose profondŽment ˆ la politique universitaire des gouvernements successifs issus de la majoritŽ de droite de l’AssemblŽe Nationale.

    L’U.N.E.F. des annŽes 50 pouvait peser, au moins en apparence, sur les dŽbats parlementaires et parfois imposer ses vues par la concertation. Ainsi, en mars 1948, elle pse considŽrablement, sans pour autant imposer ses vues, sur le contenu du dŽcret Capitant instaurant les premires Žlections universitaires.

    L’U.N.E.F. des annŽes 70 ne dispose pas des moyens humains, du prestige, des relais politiques nŽcessaires pour influer sur la politique universitaire, tant au niveau national que local. De plus, les autoritŽs politiques et universitaires se refusent ˆ tout dialogue ou concertation avec l’U.N.E.F.. Face ˆ cette impasse politique, l’U.N.E.F. opte rapidement pour le choix de l’alternance politique, c’est ˆ dire pour l’engagement en faveur du programme commun de la gauche.

    DŽs le 20 juillet 1972, l’A.G.E.L-U.N.E.F. rencontre le P.C.F. pour Žvoquer le programme commun de la gauche. Dans le compte- rendu, les dŽlŽguŽs de l’A.G.E.L-U.N.E.F. Žvoquent des points positifs : la volontŽ de rŽduire la " sŽgrŽgation sociale " par la gratuitŽ des Žtudes…, la prioritŽ ˆ l’emploi et la dŽfense des conditions de vie. Les grandes prioritŽs sont largement approuvŽes. La satisfaction de l’A.G.E.L-U.N.E.F. vis ˆ vis de la signature du programme commun n’est pas une exception. Au contraire, elle est largement partagŽe par l’ensemble, ou presque, du syndicalisme franais et le programme commun appara”t rapidement comme un espoir intense, un premier pas vers le changement tant espŽrŽ. L’A.G.E.L-U.N.E.F. considre donc le programme commun comme une Žvolution positive, puisque, gr‰ce ˆ lui, des revendications de l’U.N.E.F. devraient aboutir : il " crŽe les conditions pour que les revendications Žtudiantes puissent tre satisfaites ". Il n’est pas un objectif, mais " une arme privilŽgiŽe pour la satisfaction des revendications Žtudiantes ". Mais l’engagement de l’A.G.E.L-U.N.E.F. n’est pas immŽdiat : il fait tout d’abord preuve de prudence avant de s’intensifier. Certes le programme commun de la gauche constitue une avancŽe et offre une perspective nouvelle de voir aboutir les luttes et les solutions que l’U.N.E.F. propose. Mais l’enthousiasme est tempŽrŽ par une prudence. Le Compte- rendu de la rŽunion insiste sur la nŽcessitŽ d’obtenir plus de prŽcisions. De plus, il n’est pas question pour l’A.G.E.L-U.N.E.F. de propager les idŽes du programme commun dans le milieu Žtudiant. L’objectif rŽaffirmŽ demeure la dŽfense des Žtudiants et la satisfaction des revendications. Les propositions du programme commun sont donc pour l’A.G.E.L-U.N.E.F. un moyen de propager et de satisfaire ses revendications. A aucun moment, elles ne deviennent un objectif, une fin en soi. Un changement s’opre avec les Žlections lŽgislatives de mars 1973. En effet, l’A.G.E.L-U.N.E.F. rompt avec l’attentisme et la prudence des mois prŽcŽdents et intervient dans la campagne Žlectorale en appelant ˆ voter pour la gauche : " Pour sortir l’universitŽ de la crise, tout faire pour que la gauche gagne les Žlections ". Le programme commun est dŽsormais considŽrŽ comme un moyen dŽtournŽ pour appliquer les solutions de l’U.N.E.F.. L’intervention de l’A.G.E.L-U.N.E.F. dans la campagne se concrŽtise par des dŽbats dans les T.D. pour expliquer la crŽdibilitŽ du programme commun et des solutions de l’U.N.E.F.. Elle souhaite conscientiser le milieu Žtudiant. Toutefois, ce changement ne se fait pas sans heurts et des discussions ont lieu au sein du syndicat sur l’opportunitŽ de soutenir le programme commun. Le compte- rendu du congrs de l’A.G.E.L-U.N.E.F. des 12 et 13 mai 1973 se fait l’Žcho de ces discussions. Des interventions critiques s’Žlvent contre un engagement trop prononcŽ en faveur du programme commun : discussions insuffisantes au sein de l’A.G.E.L-U.N.E.F. et surtout crainte de voir le programme commun permettre une assimilation U.N.E.F./P.C.F. par les autres syndicats et associations Žtudiantes.La rŽticence ˆ un engagement plus fort s’appuie aussi sur l’accueil des Žtudiants face aux initiatives de l’A.G.E.L-U.N.E.F. durant la campagne des Žlections lŽgislatives. En effet, la rŽaction des Žtudiants appara”t immŽdiatement hostile ou peu favorable. Le C.A I.N.S.A. conclut son intervention sur les dŽbats organisŽs sur les liens entre les solutions de l’U.N.E.F. et le programme commun par : " On se fait sortir ". De plus, l’intervention de l’U.N.E.F. dans la campagne des Žlections lŽgislatives s’est soldŽe par une immense dŽception des adhŽrents devant les rŽsultats. En dŽpit de ces rŽserves, la position de l’A.G.E.L-U.N.E.F. est rŽaffirmŽe quelques mois plus tard ˆ l’occasion des Žlections prŽsidentielles de 1974. L’intervention publique est cette fois le fait du Bureau National, qui publie un tract intitulŽ : " Appel national de l’U.N.E.F. pour les prŽsidentielles ". Le soutien ˆ F. Mitterrand se fait alors dans une logique unitaire : il est soutenu par l’ensemble des partis de gauche, la plupart des centrales syndicales, le P.S.U.… . Au niveau local, l’intervention de l’A.G.E.L-U.N.E.F. est plus modŽrŽe, discrte : " L’U.N.E.F. nationale prenait toujours position dans les grandes batailles politiques. Elle disait qu’aprs avoir rencontrŽ tous les candidats, ce qui n’Žtait pas forcŽment vrai, elle avait jugŽ un tel plus sensible au projet d’Allocation d’Etudes etc.… . […] Localement, ce ne se traduisait jamais par des interventions. Celle du Bureau National suffisait et on ne faisait rien d’autre ". L’intervention de l’A.G.E.L-U.N.E.F. semble se rŽsumer ˆ un message de soutien ˆ voter pour F. Mitterrand lors d’un meeting de l’ensemble des partis de gauche ˆ Gerland.

    A partir du milieu des annŽes 70, l’implication de l’A.G.E.L-U.N.E.F. vis ˆ vis du programme commun de la gauche devient moindre . Lors des Žlections lŽgislatives de 1978, son intervention est quasiment nulle. La dŽgradation des relations P.S- P.C.F. ˆ partir d’octobre 1976 et une certaine lassitude dŽtournent sans doute l’U.N.E.F. du programme commun. Ce dŽsintŽrt croissant se renforce au fil du temps. Sa rupture en 1978 n’engendre pas de difficultŽs internes, exceptŽs sans doute de nombreuses dŽsillusions et dŽcouragements.

    Le dŽnouement logique de cet engagement est la victoire de F. Mitterrand ˆ l’Žlection prŽsidentielle le 10 mai 1981. Elle crŽe pour l’A.G.E.L-U.N.E.F. un nouveau contexte susceptible de faire aboutir ses revendications. DŽs lors, elle soutient la politique universitaire menŽe par le nouveau gouvernement. C’est le cas du projet de loi sur l’Enseignement SupŽrieur en mai 1983.

  3. Une prise de distance progressive vis ˆ vis des partis de gauche.

Toutefois, l’A.G.E.L-U.N.E.F. va, durant les annŽes 80 et 90, prendre progressivement davantage de distance vis ˆ vis des partis de gauche et de la politique menŽe par les diffŽrents gouvernements.

Les signes prŽcurseurs de cette distanciation apparaissent dŽs la rentrŽe universitaire 1983-1984. En effet, en novembre 1983, les adhŽrents de l’A.G.E.L-U.N.E.F. organisent une journŽe de boycott des restaurants universitaires, afin de protester contre l’augmentation du prix du ticket de R.U de 6,15 francs ˆ 8,00 francs. Mais les critiques demeurent mesurŽes. En dŽpit du dŽpart des ministres communistes du gouvernement le 19 juillet 1984 (avec le gouvernement Fabius), elle demeure modŽrŽe dans ses revendications et ses critiques envers la politique universitaire du pouvoir. Tout comme le tournant de la rigueur de 1983 (un plan de rigueur Žconomique est annoncŽ par le gouvernement Mauroy le 25 mars 1983), la crise politique de juillet 1984 engendre peu de rŽpercussions au niveau local. Elles se produisent surtout au Bureau National o sigent encore quelques socialistes. D’ailleurs, dans un article de l’HumanitŽ du 27 septembre 1984, l’A.G.E.L-U.N.E.F., par la voix de son prŽsident, rŽaffirme son soutien ˆ la rŽforme de l’Enseignement SupŽrieur : " Nous l’avons voulue, nous y avons travaillŽ, nous en avons dŽbattu avec les Žtudiants, nous avons obtenu qu’elle soit votŽe ". Seules quelques petites rŽserves sont exprimŽes vis ˆ vis des moyens allouŽs, tandis qu’une rŽforme des œuvres universitaires est ardemment souhaitŽe.

En fait, le tournant semble se situer ˆ la fin de l’annŽe universitaire 1984-1985. L’attitude de l’A.G.E.L-U.N.E.F. se radicalise et s’oppose ouvertement ˆ la politique universitaire du gouvernement. Les dŽsaccords portent sur la mise en place des nouvelles structures de l’UniversitŽ et sur l’augmentation des droits d’inscription. Pour l’A.G.E.L-U.N.E.F., les nouveaux projets du gouvernement, ŽlaborŽs sans concertation, visent ˆ crŽer une UniversitŽ ˆ deux vitesses : une universitŽ d’Žlite ˆ forts moyens et une UniversitŽ de masse. Dans le mme temps, le ministre de l’Education Nationale, Mr J.P.ChevŽnement, annonce une augmentation de 33 % des droits d’inscription et des droits pour la sŽcuritŽ sociale Žtudiante. Les critiques ne sont plus voilŽes et l’A.G.E.L-U.N.E.F. accuse le gouvernement de suivre la mme politique que les anciens gouvernements de droite : crŽation d’universitŽs concurrentielles et ˆ double vitesses, renforcement de la sŽlection et absence totale de concertation. Les causes de ce changement sont multiples. La nouvelle orientation politique, Žconomique et sociale du gouvernement joue un r™le majeur. L’adoption et l’application d’une politique de rigueur au printemps 1983 a mis fin aux illusions sur un mutation possible de l’UniversitŽ, sur la prise en compte des solutions de l’U.N.E.F., qui nŽcessitent un rŽengagement financier de l’Etat. Les nouvelles mesures du gouvernement heurtent de plein front l’U.N.E.F.. L’accumulation des hausses diverses en 1984 (augmentation de cinquante centimes du prix du ticket de R.U, des loyers des chambres des citŽs universitaires de 5 %), sans rŽaction de la part du syndicat Žtudiant, a sans doute contribuŽ ˆ une sorte de " ras le bol ". Enfin, le dŽpart des ministres communistes du gouvernement entra”ne probablement une attitude plus critique des actes du gouvernement chez les militants de l’U.E.C..

Par la suite, l’A.G.E.L-U.N.E.F. n’intervient pratiquement plus dans le domaine politique. Cependant, des prises de position internes ˆ l’organisation sont dŽcidŽes. En aout-septembre 1992, le Bureau National de l’U.N.E.F. explique ˆ ses adhŽrents les raisons de voter non au referundum sur le traitŽ de Maastricht : " On ne l’a pas rendu publique. J’ai reu un exemplaire, mais je ne sais pas si tout le monde en a reu. Il demandait de ne pas voter pour le traitŽ de Maastricht. Enfin, non, il ne demandait pas, il disait pourquoi il ne fallait pas voter pour Maastricht, ce qui n’est pas tout ˆ fait pareil ". Mais pour les Žlections, ni l’U.N.E.F., ni l’A.G.E.L-U.N.E.F. n’appellent ˆ voter pour tel ou tel candidat. Son discours abandonne toute rŽfŽrence ˆ une solution politique, les contacts mme avec les partis politiques s’espacent et se rarŽfient. Elle abandonne tout projet global pour l’UniversitŽ et tente de coller au mouvement Žtudiant : opposition au projet Devaquet, ˆ la guerre du golfe, au projet Jospin, au CIP… .


III. La dŽnonciation des autres associations et syndicats Žtudiants comme rŽponse ˆ l’Žclatement de la reprŽsentation Žtudiante.

La rupture de la reprŽsentation syndicale unique des Žtudiants se produit ds 1961 avec la scission de la F.N.E.F., soutenue par le pouvoir gaulliste. Cependant, la F.N.E.F. ne parvient pas ˆ s’imposer au niveau national et au niveau local. A Lyon, sa branche, la F.G.E.L. (FŽdŽration GŽnŽrale des Etudiants Lyonnais) vŽgte et l’U.N.E.F. garde une position largement prŽdominante. La scission de 1971, entre l’U.N.E.F.- Renouveau et l’U.N.E.F.- UnitŽ Syndicale, met, relativement, un terme ˆ une pŽriode d’Žmiettement de la reprŽsentation syndicale Žtudiante. DŽsormais, une concurrence entre une multitude d’associations et de syndicats existe sur les campus. Face ˆ cette situation, l’A.G.E.L-U.N.E.F. pratique une politique de dŽnonciation vis ˆ vis des autres organisations et se considre comme le seul syndicat Žtudiant, hŽritier de la " grande UNEF ".

  1. L’A.G.E.L-U.N.E.F., seul syndicat opposŽ ˆ la politique universitaire du pouvoir.
  2. L’A.G.E.L-U.N.E.F. se prŽsente, surtout de 1971 ˆ 1981, comme le seul syndicat rŽsolument opposŽ ˆ la politique universitaire menŽe par le gouvernement. Seul syndicat ˆ dŽfendre les intŽrts des Žtudiants, elle se prŽsente comme le seul rempart contre les diverses attaques des secrŽtaires d’Etat aux universitŽs des gouvernements de droite. Ainsi, lors des Žlections au Conseil d’Administration du C.R.O.U.S. en 1977, l’A.G.E.L-U.N.E.F. prŽsente un bilan de ses actions, bien que sa liste ait ŽtŽ invalidŽe aux Žlections de 1975 : grve des loyers des citŽs universitaires de Jussieu, Puvis de Chavannes, Monod, Centrale ˆ l’appel de la F.R.U.F. et de l’U.G.E. ˆ l’automne 1975, rejet de l’augmentation du prix du ticket de R.U en juin 1976 lors d’une rŽunion du Conseil National des Œuvres, lutte commune A.G.E.L-U.N.E.F./U.N.E.M. contre les expulsions d’Žtudiants marocains des citŽs universitaires….

    A l’inverse, les autres associations et syndicats Žtudiants sont dŽnoncŽs comme des alliŽs objectifs du gouvernement : " Leurs programmes, c’est pour les uns la copie conforme de celui de Saunier, pour les autres une mauvaise copie de celui de l’U.N.E.F., la F.R.U.F. et l’U.G.E.. Leur raison d’tre : permettre l’application des plans de Saunier. Sinon, d’ailleurs, comment mŽriteraient-ils les subventions dont les arrose Alice, et que celle-ci refuse ˆ l’U.N.E.F., tentant d’Žtouffer les luttes ". Toutes les associations sont visŽes, quelle que soit leur sensibilitŽ politique. Les Žlections Žtudiantes sont les moments privilŽgiŽs pour critiquer les autres listes. Ainsi, lors des Žlections au Conseil d’Administration du C.R.O.U.S. de Lyon- Saint Etienne en 1979, aucune liste n’est ŽpargnŽe : le C.L.E.F. est " un syndicat Žtudiant giscardo-politique dirigŽ par Saunier SeitŽ ", la CERRA est considŽrŽe comme un mŽlange de " CORPO plus U.N.I., ou l’art d’associer la carotte et le b‰ton ", le MAS est traitŽ avec ironie et condescendance : " ou du moins ce qu’il en reste. Trop occupŽs dans leurs querelles de tendances, ils n’ont pas le temps de s’intŽresser aux problmes des Žtudiants. A Lyon, ils avaient un Žlu au C.R.O.U.S. : il n’a sans doute pas retrouvŽ son courant. O est-il ? Lanons un avis de recherche… ". Mais la cible principale de l’A.G.E.L-U.N.E.F. demeure l’U.N.E.F-UnitŽ Syndicale, auquel elle dŽnie le droit de porter le sigle U.N.E.F.  : " ils vous trompent en usurpant le sigle de l’UNEF ". Ils sont le plus souvent qualifiŽs d’A.J.S. (UnitŽ Syndicale) – F.E.R.U.F.. En dŽpit de ses attaches trotskistes, l’A.G.E.L-U.N.E.F. classe l’U.N.E.F-UnitŽ Syndicale parmi les alliŽs de Saunier SeitŽ. Ainsi, le boycott pr™nŽ par l’U.N.E.F-UnitŽ Syndicale laisse, selon l’A.G.E.L-U.N.E.F., les mains libres au gouvernement dans les conseils d’administration…. Le corporatisme et le gauchisme sont relŽguŽs au rang des alliŽs objectifs de Saunier SeitŽ. Ainsi, le corporatisme est dŽfini comme une association d’Žtudiants aisŽs, organisant des distractions et ayant pour objectif de faciliter l’application des mesures gouvernementales. Si les corpos sont critiquŽes pour avoir une vision trop Žtroite et locale des problmes, l’U.N.E.F-UnitŽ Syndicale est au contraire accusŽe de faire passer ses objectifs politiques avant les intŽrts des Žtudiants.

    L’A.G.E.L-U.N.E.F. tente d’appara”tre comme le seul vŽritable syndicat Žtudiant, puisque tous les autres sont cataloguŽs dans le groupe des alliŽs du gouvernement. Elle souhaite ainsi se prŽsenter comme le seul p™le possible de ralliement pour les Žtudiants opposŽs aux mesures gouvernementales, et se pose en recours face aux " diviseurs ". L’unicitŽ de la reprŽsentation syndicale des Žtudiants n’est pas brisŽe, puisqu’une seule organisation dŽfend les intŽrts des Žtudiants : l’U.N.E.F..

  3. Eviter le plus possible l’unitŽ d’action.

L’unitŽ d’action, c’est ˆ dire la recherche d’un consensus d’une majoritŽ d’organisations syndicales sur un problme et la faon de le rŽsoudre, est depuis dŽjˆ quelques dŽcennies une pratique fortement implantŽe parmi les syndicats de salariŽs. (C.G.T., C.F.D.T., C.G.T- F.O., C.F.T.C…). Mme au niveau local, la pratique est courante : dans l’Isre, une grve aux Žtablissements Merlin- GŽrin se dŽroule du 19 octobre au 6 novembre 1979 gr‰ce ˆ une unitŽ d’action entre la C.F.D.T., la C.G.T ;, la C.G.T- F.O.. En milieu Žtudiant, la situation est radicalement diffŽrente, mme si une Žvolution se fait jour. En effet, Žviter le plus possible l’unitŽ d’action est, sans tre une prŽoccupation constante, un rŽflexe naturel.

Les causes sont multiples et trouvent leurs racines dans le passŽ et dans le prŽsent.

Le poids du passŽ dans le syndicalisme Žtudiant gne considŽrablement une Žvolution favorable ˆ l’unitŽ d’action. Il pse principalement sur les relations entre l’A.G.E.L-U.N.E.F. et l’U.G.E.L-U.N.E.F.. Dans les annŽes 50 surtout, la reprŽsentation Žtudiante est unique. C’est le mythe de la " grande U.N.E.F. " des annŽes 50 et 60, capable de rassembler au sein d’une mme organisation la masse des Žtudiants, en dŽpit des diffŽrentes sensibilitŽs politiques. Ce passŽ est ˆ la fois glorieux et mystique : la charte de Grenoble en 1946, la crŽation de la sŽcuritŽ sociale Žtudiante et de la M.N.E.F. en 1948, la premire grve Žtudiante en 1947 pour les bourses et contre les droits d’inscription, la crŽation du projet d’allocation d’Žtudes, les manifestations pour s’opposer ˆ la suppression des sursis Žtudiants puis pour s’opposer ˆ la guerre en AlgŽrie de 1958 ˆ 1961… . Or, les deux syndicats Žtudiants issus de la scission revendiquent ce passŽ. Chacun veut devenir un " syndicat de masse " et ambitionne d’tre la seule et unique U.N.E.F.. Dans ce contexte, l’A.G.E.L-U.N.E.F. se considre comme le seul syndicat Žtudiant : " A l’Žpoque, il n’y avait pas d’unitŽ. Il n’Žtait pas question pour nous d’unitŽ d’action entre les diffŽrentes organisations syndicales Žtudiantes, parce que, pour nous, d’organisation Žtudiante ˆ vocation syndicale, il n’y en avait une seule : la n™tre. C’Žtait aussi l’avis des autres, sauf que c’Žtait la leur. […]. A l’Žpoque, l’idŽe Žtait qu’il y’avait de la place pour tout le monde ˆ l’U.N.E.F., ˆ condition de ne pas crŽer de tendances organisŽes ". De par ses valeurs, ses attitudes, sa composition…, l’A.G.E.L-U.N.E.F. se considre comme la seule organisation syndicale Žtudiante. Puisque tout le monde peut venir ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F., les autres organisations n’ont plus de raisons d’exister… . Revenir ˆ l’unicitŽ du syndicalisme Žtudiant suppose la disparition d’une des deux U.N.E.F. et des autres organisations syndicales, ou la prŽdominance trs forte de l’une des deux. Cette volontŽ se conjugue mal avec l’unitŽ d’action, puisque l’unitŽ d’action ne permet pas de revendiquer ˆ son profit exclusif une lutte auprs des Žtudiants, et donc de rŽcupŽrer les dividendes : influence accrue auprs des Žtudiants, augmentation du nombre des adhŽrents.

Le poids du passŽ se traduit aussi par une haine tenace entre les deux U.N.E.F. : l’A.G.E.L. et l’U.G.E.L.. En effet, un gouffre historique sŽpare les deux branches de l’U.N.E.F. : le souvenir de la scission de 1971. Il perdure dans la mŽmoire du syndicalisme Žtudiant et des militants, et demeure particulirement vif, mme au dŽbut des annŽes 90, c’est ˆ dire prs de 20 ans aprs !. Cette mŽmoire se compose d’une trame chronologique simplifiŽe des ŽvŽnements et surtout de multiples anecdotes opposant les militants de l’A.G.E.L-U.N.E.F. et de l’U.G.E.L-U.N.E.F.. Elle est vŽhiculŽe par les cohabitations entre les strates successives d’adhŽrents et est essentiellement orale. Elle peut remonter parfois fort loin, comme l’affaire des cartes en 1969. En tout cas, elle n’encourage pas l’unitŽ d’action entre les deux organisations : " On avait l’idŽe, une idŽe de violences, surtout de la part de l’U.N.E.F- ID. Je me souviens […]l’U.N.E.F- ID faisait rŽfŽrence au mouvement du 22 mars […] et ˆ la scission de l’U.N.E.F de 1971. Ils avaient…, pour eux, il s’Žtait passŽ quelque chose de violent, et ils perpŽtuaient cette violence. […]. L’U.N.E.F- ID, c’est l’ennemi, mais c’est vraiment considŽrŽ comme l’ennemi. Ce n’est pas l’adversaire, c’est l’ennemi.  ". La haine entre les deux organisations va jusqu’ˆ l’affrontement physique. Ainsi, sous la prŽsidence d’A. Saint- Patrice en 1975-1976 : " Avec l’U.G.E.L-U.N.E.F., on avait viscŽralement une haine absolument fŽroce […]. Les relations Žtaient extrmement tendues. Ils Žtaient […] tabasseurs, on ne l’Žtait pas. On s’est fait taper dessus plusieurs fois. Y compris un camarade handicapŽ dans un fauteuil jetŽ dans les escaliers du deuxime Žtage […]. Des choses vraiment inqualifiables ".

Outre le poids du passŽ, la concurrence exacerbŽe entre les diffŽrentes associations et syndicats Žtudiants nuit ˆ l’unitŽ d’action. Elle n’existe pas seulement dans le monde Žtudiant, mais aussi entre les diffŽrents syndicats ouvriers. Cependant, la culture syndicale du monde ouvrier et salariŽ est de nature diffŽrente : le principe de pluralitŽ de la reprŽsentation des salariŽes est acquise depuis le dŽbut du vingtime sicle avec la scission de la C.G.T. en 1921, la crŽation de la C.F.T.C., des syndicats autonomes… . De plus, les syndicats sont davantage diffŽrenciŽs, car ils sont porteurs de projets ˆ long terme : la C.G.T. souhaitait changer la propriŽtŽ des moyens de production…. Enfin, la maturitŽ du syndicalisme ouvrier est plus grande, plus responsable.

Enfin, une dernire cause rŽside dans la nature mme de l’unitŽ d’action. En effet, elle induit l’idŽe d’une mise en commun des forces pour rŽgler un problme, car, seul, on ne dispose pas des capacitŽs nŽcessaires ˆ sa rŽsolution. Chercher l’unitŽ d’action, c’est pour l’A.G.E.L-U.N.E.F. reconna”tre indirectement son incapacitŽ, sa faiblesse ˆ mener seule des luttes. Or, elle affirme et veut appara”tre comme le seul syndicat Žtudiant, syndicat de masse.

L’unitŽ d’action n’est donc pas, contrairement au syndicalisme ouvrier, un rŽflexe naturel. Au contraire, elle n’est pas recherchŽe par les diffŽrents protagonistes.

La rŽalitŽ diffre cependant : l’unitŽ d’action est souvent imposŽe par les Žtudiants et par les circonstances lors des grands mouvements Žtudiants. Elle se rŽalise, de fait, lors des A.G.. Ouvertes ˆ tous, l’A.G. regroupe les reprŽsentants de toutes les organisations syndicales et politiques du campus. Or, c’est l’A.G. qui, souveraine, dirige le mouvement, au moins en apparence. Par consŽquent, l’unitŽ d’action se rŽalise ˆ travers l’AssemblŽe GŽnŽrale. Les coordinations Žtudiantes, Žlues en A.G., comprennent des reprŽsentants de toutes les organisations et permettent lors d’un mouvement Žtudiant la concrŽtisation de l’unitŽ d’action. Dans les mouvements d’ampleur restreinte, la participation des Žtudiants n’est pas suffisante pour imposer l’unitŽ d’action. Ainsi, en octobre 1975, l’A.G.E.L-U.N.E.F. organise un boycott des restaurants universitaires pour protester contre l’augmentation du prix du ticket de R.U de 25 % par rapport ˆ l’annŽe prŽcŽdente. La participation des Žtudiants, rŽduite au choix de boycotter ou non, permet ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. de garder le contr™le et d’Žviter l’implication des autres syndicats.

Cependant, une Žvolution se dessine ˆ la fin des annŽes 80 dans la considŽration de l’unitŽ d’action par l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Elle n’est pas recherchŽe systŽmatiquement, mais elle a lieu occasionnellement, mme sur des mouvements restreints. Ainsi, ˆ Lyon II, une pŽtition commune A.G.E.L-U.N.E.F./U.G.E.L-U.N.E.F./Žtudiants non- syndiquŽs sur les problmes de budget est mise en circulation en novembre 1988. L’affaiblissement numŽrique des syndicats Žtudiants, et en particulier de l’A.G.E.L-U.N.E.F. devenue groupusculaire en 1988, explique en partie cette Žvolution. L’unitŽ d’action devient une nŽcessitŽ, un gage de rŽussite afin de mener jusqu’au bout une lutte. Dans le mme temps, le monde Žtudiant Žprouve un besoin accru de diversitŽ. De plus, les divergences entre les syndicats Žtudiants, hormis l’U.N.I., s’estompent un peu plus. Des communautŽs de point de vue peuvent s’Žtablir sur des problmes prŽcis, concrets et surtout locaux. L’attŽnuation des diffŽrences a pour origine une resyndicalisation des deux branches de l’U.N.E.F. et l’abandon des discours thŽoriques. L’U.N.E.F., au congrs de Toulouse en 1990, se veut un syndicat proche des Žtudiants, un syndicat plus utile. La nouvelle orientation dŽcide de partir des problmes concrets pour mobiliser les Žtudiants. Elle est donc compatible avec l’unitŽ d’action : la rŽsolution de problmes concrets ne nŽcessite pas l’intervention de thŽories, de projets pour l’UniversitŽ, et ne dŽclenche pas ainsi de clivages thŽoriques. Enfin, des critiques Žmanent des rangs mme des syndicats Žtudiants et pr™nent l’unitŽ d’action sur certains problmes. Le souvenir de la scission de 1971, encore vivace, s’attŽnue tout de mme et l’U.N.E.F- ID, qui passe d’une majoritŽ trotskiste peu engageante ˆ une majoritŽ issue du Parti Socialiste, devient un peu plus frŽquentable. Toutefois, l’unitŽ d’action se heurte toujours ˆ des difficultŽs dans sa rŽalisation : " C’Žtait toujours des problmes. Ne serait- ce que pour rŽdiger un tract, cela prenait des heures. Ou alors, carrŽment, un jour, un tract sort avec le logo de l’A.G.E.L-U.N.E.F., de l’U.N.E.F- ID et de PSA, sans que nous ayons participŽ ˆ la rŽdaction… ". De plus, un certain nombre de divergences d’apprŽciation se maintiennent, comme lors de la rŽforme Jospin en 1991-1992.

3. Trois exceptions : les associations d’Žtudiants Žtrangers, la F.R.U.F. et l’U.G.E..

La recherche de l’unitŽ d’action n’est donc pas un rŽflexe pour l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Pourtant, elle travaille, collabore sur certains problmes avec des associations d’Žtudiants Žtrangers, la F.R.U.F. et l’U.G.E..

  1. Une collaboration avec les associations d’Žtudiants Žtrangers rŽduite ˆ des cas particuliers.
  2. Occasionnellement, une recherche d’unitŽ d’action avec des associations d’Žtudiants Žtrangers se met en place. Elle se fait principalement avec l’Union Nationale des Etudiants Marocains (U.N.E.M.). D’octobre 1976 ˆ dŽcembre 1977, l’A.G.E.L-U.N.E.F. et l’U.N.E.M. mnent des campagnes de protestation contre l’attribution limitŽe de chambres aux Žtudiants Žtrangers dans les citŽs universitaires. Un rassemblement est organisŽ le 28 octobre 1976 et des pŽtitions circulent dans les diffŽrentes universitŽs. La collaboration avec d’autres associations est plus rare. Ainsi, l’U.G.E.L.F. (Union GŽnŽrale des Etudiants Libanais en France) et l’A.E.L. (Association des Etudiants Libanais) soutiennent la liste Cerra aux Žlections au C.A. du C.R.O.U.S. de 1979. Cependant, un collectif, comprenant l’A.G.E.L-U.N.E.F., l’U.G.E., l’U.N.E.M. et l’U.G.E.L.F., est crŽe en janvier 1980, afin de lutter contre le dŽcret du 31 dŽcembre 1979. Ce dŽcret renforce la sŽlection des Žtudiants Žtrangers dŽsirant effectuer des Žtudes universitaires en France : il instaure un examen de franais, une commission nationale pour choisir les admis…. Le collectif revendique donc l’abrogation du dŽcret. Des actions communes se dŽroulent sur des questions concernant directement les Žtudiants Žtrangers.

    Cependant, elles demeurent assez rares et ne sortent jamais de cet Žtroit domaine de compŽtence. De plus, l’A.G.E.L-U.N.E.F. tente rŽgulirement d’Žviter toute collaboration et d’intŽgrer les questions touchant les Žtudiants Žtrangers ˆ sa dŽmarche. Ainsi, en octobre- novembre 1977, l’A.G.E.L-U.N.E.F. lance des ComitŽs de DŽfense des Etudiants Etrangers. CrŽes par des Žtudiants Žtrangers, ils sont ouverts ˆ tous les Žtudiants, ont une activitŽ de rŽflexion et surtout d’action. En effet, ils portent de nombreuses revendications : attribution effective de toutes les chambres libres dans les citŽs universitaires, suppression des quotas d’Žtrangers dans les citŽs, possibilitŽ pour les Žtudiants Žtrangers de loger dans les foyers Sonacotra au tarif du C.R.O.U.S., construction d’une citŽ universitaire ˆ Bron et reconstruction du b‰timent B de l’I.N.S.A.. En avril 1979, l’A.G.E.L-U.N.E.F. soutient la plainte d’un Žtudiant tunisien contre la circulaire Bonnet. Dans toutes ces initiatives, elle agit seule, sans rechercher l’unitŽ d’action avec les associations d’Žtudiants Žtrangers. Il ne s’agit donc ici que d’une collaboration rŽduite et ponctuelle.

  3. Les associations Žtroitement liŽes ˆ l’U.N.E.F. : la F.R.U.F. et l’U.G.E..

Une vŽritable unitŽ d’action se rŽalise entre l’U.N.E.F., la FRUF et l’U.G.E.. Cependant, ces associations sont Žtroitement liŽes ˆ l’U.N.E.F., et ne disposent pas de vŽritable existence propre, ou du moins de structures totalement indŽpendantes.

L’U.G.E., c’est ˆ dire l’Union des Grandes Ecoles, est le syndicat des Žlves en grandes Žcoles. Elle est traditionnellement proche de l’U.N.E.F. depuis sa fondation. Elle devient trs rapidement proche de la tendance Renouveau : " On Žtait ˆ c™tŽ de la rue d’Aboukir o se trouvait le sige […] de l’U.G.E.. Elle a ŽtŽ, dŽs le dŽbut, trs proche. L’U.G.E. a toujours existŽe en tant que tel ˆ l’Žpoque, a toujours eu son propre fonctionnement, et elle Žtait du c™tŽ de l’U.N.E.F- renouveau dŽs le dŽbut ". L’U.G.E. est donc acquise au renouveau bien avant la scission de 1971. Sa situation ˆ Lyon ,aprs 1971, est un peu particulire. ThŽoriquement, elle regroupe les Žlves de l’I.N.S.A., des classes prŽparatoires, des diverses grandes Žcoles : architecture, centrale… . Dans la rŽalitŽ, la situation est plus compliquŽe. L’I.N.S.A. constitue ˆ Lyon la seule implantation stable de l’U.G.E., mme si des structures ŽphŽmres naissent comme ˆ Centrale, dans certaines prŽpas… . Des structures composites ont mme vu le jour, mŽlanges d’U.N.E.F. et d’U.G.E.. Ainsi, en 1972, un comitŽ U.N.E.F-U.G.E., distinct de l’A.G.E.L-U.N.E.F., existe ˆ l’Žcole vŽtŽrinaire de Lyon. En fait, l’U.G.E. possde, peut- tre jusqu’au milieu des annŽes 70 environ (1976 ou 1977), ses propres structures ˆ Lyon : " A l’I.N.S.A.. Il y’avait une autonomie de l’U.N.E.F. et de l’U.G.E. […]. C’Žtait une autre particularitŽ locale, qui fait que les relations entre l’U.N.E.F. et l’U.G.E. Žtaient trs complices. Lyon Žtait une des rares A.G.E., o, pendant un temps, le prŽsident de l’A.G.E.L-U.N.E.F. Žtait de l’U.G.E.. Ainsi, B. Fiat par exemple… . Cela aurait ŽtŽ exclu ˆ Toulouse ou ailleurs… […], mais l’U.G.E. a ses propres structures ". Elle dispose de son propre collectif de ville, de son propre bureau de ville… . Cependant, des Žcoles lui Žchappent au profit de l’A.G.E.L-U.N.E.F., comme l’Žcole d’architecture. De plus, une interaction trs forte se dŽveloppe entre l’U.N.E.F. et l’U.G.E. ˆ Lyon. DŽs les premiers mois du renouveau ˆ Lyon, l’I.N.S.A. est entirement acquise ˆ l’U.N.E.F- Renouveau et aide considŽrablement les autres implantations gr‰ce ˆ ses RonŽos, ses fortes capacitŽs militantes (et parfois physiques avec notamment son Žquipe de rugby, utile comme service d’ordre…)…. Par la suite, une fois le renouveau achevŽ, un responsable de l’I.N.S.A. sige au bureau de l’A.G.E.L-U.N.E.F., et plusieurs prŽsidents d’A.G.E. sont issus de l’I.N.S.A., et donc de l’U.G.E. : B. Fiat, A. Saint- Patrice… . Il s’agit vŽritablement d’une exception ou d’un cas rarissime en France. Logiquement, l’U.G.E. est associŽe assez souvent aux actions de l’A.G.E.L-U.N.E.F.. En mars 1973, l’U.G.E. appelle ˆ manifester contre la suppression des sursis militaires aux c™tŽs de l’A.G.E.L-U.N.E.F., du M.J.C.F., de l’UD- C.A.L., et du CDJ- C.G.T.. En octobre 1976, elle participe ˆ l’action commune UGICT- C.G.T., A.G.E.L-U.N.E.F. sur le ch™mage des jeunes. Cependant, elle mne peu, et peut-tre jamais, de luttes seule et n’appara”t jamais distinctement de l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Sans doute existe t’il une forte confusion entre l’A.G.E.L-U.N.E.F. et l’U.G.E. : l’U.G.E. possde ses propres structures, mais sa principale implantation, l’I.N.S.A., est trs fortement intŽgrŽe ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F.. L’U.G.E. semble dispara”tre aprs 1976. En effet, elle n’appara”t pas lors de la lutte contre la rŽforme Haby dans les grandes Žcoles en 1977. La lutte, au lycŽe du Parc, est conduite par un comitŽ U.N.E.F. et non U.G.E., tandis que des candidats U.N.E.F. se prŽsentent aux postes de dŽlŽguŽs de classe.Son implantation ne dispara”t pourtant pas : des comitŽs U.N.E.F. prennent la relve dans les prŽpas, ˆ l’I.N.S.A.… . Sans doute, l’U.G.E. s’est elle fondue, intŽgrŽe ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F.. L’A.G.E.L-U.N.E.F. se contente ensuite de gŽrer le sigle UGE. Il appara”t rŽgulirement lors des Žlections Žtudiantes, comme pour le C.A. du C.R.O.U.S…. .

Les relations avec la F.R.U.F. sont diffŽrentes, en particulier avant 1975. Avant 1975, et sa scission, l’implantation de la F.R.U.F. ˆ Lyon est relativement consŽquente. En 1973, elle est prŽsente dans la plupart des citŽs universitaires de Lyon : Allix avec l’AERUAA- FRUF, Jussieu et Puvis de Chavannes avec l’AERU- FRUF. Les relations entre l’U.N.E.F.- renouveau (puis l’A.G.E.L-U.N.E.F.) et la F.R.U.F. varient selon les implantations. Ainsi, elles semblent particulirement difficiles avec l’AERUAA- FRUF, probablement aux mains de l’A.J.S. ou du P.S.U.. La liste du bureau sortant se livre, dans sa profession de foi, ˆ une violente critique de la position de l’U.N.E.F- renouveau vis ˆ vis de la cogestion : " participation stupide et stŽrile ", " cautionner la politique du gouvernement ", " illusion ". Elle s’oppose aussi au bureau national de la F.R.U.F. acquis ˆ l’U.N.E.F- renouveau et ˆ la signature par ce mme B.N. du programme commun de la gauche. La F.R.U.F. possde alors ses propres structures ˆ Lyon et est, de fait, strictement indŽpendante de l’A.G.E.L-U.N.E.F.. IndŽpendance rŽaffirmŽe lors du quatrime congrs de la F.R.U.F. et lors d’une rencontre entre la F.R.U.F. et l’A.G.E.L-U.N.E.F. en fŽvrier 1972. Les relations sont assez l‰ches et peu chaleureuses. Le rapprochement entre l’U.N.E.F. et la F.R.U.F. se fait au niveau national et non local. Cependant la tiŽdeur, et parfois l’hostilitŽ, des relations ne gne pas un travail en commun entre les deux organisations. Des rencontres entre les bureaux de la F.R.U.F. et de l’A.G.E.L-U.N.E.F. ont lieu ˆ partir de dŽcembre 1971. Elles sont l’occasion de prŽparer des actions communes sur certaines questions, mais uniquement dans le domaine du C.R.O.U.S.. Une pŽtition sur les conditions de vie est ŽlaborŽe en dŽcembre 1971, une action sur les restaurants universitaires est envisagŽe en mars 1972… . L’unitŽ d’action avec la F.R.U.F. se rŽalise, mais les relations entre les deux organisations demeurent tendues, en particulier avec l’AERUUA- FRUF. TiraillŽe entre deux tendances, la F.R.U.F. Žclate en 1975. Les adhŽrents proches de l’U.N.E.F- UnitŽ Syndicale scissionnent et crŽent la F.E.R.U.F.. A cette occasion, la F.R.U.F. perd ˆ Lyon la plupart de ses implantations. Elle est, en 1975, prŽsente dans une citŽ universitaire sur huit. En 1981, elle demeure implantŽe ˆ Mermoz, puis dispara”t au cours des annŽes 80. La scission de 1975 rapproche la F.R.U.F. de l’U.N.E.F.. Concrtement, cela se traduit de deux faons. Tout d’abord, une liste commune U.N.E.F-F.R.U.F-U.G.E. est systŽmatiquement prŽsentŽe aux Žlections au C.A. du C.R.O.U.S.. Ensuite, l’A.G.E.L-U.N.E.F. s’immisce toujours davantage dans la F.R.U.F.. A plusieurs reprises, le B.N. de l’U.N.E.F. demande ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F. de reconstruire et de dŽvelopper la F.R.U.F. ˆ Lyon, c’est ˆ dire d’investir des militants. C’est le cas en 1975. En 1981, la F.R.U.F. est recrŽe ˆ partir de militants de l’A.G.E.L-U.N.E.F.. Elle se dŽveloppe ˆ nouveau et s’implante dans quelques citŽs universitaires : Mermoz, Allix et Puvis de Chavannes. Elle est alors capable d’impulser des luttes, comme la rŽtention des loyers ˆ Mermoz en mars 1981. Cependant, l’Ždifice demeure fragile, en particulier ˆ cause du renouvellement rapide des adhŽrents. En 1984- 1985, un nouvel effort doit tre entrepris : la F.R.U.F. s’implante ˆ Saint- IrŽnŽe et ˆ Puvis de Chavannes. Chaque nouvelle implantation nŽcessite un travail de fond : porte ˆ porte, prŽsence lors des Žlections… . A la fin des annŽes 80, la F.R.U.F. dispara”t dŽfinitivement et l’A.G.E.L-U.N.E.F. se contente de gŽrer le sigle F.R.U.F. pour les Žlections au C.A. du C.R.O.U.S.

 


En dŽpit des apparences, les archives de l’A.G.E.L-U.N.E.F. regorgent de courriers provenant d’associations diverses et de syndicats, l’A.G.E.L-U.N.E.F. est peu intŽgrŽe au tissu syndical, politique et associatif.

En effet, la politique de l’A.G.E.L-U.N.E.F. vis ˆ vis des autres organisations est profondŽment marquŽe par trois caractŽristiques : irrŽgularitŽ dans les relations, prudence dans les engagements, politiques en particulier, et rejet de l’unitŽ d’action avec la plupart des associations et syndicats Žtudiants.

Elle dŽveloppe des relations sans exclusivitŽ, mais se heurte rapidement ˆ l’anticommunisme de plusieurs centrales syndicales comme la F.E.N., la C.F.D.T., la C.G.T-F.O.. Elle se tourne donc essentiellement vers des syndicats dits de " sensibilitŽ communiste ", c’est ˆ dire la C.G.T., le S.N.E.Sup.. Les relations sont assez distantes et se dŽroulent la plupart du temps de manire informelle, par l’intermŽdiaire des militants ou des Žlus dans les conseils.

Vis ˆ vis du tissu politique lyonnais, l’A.G.E.L-U.N.E.F. dŽveloppe trs peu de relations officielles ou suivis avec les partis de gauche. Elles sont plus complexes avec l’Union des Etudiants Communistes, puisqu’elles partagent en commun un mme noyau militant. En dŽpit du reproche traditionnel des Žtudiants sur la politisation excessive des syndicats Žtudiants, l’engagement de l’A.G.E.L-U.N.E.F. dans le domaine politique demeure trs faible. Au final, l’A.G.E.L-U.N.E.F. est un syndicat isolŽ dans le paysage politique, syndical et associatif lyonnais.

 


CONCLUSION

La recomposition de l’U.N.E.F ˆ Lyon se concrŽtise, en 1971, par la cohabitation de trois organisations : l’A.G.E.L-U.N.E.F issue de l’U.N.E.F-Renouveau, l’U.G.E.L-U.N.E.F-UnitŽ Syndicale et l’A.G.E.L dŽtenue par le P.S.U. La naissance de l’A.G.E.L-U.N.E.F en 1971 a lieu dans des conditions particulires et originales. Organisation indŽpendante dŽs mai 1969, la crŽation de l’U.N.E.F-Renouveau ˆ Lyon est une fondation et non une scission : elle est affiliŽe ˆ l’U.N.E.F par l’intermŽdiaire de la tendance Renouveau, mais rejette catŽgoriquement toute relation avec l’A.G.E.L. Le r™le de l’U.G.E et de l’U.E.C semblent assez particuliers. Si l’U.G.E s’implique totalement dans le renouveau de l’U.N.E.F ˆ Lyon au point de dŽlaisser quelque peu ses propres structures, l’implication de l’U.E.C est moindre et le renouveau ne se rŽduit pas au seul cercle des militants communistes. Contrairement ˆ beaucoup d’autres A.G.E, des bases syndicales se redŽveloppent hors de l’U.E.C.

L’Žvolution de l’A.G.E.L-U.N.E.F est Žtroitement liŽe au milieu Žtudiant et au contexte universitaire. Or, le contexte Žtudiant et universitaire n’est pas favorable au syndicalisme Žtudiant. Certes, sous l’effet de la " massification " de l’Enseignement SupŽrieur et de l’UniversitŽ en particulier (l’UniversitŽ de Lyon double de volume et passe de 57 000 Žtudiants en 1976 ˆ 110 000 en 1994), de trs nombreux mouvements Žtudiants, tant nationaux que locaux, se dŽveloppent en prenant pour cibles les rŽformes successives des secrŽtaires d’Etat aux universitŽs. Mais le dŽplacement des thmes mobilisateurs, l’apparition de nouvelles formes d’organisation… ne sont pas favorables ˆ l’Žmergence d’un syndicat Žtudiant puissant capable de rassembler les Žtudiants et de conduire les luttes revendicatives. L’A.G.E.L-U.N.E.F trouve trs rapidement sa place au sein du mouvement Žtudiant, mais elle doit composer dŽsormais avec d’autres organisations.

De 1971 ˆ 1994, l’A.G.E.L-U.N.E.F dŽveloppe un syndicalisme Žtudiant original et qui ne se retrouve, encore faudrait-il le vŽrifier, que dans certaines grandes A.G.E, comme Toulouse par exemple. La reconstruction d’un syndicat Žtudiant puissant ˆ Lyon s’inscrit ˆ la fois en continuitŽ et en rupture avec le passŽ incarnŽ par la mythique " grande U.N.E.F " et qui ne cesse de hanter les esprits.

La continuitŽ s’incarne particulirement ˆ travers la volontŽ de l’A.G.E.L-U.N.E.F, et surtout la conviction, d’tre le seul vŽritable syndicat ˆ dŽfendre les intŽrts des Žtudiants. Peu impliquŽe dans le tissu syndical, politique et associatif lyonnais, elle rŽagit ˆ l’Žclatement de la reprŽsentation Žtudiante en dŽnonant la collusion entre le pouvoir et les autres associations Žtudiantes, et en refusant, autant que possible, l’unitŽ d’action. Indiscutablement, l’A.G.E.L-U.N.E.F s’inscrit dans une vision du mouvement Žtudiant antŽrieure ˆ la scission et rŽsumŽe par le Figaro en 1956 : l’U.N.E.F, " grand syndicat unique de la classe Žtudiante ".

ContinuitŽ encore avec la synthse ŽbauchŽe ˆ partir de 1976 et rŽalisŽe en 1979 en conciliant " au mieux un syndicalisme de revendication et de nŽgociation avec la nŽcessitŽ de rendre des services aux Žtudiants ". En effet, avec la crŽation du CERCOOPE, l’A.G.E.L-U.N.E.F s’engage rŽsolument dans la voie de la reconstruction d’une Žconomie sociale Žtudiante en dŽlivrant de multiples services aux Žtudiants de Lyon, mais aussi de Saint-Etienne, de Grenoble, de Besanon et de Dijon. Dans le mme temps, elle conserve son caractre revendicatif et profite du changement de gouvernement en 1981 pour entamer des nŽgociations sur l’avenir de l’UniversitŽ.

ContinuitŽ enfin dans le r™le de socialisation et de formation jouŽ dans la carrire professionnelle des anciens militants de l’A.G.E.L-U.N.E.F. En effet, le syndicat Žtudiant lyonnais est ˆ la fois le lieu de nouveaux engagements politiques, en particulier communistes, et le lieu de l’acquisition d’un vŽcu essentiel dans la socialisation et la formation des militants.

Cependant, l’A.G.E.L-U.N.E.F n’est pas une copie, une reproduction ˆ l’identique du passŽ ? Au contraire, des ruptures profondes existent et donnent un nouveau visage ˆ l’organisation Žtudiante. La principale rupture est l’instabilitŽ de l’A.G.E.L-U.N.E.F durant toute cette pŽriode. En effet, et contrairement aux annŽes 50 et 60, une instabilitŽ permanente existe et se concentre sur l’organisation, sur les structures. Elle s’exprime tout d’abord dans le caractre alŽatoire et chaotique de l’implantation. les effectifs fluctuent fortement en l’espace de quelques annŽes. Le cas du milieu des annŽes 80 est Žloquent : de 1500 adhŽrents en 1984-1985, les effectifs chutent pour atteindre 70 ˆ 90 adhŽrents en 1987-1988. Ensuite, il existe une instabilitŽ des structures de base, qui sont frŽquemment renouvelŽes en fonction de leurs objectifs, de leurs insuffisances… . Enfin, les finances de l’A.G.E.L-U.N.E.F sont un dernier facteur d’instabilitŽ. Trs dŽpendante des subventions des collectivitŽs territoriales ou universitaires, il est incapable de s’autofinancer par le biais des cotisations et conna”t, en particulier durant les annŽes 70, des difficultŽs financires.

Outre cette instabilitŽ, d’autres ruptures existent : relatif isolement politique et syndical, changement profond de l’orientation syndicale au congrs de Toulouse en 1990 o le r™le de l’U.N.E.F est redŽfinit comme " l’outil des Žtudiants ", relations ambigu‘s avec le B.N de l’U.N.E.F et oscillant entre un alignement complet sur l’orientation nationale, un soutien constant au B.N, une indŽpendance assez marquŽe dans les faits et une faible participation ˆ l’Žlaboration de l’orientation nationale sauf entre 1979 et le milieu des annŽes 80.

 

Le syndicalisme Žtudiant, et c’est le cas de l’A.G.E.L-U.N.E.F, est puissant s’il concilie en son sein un certain nombre d’activitŽs : cogestion, services de proximitŽ, action revendicative, action culturelle. Elles permettent ˆ l’ensemble des adhŽrents de s’exprimer et de participer. La cotisation est alors perue comme une contrepartie des services. Cependant, en dŽpit de sa puissance ˆ certaines pŽriodes, l’A.G.E.L-U.N.E.F s’inscrit dans un contexte plus vaste de dŽsyndicalisation. Certes, elle rŽussit, en particulier gr‰ce ˆ ses services, ˆ freiner considŽrablement les consŽquences de ce phŽnomne jusqu’au milieu des annŽes 80. Mais les signes prŽcurseurs sont dŽjˆ visibles dŽs le dŽbut des annŽes 70 : faible taux de syndicalisation ˆ l’A.G.E.L-U.N.E.F, effacement de l’adhŽrent, dŽplacement de la nature, du r™le du syndicat dans le mouvement Žtudiant (il est au dŽbut l’expression du mouvement Žtudiant pour en devenir l’outil), activitŽ syndicale assumŽe par un petit groupe de militants, substitution ˆ la notion d’adhŽrent celles d’Žlecteur et de client, Žclatement des diffŽrentes fonctions du syndicat. Toutefois, la dŽsyndicalisation n’explique pas la disparition de l’A.G.E.L-U.N.E.F et les causes conjoncturelles apparaissent prŽpondŽrantes


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